Le
gouvernement de Versailles prétend avoir partout étouffé le
mouvement communal. Voici cependant l’adresse du conseil municipal
de Lyon, adressée à l’Assemblée nationale, qui pourrait prouver
le contraire :
Jamais
les circonstances n’ont été plus graves ; jamais la France n’a
été plus près du pire des malheurs : la guerre civile.
La
première cause d’une pareille situation se trouve dans la crainte
d’une restauration monarchique, que la plupart de vos actes n’ont
que trop contribué à faire naître.
Vous
faisant illusion sur la pensée de la France qui, en vous nommant,
n’a eu en vue que la question de la paix ou de la guerre, vous
n’avez laissé passer aucune occasion de vous montrer hostiles à
la République. On craint de vous voir usurper les pouvoirs
constituants. Non seulement vous n’avez rien fait pour rassurer
l’opinion, mais vous l’avez froissée profondément par votre
refus de siéger dans la capitale.
Votre
pouvoir exécutif a mis le comble à l’irritation, en nommant aux
grands emplois des hommes de l’ancien régime, et surtout en
donnant, à Paris, le gouvernement de l’armée, de la garde
nationale et de la préfecture de police à des généraux de
l’Empire, dont le premier acte a été une atteinte à la liberté
de la presse, par la suppression de six journaux à la fois, et le
second une tentative nocturne de désarmement.
Devant
cette série d’actes manifestement monarchiques et cette
intervention dans ses affaires d’ordre municipal, Paris s’est
levé pour affirmer, avec la république, ses libertés communales,
comme Lyon l’avait déjà fait le 4 septembre 1870. Le mouvement a
eu son contrecoup dans notre cité, comme à Marseille, à
Saint-Etienne, à Toulouse, qui se sont agitées au nom de la Commune
libre. Nous convenons, citoyens représentants, que Lyon, ayant déjà
sa municipalité élue, n’avait pas, bien que ses franchises
municipales soient encore incomplètes, de motifs suffisants de
revendication violente.
Nous
sommes convaincus que ceux qui ont pris part au mouvement, en
répudiant l’Assemblée nationale, ont commis la faute grave de
porter atteinte au suffrage universel, seule base de nos
institutions.
Mais
citoyens représentants, lorsque vous vous êtes obstinés à refuser
à Paris la satisfaction qui lui est due, à entrer dans la voie de
conciliation qui vous était proposée par ses maires et par ses
représentants, au risque d’allumer la guerre civile dans toute la
France, nous avons éprouvé une bien douloureuse surprise. Nous
regardons comme un devoir impérieux d’intervenir, nous mandataires
du peuple, responsables devant nos électeurs de la tranquillité
dans notre cité et du maintien de la République. Nous le faisons
résolument, en émettant le voeu que l’Assemblée nationale :
1°
Reconnaisse à Paris, comme à toutes les communes de France, le
droit de s’administrer librement, par des mandataires de son choix
;
2°
Et déclare hautement que, aussitôt son mandat rempli par la
conclusion définitive de la paix, elle convoquera une Assemblée
constituante, chargée d’élaborer la constitution républicaine.
Voilà,
citoyens représentants, ce que, au nom du salut de la patrie, nous
vous conjurons de faire, persuadés que ces déclarations auront pour
conséquence l’apaisement général, la confiance en l’avenir et
la reprise du travail et des transactions commerciales.
Agréez,
citoyens représentants, l’assurance de nos sentiments distingués.
Pour
le conseil municipal :
Le
maire de Lyon, HÉNON.
Pour
copie conforme :
L’adjoint
délégué, D. BARODET
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