-Le
2 septembre 1977 : l’article en une du QDP n°496 « Séguy –
Maire : « beau fixe » Plus que 6 mois pour préparer
l’après-78… » fait état d’une
rencontre le mercredi 31 août 1977 « entre les délégations des
directions confédérales CGT et CFDT » pour « procéder à
« un large échange de vues » sur la situation politique et
sociale. Le communiqué final qui a clôturé cette réunion de plus
de deux heures insiste particulièrement sur le climat de bonne
entente entre les deux états majors confédéraux. On s’y
est mis d’accord sur le principe d’une « relance de l’action
»… par branche et par région. En revanche, Séguy et Maire
ont été moins bavards quant aux tractations sur… l’après
78. Ce n’est pourtant pas la moindre de leurs préoccupations
aujourd’hui. ». En page 3 l’article « Rencontre
Séguy-Maire : Préparer une négociation avec le gouvernement de
gauche » revient plus en détail sur les motivations de cette
rencontre : comment éviter que les travailleurs mettent en péril
l’action du futur gouvernement de gauche.
En
juin, rappelle l’article
«
la CGT avait mis l’accent sur ce qui unissait les deux
syndicats, minimisant à l’évidence les points de désaccord.
Parmi ces convergences, il en est une de taille, comme le dit
Krasucki : » La CFDT est contre les débordements irresponsables, et
nous contre la surenchère ». Pour Maire, il s’agit de «
maîtriser les rapports entre l’action gouvernementale et l’action
des masses ». On ne peut être plus clair. Cet accord de fond remet
à leur place toutes les tentatives des directions CGT et CFDT
de se démarquer de l’union de la gauche. ».
Plus
loin, l’article se poursuit par une analyse des relations et des
projets du PCF et de la CGT, puis des contradictions de la CFDT
«Pour
la CFDT, les choses sont moins simples. Le 17 août, E. Maire
accordait au Monde, une interview qui a fait grand bruit, dans lequel
il mettait tous les partis de gauche dans le même sac, du moins
en apparence. C’est que dans la CFDT, le PS inspire de plus en plus
de méfiance. E. Maire n’a d’autres choix, s’il veut maintenir
un minimum d’unité dans la CFDT, que d’invectiver la gauche, que
de poser les questions que posent une bonne partie des
militants. Il en va de la « crédibilité de l’orientation
autogestionnaire », comme il dit. D’autre part, il tente de
reprendre les aspirations, les questions des militants, de l’autre,
il donne des réponses qui toutes ramènent à la gauche : «
L’importance du mouvement syndical et la nécessité de son
action dans l’union des forces populaires ont rarement été
aussi grande », conclut-il. La marge de manoeuvre n’est pas
large, car bon nombre de militants ne sont pas prêts à
donner un chèque en blanc à la gauche. » L’article se
conclut par « C’est bien l’urgence pour les dirigeants
confédéraux d’avancer dans la résolution de ces problèmes,
l’incertitude qui plane sur l’après-78, qui motivent la
tenue de réunions comme celle de mercredi. ».
Sur
la même page, un encart rappelle les « convergences et
divergences » de Séguy et Maire. A la page 2, un long
article de Nicolas Duvallois, intitulé : « Programme
Commun version 77 : L’entente forcée des frères ennemis »
indique qu’«au plus fort de la polémique entre les partis de
gauche, dans sa phase ascendante du mois d’août, Marchais
lâche
dans l’Humanité qu’ «on est bien loin de l’accord »,
quelques soixante-dix points de désaccords subsistent avant le
sommet prévu à la mi-septembre. Réponse de Mitterrand, deux
semaines plus tard : ce fameux sommet n’aura à traiter que
« trois ou quatre grandes questions », et quelques
heures suffiront pour en venir à bout… » . Nicolas
Duvallois, précise : « il s’agit pour le PCF et pour le PS
d’arriver à ce fameux programme commun version 77,
dont le but est d’unir, un peu plus un peu moins –là est
la question- des projets à moyen terme contradictoires. »
Les
nationalisations, le calendrier d’application, la défense
nationale et les institutions, sont les points analysés dans cet
article. Nous avons là, dans les articles de ce n°496 du QDP datant
du 2 septembre, les éléments des contradictions et des divisions
entre la CGT et la CFDT, entre le PCF et le PS, mais aussi leurs
convergences. De plus, nous sommes toujours
début
septembre dans l’optique où les résultats des municipales et le
rejet de la droite, c’est la victoire de l’union de la gauche en
78. L’échec de l’actualisation du programme commun n’est pas
souhaité à ce moment là.
-Dans
le QDP n°497 (samedi 3 septembre 1977) un article d’Olivier
Lussac revient sur le passage du secrétaire général du PCF
jeudi soir 1er septembre à la télé : « Marchais à Antenne 2 :
Des justifications pour l’après 78 » sur les questions et les
interrogations de celui-ci sur ce que fera le PS et sur ses
inquiétudes pour mars 1978 :
«
Inquiétudes fondées, mais bien tardives et bien suspectes de la
part d’un personnage qui a joué un grand rôle dans la
remise sur pied de la vieille social-démocratie. » En page
intérieure l’article d’Olivier Lussac en page 6 indique :
« Alors que l’on annonçait comme vraisemblable la date du 14
septembre pour le sommet de la gauche, qui doit conclure les
travaux de renégociation du programme commun, Marchais poursuivait
sa polémique à la
télévision.
Si elle ne nous apprend rien de bien nouveau, l’interview de
jeudi soir à Antenne 2 n’en est pas moins révélatrice des
difficultés du PCF. Révélatrices en particulier ces deux questions
formulées par Marchais ; en cas de victoire, comment la gauche va
pouvoir va-t-elle « résoudre le problème du
chômage, des prix, de la hiérarchie des salaires, des
nationalisations, de la défense nationale… », et : «
que penseraient les Français si, avec un
premier ministre de gauche à la place de Barre, l’inflation
continuait, si les chômeurs restaient chômeurs ? »
Questions
dont on ne peut reprocher le caractère pertinent, et que les
marxistes-léninistes n’ont cessé de poser aussi
bien en ce qui concerne les propositions du PCF, que celles du PS ;
mais questions qui sont pour le moins déplacées dans la bouche
de Marchais. Parce que qui d’autre que Marchais lui-même et
toute la direction du PCF ont fait miroiter depuis plus de
quinze ans, la perspective d’une alliance électorale avec la
social-démocratie ? Qui
d’autres
que Marchais et le PCF, ont servi de marche-pied à la vieille
social-démocratie, complètement défraîchie en 69, pour
l’aider à faire peau neuve et à redevenir le premier parti de
France ? ».
Comme
le dit la suite de l’article : « La contradiction profonde qui
oppose le projet social-démocrate et celui du PCF, contient,
plus qu’en germe, la rupture de demain, au point que c’est
aujourd’hui très largement évoqué dans toutes les
hypothèses politiques envisagées à droite et à gauche !
Et
Marchais fait semblant de s’en apercevoir aujourd’hui ! En
fait il s’aperçoit surtout que la désillusion risque de faire
des remous à la base, et que bon nombre de militants du PCF se
poseront plus nettement encore la question du rapport entre le
socialisme auquel ils aspirent et le « socialisme aux couleurs de la
France », dont l’union de la gauche devait ouvrir la
voie ! Ne pas écarter la possibilité de la rupture revient donc,
pour les dirigeants de ce parti, à se préparer à affirmer
lorsqu’elle se fera : « Nous
vous l’avions bien dit ! » ! Dans les
extraits des propos de Marchais, reproduis dans ce n°497 du QDP le
passage suivant indique : « François Mitterrand a dit : «Nous
ne ferons pas alliance avec les forces de droite ». Mais
un journaliste évoque aujourd’hui la possibilité d’une
situation à la portugaise, c’est-à dire une situation dont
le rapport de force permettrait au PS, avec la complicité
bienveillante de la droite, d’essayer de gérer les affaires
de la France avec un gouvernement socialiste homogène, c’est à
dire sans participation communiste. Il faut donc que
Mitterrand dise nettement : « Nous voulons
un gouvernement d’union de la gauche avec les communistes… ».
-Le
n°498 du QDP en date du dimanche 4 et lundi 5 septembre 1977, titre
: « Marchais et Mitterrand insistent sur leurs divergences
: Feu roulant avant l’armistice » l’article annonce
que « Au stade actuel, il semble donc que l’on aille vers un
compromis au sommet qui sera en faveur du PS ».
-Le
QDP n°499 du mardi 6 septembre 1977, revient sur « Les grandes
manoeuvres de Marchais » pour tenter « d’intéresser les
travailleurs à ses marchandages avec le PS ».
Un
article de ce n°499 signé d’Olivier Lussac, aborde le sujet de «
La rentrée des états majors syndicaux » et de la « reprise
de l’action syndicale » car « la CGT, notamment, à l’image
du PCF, se montre « ferme » : « Provoquer une accalmie sur
le front social en fonction des perspectives politiques ne serait pas
seulement une erreur, mais une faute » déclarait lundi au « Matin
» Michel Warcholak, secrétaire de la CGT. Il ajoute : «
Le développement des luttes n’est pas susceptible de
gêner la gauche. Cette dernière ne peut pas fonder sa stratégie
sur un comportement attentiste. Elle doit encore gagner
beaucoup de voix y compris parmi les travailleurs ».
Voilà
un discours qui s’intègre à merveille à l’actuelle pression
que fait subir au PS le PCF. D’autant plus que Maire vient rajouter
d’une certaine manière de l’eau au moulin du PCF en déclarant :
« Nous estimons que toute la vérité doit être dite dès
maintenant aux Français, que rien –même
si cela est désagréable à entendre- ne peut être caché. »
Cela
vaut d’ailleurs à Maire les égards du PCF : Marchais qui
aspire à rencontrer les dirigeants de la CFDT, alors que l’«
Humanité » loue ses initiatives et ses prises de position. »
Dans
le QDP n°501 daté du 8 septembre 1977, François Marchadier sous le
titre « La soif de pouvoir de Marchais » fait le point sur
la polémique entre les partis de gauche, quelques jours avant le
sommet prévu pour le 14 septembre. François Marchadier indique que
:
«
L’Humanité de mardi insiste particulièrement sur
le refus opposé par les socialistes aux propositions du PCF
concernant les mesures sociales. Mais l’éditorial ne se
contente pas d’enfoncer le « clou du SMIC »,
il conteste les prises de position des dirigeants socialistes
à la suite de l’Huma spéciale de lundi. Trois dirigeants
importants du PS, Mauroy, Estier, Hernu, ont fait connaître leur
point de vue dans la journée de lundi : ces déclarations
veulent donner le visage de l’apaisement, pour faire apparaître
le PS comme étant le plus unitaire au sein de la gauche. En même
temps, les dirigeants socialistes laissent entendre que le PCF
souhaiterait aujourd’hui l‘échec de la gauche aux
prochaines législatives.
Pour
accréditer cette idée, le PS peut s’appuyer sur les
interrogations de certains travailleurs qui se demandent où
veut en venir exactement le PCF, par l’intensité de sa polémique.
Un des raisonnements est le suivant : « Considérant
qu’il parviendra au pouvoir dans une situation économique
extrêmement dégradée, le PCF estime
qu’il ne parviendra pas à redresser la barre et préfère rester
dans l’opposition. » Ce raisonnement
prend assurément les dirigeants du PCF pour bien plus naïfs qu’ils
ne sont, car ceux-ci savent depuis longtemps ce que sera la
situation économique lors d’un éventuel avènement de la
gauche au pouvoir, et ils n’ignorent pas justement, comme le montre
leur insistance sur le SMIC, que la baisse du pouvoir d’achat, le
chômage sont ce qui favorisera l’existence d’une majorité
possible pour la gauche. De même, la nature du PS, la
volonté de ce parti de se débarrasser du PCF dès qu’il le
pourra, ne sont pas une découverte pour les chefs
révisionnistes ; eux qui ont renfloué la social-démocratie
en vue d’accéder au pouvoir
par
alliance avec elle, savaient dès le départ à quoi s’en
tenir. Le raisonnement selon lequel le PC serait « surpris »
aujourd’hui par la volonté hégémonique du PS, et qu’il
renoncerait de fait à une victoire de gauche où il aurait la
portion congrue, ne tient pas. De plus, le PCF ne peut prendre
aujourd’hui le risque de renoncer à l’union de la gauche ;
lui qui, depuis une quinzaine d’années, a bâti toute sa
politique sur cette union, la présentant aux travailleurs comme
l’unique alternative à la situation actuelle, il ne
pourrait être compris par sa base et son électorat. Surtout,
l’objectif de Marchais reste le même et cet objectif ne peut
commencer à se concrétiser que par l’accès de son parti au
pouvoir, même pour cette période délimitée. Il veut que
son parti profite du passage au gouvernement pour s’implanter
solidement dans l’appareil d’Etat, gagner des postes au sein des
entreprises nationalisées, des commissions de planification, au sein
des appareils de la justice, la police, l’armée. Les dirigeants du
PCF peuvent estimer qu’ils ne pourront pas –dans
un premier temps- faire beaucoup plus. Les pions qu’ils
auront placés, ils espèrent pouvoir les utiliser par exemple
–dans un second temps- pour un retour en force. Par
la polémique actuelle, outre la tentative d’arracher au PS
le maximum de concessions avant le sommet des partis
signataires du programme commun, le PCF se place dans la perspective
de l’après 78. Il essaye de se forger une image de
défenseur des travailleurs, meilleure que le PS sur lequel il veut
attirer le soupçon de vouloir s’opposer aux masses, si la
gauche vient au pouvoir. Mais cette polémique n’implique nullement
que le PCF renonce à une victoire de la gauche. Au contraire,
car jamais peut-être autant qu’aujourd’hui, il n’a eu
la volonté de
se hisser aux commandes de l’appareil d’Etat. (François
Marchadier). ».
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire