mercredi 7 juin 2017

Athéisme Part 4



Voyons à présent les prétendues preuves de l’existence de Dieu. Le premier argument que tout chrétien lance dans une discussion avec un athée, c’est celui de Fénelon et de Bossuet qu’on a redit à satiété : il faut un horloger pour faire une montre, un peintre pour faire un tableau, il faut donc un auteur à toute chose, cet auteur, je l’appelle Dieu, donc Dieu existe. Cet argument n’a pas plus de valeur qu’une bulle de savon ; s’il a fallu un créateur pour créer le monde, qui a créé ce créateur et le créateur de ce créateur ? et ainsi de suite à l’infini. La preuve théiste n’est qu’une pétition de principe, car c’est l’affirmation de la création, parce que ce que ce créateur existe ; or, ce créateur premier ne peut être, puisqu’on peut toujours le reculer et, de plus, la création n’a pas été prouvée et ne le sera probablement jamais, car la science se passe très bien de l’idée de création.

Fénelon croit avoir tout dit en opposant l’idée de Dieu au hasard. Or, le hasard ne serait encore qu’un Dieu, tandis que la science telle qu’elle existe aujourd’hui, reconnaît des lois, pas un hasard ; ces lois sont éternelles autant qu’on peut le déduire de toutes les observations. Donc pas de Dieu. Les arguments de Fénelon sont parfois de purs enfantillages, ainsi : "Si l’eau était plus ou moins dense 
qu’elle n’est, elle ne pourrait supporter des vaisseaux", ce qui revient à dire que les eaux ont été créées pour porter des navires et non que les bateaux ont été inventés pour naviguer sur les eaux.

"Si la terre était plus ou moins dure qu’elle n’est, elle ne pourrait pas être cultivée ou bien elle ne pourrait pas supporter l’homme." 

Toujours le fameux principe : C’est Dieu qui a créé tout cela pour l’homme, pour le bien de cet homme, le favori de Dieu. Les serpents venimeux, les bêtes sauvages, les scorpions, les punaises, les poux, les bactéries pathogènes, la fièvre thyphoïde, la lèpre, la tuberculose, les mouches cancéreuses, etc., ont donc été créés pour le bien de ce bien-aimé de la divinité ?...

Tout le livre de Fénelon, qu’on employait de mon temps dans les classes de philosophie, est plein d’arguments de la force de celui de la densité des eaux, la beauté de la nature, l’instinct des animaux. Fénelon écrit des choses aussi étonnantes que celle-ci : "Toutes les qualités des personnes et des choses viennent de Dieu, l’intelligence est une qualité, donc Dieu nous donne l’intelligence, donc Dieu existe. De même pour nos idées claires ou de sens commun. De même pour nos pensées supérieures. Un moment de réflexion suffirait à un enfant pour découvrir la aiblesse d’une telle argumentation. C’est toujours la pétition de principe. L’évêque de Cambrai commence par admettre le dessein d’un être supérieur, au lieu de nous prouver que cette intelligence suprême existe.

Un autre argument tout aussi ridicule, c’est celui de la beauté du corps humain : « Si la tête était moins grosse elle n’aurait aucune proportion avec le reste de la machine. Si elle était plus grosse, outre qu’elle serait disproportionnée et difforme, elle accablerait le cou et courrait le risque de faire tomber l’homme du côté où elle pencherait un peu trop. » L’auteur ne connaissait pas tous les animaux
monstrueux : le plésiosaure, le ptérodactyle, etc., à qui on a donné le nom absurde d’antédiluviens et qui ont probablement existé pendant des milliers d’années, tant que les situations climatiques leur ont permis de se nourrir quoique leurs corps, selon nos idées modernes, soient disproportionnés et mal conditionnés. Après avoir lu Fénelon, aucun lecteur intelligent ne manquera de reconnaître qu’il n’y a trouvé nulle preuve valable de l’existence de Dieu. 

Les preuves dites métaphysiques ne valent pas mieux. L’apologiste catholique J.-J.- Auguste Nicolas, dans ses Etudes philosophiques sur le Christianisme (4 volumes in-8°, 1842-45) souvent réimprimés, croit avoir découvert une nouvelle preuve de l’existence de Dieu. Pour lui la meilleure démonstration de cette existence c’est que l’homme a conçu l’idée même de la divinité. Toute autre idée se rapporte à la matière, qualités et défauts, beauté, laideur sont toujours le résultat d’une comparaison tacite, or Dieu ne peut-être comparé à rien. Cet argument est fallacieux car pour l’immense majorité des êtres qui ont cru ou qui croient encore à Dieu, cette déité est bien un être ou, comme le dit la Bible, un Dieu
vivant, - il n’y a que les êtres matériels qui soient doués de la vie. Ce n’est qu’assez tard que l’esprit humain s’est élevé, si l’on peut parler ainsi, à l’idée d’un esprit qui, même alors était doué de toutes les fonctions de l’être humain. Ecoutez deux chrétiens discuter, ils vous parleront de l’oeil de Dieu, du doigt de Dieu, de la main de Dieu, de l’esprit de Dieu, de la volonté de Dieu, de la colère de Dieu, etc,. 

Les apologistes chrétiens donnent comme preuve de l’existence de Dieu l’idée d’infini qu’a l’homme. Or, l’homme, en général, ne raisonne pas sur l’infini, seuls les mathématiciens se rendent compte, et encore assez imparfaitement de l’infini. Pour le théiste, Dieu est fini puisqu’il est limité par l’univers, ou pour le croyant par la terre et le ciel, c’est-à-dire par les nuages et l’atmosphère. Comme il est impossible que deux corps puissent occuper le même espace, Dieu ne peut exister s’il est infini, puisque la matière est limitée et que l’esprit infini devrait être limité par l’espace occupé par la matière.

Un argument très souvent employé, c’est l’affirmation de la reconnaissance universelle par les êtres humains de l’existence de Dieu. Or, les voyageurs modernes ont découvert de nombreuses tribus qui n’ont aucune idée d’un être supérieur gouvernant la terre et les cieux. Le grand ouvrage du savant Frazer (Le Rameau d’Or), donne bien des exemples de cette absence complète de connaissance d’un dieu. Les Bouddhistes véritables, qui sont athées, se comptent par millions ; les disciples de Confucius ne connaissent pas non plus de dieu. Parmi les savants modernes, il est rare de trouver un théiste. Tous les vrais savants comme Berthelot, Lalande, Laplace, Tyndall, Huxley, Haeckel, Ostwald, etc., sont, ou nettement athées, ou positivistes ou agnostiques, les deux derniers déclarent que puisque l’esprit humain ne saurait arriver à découvrir les causes premières, il s’abstiennent de s’en occuper. Or, comme ils n’admettent pas un Dieu selon l’idée ordinaire, et la définition générale, ils sont en réalité athées pour les théistes.

Descartes, dans son Discours sur la Méthode, après avoir fait table rase de toutes les théories philosophiques enseignées avant lui, recule devant les conséquences de sa négation, finit par admettre l’existence d’un Dieu, sans pouvoir toutefois le définir, il se base sur l’existence des causes et effets, démonstration qui revient à celle de Fénelon, il dit : « Nous sommes assurés que Dieu existe parce que
nous prêtons attention aux raisons qui nous prouvent son existence. Mais après cela il suffit que nous nous ressouvenions d’avoir conçu une chose pour être assurés qu’elle est vraie, ce qui ne suffirait pas si nous ne savions pas que Dieu existe et qu’il ne peut être trompeur. » De nouveau pure assertion, mais aucune preuve.

J.-J. Rousseau, déiste comme Voltaire, donne deux preuves de l’existence de Dieu :

1° L’idée du premier moteur ou l’origine du mouvement, et 2° l’autre, celle des causes finales. Nous savons à présent que toute dans l’univers est en mouvement, que toutes les molécules des corps sont retenues ensemble par le mouvement de ces molécules et que pas n’est besoin d’un être supérieur pour
entretenir ce mouvement et le diriger ; c’est une loi immuable de la nature. Les découvertes (Becquerel, Curie, Le Bon, Rutherford, Carnot, Meyer, Herz, Helmholz, Roentgen, Gresnel, etc.), l’ont surabondamment démontré. La preuve dite des causes finales revient à dire que Dieu créa l’univers pour servir à l’homme, c’est ce que prêchent les théologiens. Quelques philosophes ont osé déclarer qu’ils ignoraient complètement le but de Dieu. Les athées répondent : l’univers n’a aucune
destination et ne peut en avoir.

Preuves qu’on trouve dans les traités de théodicée employés dans les lycées

— 1° La loi morale qui dicte ses arrêts dans le sanctuaire de la conscience suppose un législateur. Nous ne sommes pas les auteurs de cette loi, le plus souvent en désaccord avec nos penchants. Ce législateur c’est Dieu ; donc Dieu, etc.

— 2° La sanction de la loi morale, insuffisante ici-bas, suppose une sanction ultérieure, qui, elle-même ne saurait avoir lieu sans un juge suprême, rémunérateur et vengeur. Ce juge, c’est Dieu donc.

— 3° Nous avons l’idée de perfection ; or, cette idée implique l’existence, car une perfection à laquelle il manquerait l’existence serait une perfection imparfaite, ce qui est absurde, cette perfection, c’est Dieu donc, etc.

— 4° Tout ce qui est rigoureusement renfermé dans l’idée d’une chose doit en être affirmé ; or, l’existence actuelle est renfermée dans l’idée d’être nécessaire, donc il existe un être nécessaire : Dieu.

— 5° Tout attribut suppose une substance qui ne peut être moindre que l’attribut lui-même ; or, l’éternité et l’immensité sont des attributs infinis ; donc ils supposent une substance infinie (Newton, Clarke).

Le Dr Carret (Démonstrations de l’Inexistence de Dieu), analyse les preuves données par Saint Anselme, Saint Thomas d’Aquin, Gastrelle, La Luzerne, Newton, Clarke, Hancock, Woodward, etc., mais il fait comprendre tout le vide des prétendues preuves.

Retournons aux arguments contre l’existence de Dieu ; on ne peut les appeler preuves puisque l’on ne peut prouver une négation, comme nous l’avons déjà dit, mais on peut prouver que l’idée d’un Dieu tout puissant et bon est absurde. Le raisonnement d’Epicure, célèbre philosophe grec, est resté invincible. Le voici tel que nous le connaissons d’après la réfutation de Lactance, père de l’Église :

Le mal existe ; or de deux choses l’une : 

— 1° Dieu sait que le mal existe, veut l’empêcher et ne le peut pas... un tel Dieu serait impuissant, donc inadmissible.

— 2° Dieu ne sait pas que le mal existe... un tel Dieu serait donc aveugle et ignorant, donc inadmissible.

On ne voit pas d’autre hypothèse possible. Donc Dieu n’existe pas. Les croyants se sont acharnés contre le dilemme d’Epicure. Ils veulent faire croire que le mal existe parce que le premier homme a désobéi en Eden et que ce mal sert à améliorer l’homme lui-même. Ce châtiment infligé à la descendance tout entière des coupables serait assez épouvantable pour faire douter de l’existence d’un
Dieu si atroce. Mais tout souffre dans la nature ; tous les animaux, depuis les plus grands aux microscopiques souffrent de leur naissance à leur mort, les plantes elles mêmes souffrent et périclitent, la nature brute elle-même n’échappe pas aux transformations et à ce que nous appelons la mort.

Les molécules, les métaux mêmes se transforment peu à peu, il y a donc souffrance partout. Un Dieu immuable et bon ne saurait exister. Il est vrai que des philosophes, comme le baron de Colins et ses disciples croient, à la suite de Descartes, que les animaux sont insensibles, que ce sont des machines. Cette théorie ne supporte pas l’observation exacte des animaux, et puis la machine elle-même ne se détraque-t-elle pas, de plus ne peut-on pas considérer le travail comme une peine ? Il est vrai qu’elle n’a pas de nerfs et de cerveau qui font que les êtres animés se rendent compte de la douleur, mais la matière se transformant, se gâtant est une preuve que le mal existe partout et pourtant les animaux n’ont pas mangé la pomme avec Eve.

Les scientistes chrétiens, qui ont tant d’adeptes en Amérique et aussi en Europe, prétendent que la souffrance n’est pas réelle, qu’elle est une conséquence de notre imagination. Ceux qui osent dire cela n’ont jamais visité les hôpitaux ni les asiles d’aliénés ; ils n’ont pas entendu les cris de douleur que poussent les malades, les blessés. Ces scientistes chrétiens n’ont jamais guéri de vraies douleurs, pas plus que les prières ou les visites aux lieux de pèlerinage ne le font. Quand l’auto-suggestion est terminée, les maux recommencent. Le mal existe donc et un Dieu qui l’aurait créé, le sachant et le voulant est incompréhensible, impossible.

Si Dieu ne sait pas que le mal existe, la chose est encore plus absurde, cela ressemblerait au Dieu de la Bible qui ne sait pas ce qui se passe dans le paradis terrestre et est obligé de s’y promener pour voir ce qu’y faisaient les nouveaux époux. Ce serait comme Jupiter qui descend sur la terre pour juger des 
abominations qui s’y commettent et punit du déluge de Deucalion et Pyrrha les humains pour le crime du roi Lycaon.

Un Dieu comme celui de la Bible ou des Métamorphoses ne peut être admis que par des esprits bornés.

S’il y a un Dieu pourquoi y a-t-il tant de religions ? Les prêtres prétendent tous que leur Dieu est le seul vrai Dieu. Or, il y a une infinité de religions et de sectes qui ne croient pas au Dieu des autres religions. S’il y avait un Dieu, n’aurait il pas fait en sorte que tous les humains le reconnaissent ? Le Dr Carret résume ainsi cette objection :

De trois choses l’une.

— 1° II y a un Dieu, ce Dieu a voulu se manifester aux humains et le nombre des religions prouve qu’il n’a pas réussi. Dans ce cas, Dieu est impuissant, donc inadmissible : tous les cultes sont absurdes et tous leurs dieux sont faux.

— 2° II y a un Dieu : ce Dieu n’a pas voulu être connu de nous et ne se soucie aucunement de nos adoration. En ce cas, tous les cultes sont absurdes et tous leurs dieux sont faux, car aucun ne ressemble au Dieu réel.
— 3 ° II n’y a pas de Dieu. En ce cas, tous les cultes sont absurdes. 

Aucune autre supposition n’est possible.

Les athées se servent encore d’autres arguments pour combattre la croyance : l’impossibilité du libre arbitre ; l’inexistence d’une âme mortelle ; la différence entre la volonté et le libre arbitre, etc. Tout cela devra faire le sujet d’autres articles dans l’Encyclopédie.

Les Spirites qui se démènent tant à présent et dont beaucoup ne croient pas en Dieu, croient à la survivance de l’âme après la mort. L’Institut métapsychique de Paris et The Society for psychical research de Londres, cherchent à prouver cette survivance, mais toutes leurs expériences ne prouvent rien jusqu’ici et toutes les manifestations dont parlent les métapsychiques n’ont encore rien produit de
convaincant. Nous pouvons admettre que l’âme n’est qu’une fonction du cerveau et qu’aussitôt que la mort survient, il n’y a plus d’âme et que les molécules du cerveau se désagrégeant, il ne peut y avoir d’immortalité.

Donc pas plus d’âme que de Dieu et le raisonnement d’Epicure reste inébranlable. On a donné le nom d’épicuriens aux amis de la bonne chère. Sans être des ascètes, on peut aimer le bien, se dévouer à l’humanité, c’est ce que voulait Epicure. Il mettait le bonheur dans la satisfaction des besoins intellectuels et moraux. Son disciple Lucrèce, dans son grand poème De Naturâ Rerum le fait bien 
comprendre.

Dans tous les temps, l’histoire a dû reconnaître la parfaite honnêteté des athées. L’antiquité a cité comme des modèles de vertu des athées comme Diagoras, de Milo, qui se rattachait à l’école de Leucippe ; Théodore et Evhémère, sortis de l’école de Syrène ; Straton de Lampsaque, Métrodoros, Plysemos, Hermachos, Polystratos, Basilides, Protarchos.

On peut aussi inclure parmi les athées toutes les écoles philosophiques grecques depuis Thaïes (Anaximène, Anaxagore, Achellaos), jusqu’à Socrate qui fut condamné à mort sur une accusation d’athéisme. Parmi les athées, il faut comprendre Hérédité, Empédocle, Démocrite, Pyrrhon et toute l’école sceptique (Timon, A. Aenesidème, etc.) ; l’école stoïque (Zenon, Aristo de Chios, Cleantes, etc.).

L’athéisme a toujours été admis par les esprits éclairés de l’antiquité, mais l’établissement d’une religion officielle dans la plupart des États a empêché parfois l’enseignement de cette doctrine. Les gouvernements se sont toujours servi de leur autorité, et des persécutions pour écraser la terrible négation qui, du coup ébranlait toute religion et tout respect pour l’État.

Les athées étaient obligés, sous peine de mort ou de ruine, de mettre un frein à leur franchise. Montaigne, la Boétie, Charron, Giordano Bruno, Vanini étaient athées, mais ils n’osaient pas le proclamer et les deux derniers ont payé de leur vie les doutes qu’ils faisaient entrevoir sur l’existence de Dieu.

Au XVIIIe siècle, Helvétius, d’Holbach, d’Alembert, Diderot étaient des athées, Voltaire et Rousseau qu’on a souvent accusés d’athéisme étaient déistes, de même que Robespierre. Par contre, Marat, Babeuf, Buonarotti étaient athées, aussi ont-ils été salis par tous les écrivains réactionnaires.

Les socialistes du commencement du XIXe siècle n’avaient pas encore secoué l’esprit théiste quoique pour eux le mot Dieu n’eût pas grande signification. En Allemagne, Kant, Schopenhauer, Nietzsche, et leurs disciples, ne reconnaissaient aucun Dieu.

Karl Marx, Engels, Lassale, Kautski, étaient athées, ainsi que les Hégéliens et les socialistes démocrates, mais pour ne pas choquer les masses, ils s’abstenaient d’attaquer l’idée théiste.

Il y a de très nombreux prêtres catholiques et pasteurs protestants qui ne croient pas en Dieu, mais par lâcheté, par peur de perdre leur gagne-pain ou leur position sociale, ils se gardent de faire voir ce qu’ils pensent. Je l’ai remarqué bien des fois et quelques-uns de ces fourbes me l’ont avoué, ils continuent à prêcher ce qu’ils considèrent comme des mensonges. On ne peut que plaindre ces hommes malhonnêtes envers eux-mêmes.

Quelle différence avec Lalande, le grand savant, continuateur du dictionnaire des athées de Sylvain Maréchal. Quoique mal vu de Napoléon à cause de ses opinions, il a écrit :

« Je me félicite plus de mes progrès en athéisme que de ceux que je puis avoir faits en astronomie. Le spectacle du ciel paraît à tout le monde une preuve de l’existence de Dieu. Je le croyais à 19 ans, aujourd’hui, je n’y vois que de la matière et du mouvement. »

G. Brocher

Athéisme Part 3



Tous les livres sacrés de l’Orient qui parlent des dieux en font des êtres , humains supérieurs. Le Nouveau Testament dit que Dieu est esprit,ce qui ne veut rien dire, car pour la plupart des hommes, la lumière, la chaleur sont des esprits, tandis que ce ne sont que des manifestations des mouvements de la matière. Ce qu’en psychologie, on appelle esprit n’est qu’une des fonctions du cerveau, donc 
une manifestation de la matière. Dieu serait donc matériel, chose aussi absurde qu’impossible.

Voyons à présent ce que pensent de Dieu quelques écrivains remarquables : Le grand inventeur Th. A. Edison a dit : « Dieu ? Un être suprême, assis sur un trône accordant aux individus humains une paix éternelle ou les condamnant à des châtiments sans fin pour ce qu’ils ont pu faire ou manqué de faire sur la terre ?

Cette pensée me paraît aussi fallacieuse que répugnante... Aucun des dieux des différentes théologies n’a jamais été prouvé... Je n’ai jamais vu la plus légère preuve scientifique des théories religieuses sur le ciel et l’enfer, sur la vie future pour les individus, ou de l’existence de Dieu. » (Columbian  Magazine, Janvier 1911.)

Le Jéhovah du Pentateuque était un meurtrier, un bandit, il aimait les offrandes de chair humaine. Les dieux d’Homère étaient lascifs et dépravés. Les dieux des sauvages sont simplement des chefs sauvages. Dieu est donc une image de l’esprit (Winwood Reade, Martyrom of Man (Le Martyre de l’Homme). Le grand physiologiste américain L. Burbank a dit : « Le ciel et l’enfer des croyants
n’existent pas. Ils ne pourraient exister s’il y avait un maître tout-puissant et juste. Aucun criminel ne pourrait être aussi cruel qu’un Dieu qui plongerait les êtres humains dans l’enfer. »

« Cherchez les annales du monde entier, découvrez l’histoire de toute tribu barbare, et vous ne trouverez aucun crime qui soit descendu à une plus grande profondeur d’infamie que ceux que Dieu a commandés ou approuvés. Pour ce Dieu, je ne trouve pas de mots pour exprimer mon horreur et mon mépris, et tous les mots de toutes les langues seraient à peine suffisants. » (Ingersoll.)

L’un des plus grands poètes, Shelley, a écrit : « Tout esprit réfléchi doit reconnaître qu’il n’y a pas de preuve de l’existence d’une déité. Dieu est une hypothèse, et comme telle a besoin de preuve. L’onus probandi est à la charge des théistes (c’est à dire ce sont les théistes qui doivent prouver cette existence). »

Cette idée (l’existence de Dieu) a empêché les progrès de la raison. (d’Holbach.) S’il y a un Dieu, nous lui devons notre intelligence, mais notre intelligence nous dit clairement qu’il n’y a pas de Dieu. Donc Dieu nous dit qu’il n’y a pas de dieu (Rabindranath Tagore, grand poète hindou).

L’Homme est le dieu d’aujourd’hui, et la crainte de l’homme a remplacé la vieille crainte de Dieu. (Max Stirner).

Les théistes, tout en ne s’entendant pas sur la signification de leur Dieu, s’accordent fort bien pour attaquer l’athéisme. La Bible a déjà dit : L’insensé a dit dans son coeur : "Il n’y a pas de Dieu." Le philosophe Cousin, l’un des protagonistes de la philosophie officielle sous l’Empire, a dit que l’athéisme était impossible. D’autres voudraient faire croire que l’athéisme conduirait nécessairement au malheur et au crime. Cependant, Voltaire, déiste et adversaire de l’athéisme a dit : « Le chancelier de l’Hôpital, athée, n’a fait que de sages lois, il n’a consulté que la modération et la concorde ; les fanatiques (c’est à dire les croyants, pour Voltaire), ont commis la Saint-Barthélémy ; Hobbes, athée, mène une vie tranquille et innocente ; les fanatiques de son temps inondèrent de sang l’Angleterre, l’Ecosse et l’Irlande ; Spinoza était, non seulement athée, mais il enseigna l’athéisme et ce ne fut pas lui assurément qui prit part à l’assassinat de Barneveldt..., ce ne fut pas lui qui déchira les deux frères de Witt en morceaux et qui les mangea sur le gril. Peuplez une ville d’Epicures, de Protagoras, de Desbarreaux de Spinoza, peuplez une autre ville de jansénistes et de molinistes, dans laquelle, croyez-vous qu’il y aura plus de troubles et de querelles ? » Voltaire a dit aussi : « II est beaucoup plus agréable de passer sa vie auprès des athées qu’avec les superstitieux. L’athée, dans son erreur, conserve sa raison, qui lui coupe les griffes, mais le fanatique est atteint d’une folie perpétuelle qui aiguise les siennes. »

Un apologiste du christianisme, le pasteur James Buchanan, dans son livre Faith in God and Modem atheism compared(La foi en Dieu et l’athéisme moderne comparés) divise les diverses variétés d’athéisme en quatre classes.

— 1°) L’hypothèse aristotélique, qui affirme que l’ordre actuel de la nature ou le monde tel qu’il est constitué à présent existe de toute éternité et qu’il n’aura jamais de fin.

— 2°) L’hypothèse épicurienne qui reconnaît l’éternelle existence de la matière et du mouvement et qui attribue l’origine du monde, soit avec Epicure à un concours fortuit d’atomes, soit avec des savants modernes à une loi de développement progressif à l’évolution.

— 3°) Le système stoïque qui affirme la coexistence et la coéternité de Dieu et du monde, représentant Dieu comme l’âme du monde, ni antérieur au monde, ni indépendant de lui. et soumis, comme la matière, aux lois du destin.

— 4°) L’hypothèse panthéiste qui nie la distinction entre Dieu et le monde. Selon ce principe, l’univers est Dieu et Dieu est l’univers.


Nous avons déjà parlé du panthéisme, il nous suffira de dire que le panthéisme, quoique apparemment plus logique que le théisme ou le déisme, n’est qu’une hypothèse aussi peu démontrable que le  théisme pur. La difficulté d’expliquer l’origine de la matière est aussi grande, soit qu’on appelle celle-ci Dieu, soit qu’on en fasse une émanation de la déité ; ce n’est qu’une logomachie, malgré le génie de philosophes comme Spinoza qui ont soutenu le panthéisme.

La théorie stoïque n’est, après tout, qu’une forme du panthéisme, avec, peut être, moins de base solide que celui-ci.

Il ne reste guère que les théories d’Aristote et d’Epicure, qui forment vraiment la base des sciences physiques modernes, toutes fondées sur l’atomisme bien que les savants actuels aient poussé plus loin que les anciens l’étude des atomes, dont chacun peut se diviser en des millions de parcelles, tout en restant de la matière en mouvement. Ces atomes, ces ions, sont absolument indépendants d’une volonté supérieure dans un ciel inexistant.

« L’athéisme moderne se présente, dit le Grand Larousse, avec une originalité, une profondeur, une puissance logique, un génie que les âges antérieurs n’ont pas connus. Ce n’est plus une sorte d’anomalie dans le développement historique, mais le terme d’une lente évolution de l’humanité, évolution théologique, évolution scientifique, Il se pose hardiment comme l’affranchissement suprême de l’esprit, l’expression la plus haute de la dignité et par là même, de la conscience humaine. Il nous montre la science écartant les hypothèses qui ne sont pas susceptibles de vérification, substituant les lois aux causes, les propriétés aux forces ; la logique renversant la méthode qui déduisait le monde physique et le monde moral d’un Dieu antérieurement défini, n’acceptant d’autre critère que l’accord de la raison et de l’expérience, la morale dorénavant instituée, indépendante de toute institution divine, relevant des lois inhérentes à la nature humaine, non de la volonté, du bon plaisir d’un roi du ciel. »

Dans la Grande Encyclopédie, M. Marion, qui pourtant n’est pas tendre. pour le mot athée, écrit :

« On comprend que le vulgaire, qui a sa conception très arrêtée et très étroite de la divinité et qui n’en admet pas d’autre, qualifie d’athéisme toute doctrine tant soit peu différente de l’ordinaire anthropomorphisme, de la croyance courante à un Dieu personnel, intervenant sans cesse, dans les choses humaines. n est surtout ridicule de reprocher aux savants d’être athées - la science comme telle est athée par nature, en ce qu’elle a pour objet unique d’étudier le comment des choses,  leur mécanisme, la liaison nécessaire des causes et des effets, sans s’embarrasser des questions d’origine première et de fin. Si Laplace a répondu à quelqu’un qui s’étonnait de ne pas trouver le nom de Dieu dans sa mécanique céleste : "Je n’ai pas besoin de cette hypothèse", ce n’est là que  l’expression toute simple d’un état d’esprit naturel aux savants en tant que savants, c’est à dire en tant qu’observateurs des conséquences. Les philosophes eux-mêmes, depuis Descartes et surtout depuis Kant, ont été de plus en plus unanimes à admettre que rien dans le monde ne se fait que selon des lois immuables résultant de la nature des choses ; de sorte que c’est presque tout philosophe digne de ce nom qui devra être qualifié d’athée, à prendre pour juge l’opinion vulgaire qui entend par Dieu une puissance indépendante de toute loi, capable d’intervenir à tout instant dans la marche de l’univers. Pas un métaphysicien, si respectueux soit-il de la croyance populaire, qui n’en cherche une
interprétation plus profonde, inconciliable avec la science. »

Le philosophe français qui signe du pseudonyme "Vallée du Mont-Ari"  (Lettres sur la Vie vue avec le simple bon sens) dit :

« À mes yeux, la croyance en Dieu-Idée a une telle influence sur l’état social que je ne puis me dispenser de revenir sur ce Rien, cette Nullité, ce Non-être, ce Néant, cet Impossible, ce Dieu de toutes les religions qui, sous les noms de Brahmah, Javeh, Jehovah, Elohim, etc., de par les résultantes qu’il a déterminées depuis que les hommes ignorants ou astucieux l’ont créé, est  l’Immoralité même.

Comment ne pas voir que c’est cette erreur qui, par le fanatisme, maintient les états d’êtres inférieurs actuels ? C’est vraiment commode, un Dieu pour certains individus dont la conscience et la réflexion ont été annihilées par cette croyance... Toute leur existence se passe à commettre les pires méfaits, les
malhonnêtetés les plus criantes... et quand ils sentent que la tombe va s’ouvrir, ils adressent un acte de contrition à cette Hideur qui avait permis leurs crimes et elle leur ouvre toutes grandes les portes de son "Paradis" où ils jouiront éternellement du plus grand bien-être, après avoir joui pendant toute leur vie terrestre au détriment d’autrui. Tandis que certain pauvre diable qui aura vécu chichement,
péniblement, souffreteusement, douloureusement, et honnêtement pendant toute sa vie en servant humblement les riches exploiteurs, ira en enfer si, contraint par la misère, il est surpris volant quelque denrée alimentaire ou quelques sous chez un de ses exploiteurs qui le tuera simplement avant qu’il ait eu le temps de manifester son repentir à Dieu... 0 stupidité !
C’est cette insanité repoussante qui fait dire à ses représentants autocrates et omniscients que la guerre est nécessaire et qu’elle donne la victoire aux armées qui la servent... C’est la croyance en cette Fiction qui est cause de tout le mal que nous pouvons constater par l’obscurité intellectuelle et la stagnation mentale dans lesquelles sa crainte maintient l’humanité... »

Cette page virulente n’est qu’un exposé de l’objection que les philosophes opposent au dogme de l’existence d’un Dieu tout puissant et tout sage : l’existence du mal physique et moral. On ne comprend vraiment pas comment des êtres raisonnables peuvent avaler les boniments des prêtres de toutes les religions ; et pourtant l’immense majorité des hommes se soumettent benoîtement à ce que les représentants de la superstition religieuse leur commandent.

Vallée du Mont-Ari dit encore : « Il existe des êtres ayant des prétentions d’être à l’avant-garde des idées et considérant comme inutile le temps passé à combattre l’idée de Dieu. On peut se demander comment un homme sensé peut douter de la nécessité et de l’efficacité du combat de l’homme  conscient contre la croyance en l’existence de Dieu. Il faut vraiment qu’il n’ait jamais pris la peine de
réfléchir sur l’importance de cette question, ou qu’il ne puisse pas en voir toute l’importance... le sort de l’humanité y est intimement lié.

L’athée... croit à la possibilité d’une justice sans Dieu ; justice dont les plateaux de la balance n’auront plus à subir les influences actuelles ignobles de cette monstruosité. »

Athéisme Part 2



Bradlaugh, le grand orateur anglais, qui avait excité tant de haines et s’était exposé à tant de poursuites par ses discours athées fut expulsé de la Chambre des Communes parce qu’il avait déclaré, lors des élections, que le nom de Dieu n’avait aucune signification pour lui. Etant l’idole de la population ouvrière de Northampton, il fut réélu après chaque annulation et il réussit à faire abolir le
serment obligatoire en Angleterre.

Bradlaugh a écrit que l’athéisme conscient donne plus de possibilités pour le bonheur humain que tout système basé sur le théisme et que la vie des vrais athées est plus vertueuse parce que plus humaine que celle des croyants à une divinité ; l’humanité des dévots étant souvent neutralisée par la foi avec laquelle cette humanité est nécessairement constamment en conflit.

« L’athéisme bien compris n’est pas une simple incrédulité, une froide et aride négation ; c’est au contraire une fertile affirmation de toute vérité prouvée, il comprend l’assertion positive de l’action de l’humanité la plus élevée. » (A Plea for Atheism.)

L’athée ne dit pas : « II n’y a pas de dieu, car il est impossible de prouver une négation. Il dit : Je ne sais pas ce que vous voulez dire par Dieu, je n’ai aucune idée de Dieu ; le mot Dieu, pour moi, est un son qui ne me fournit aucune affirmation claire ou distincte. Je ne nie pas Dieu parce que je ne puis nier ce dont je n’ai aucune conception et dont la conception chez ceux qui croient en Dieu est si
imparfaite, qu’ils sont incapables de me la définir. Si pourtant on veut définir Dieu comme une existence autre que l’existence dont je fais partie, j’affirme qu’un tel Dieu est impossible. »

La difficulté initiale dans toute polémique religieuse, c’est en effet de définir le mot Dieu. Il est également impossible d’affirmer ou de nier toute proposition à moins qu’il y ait chez l’affirmateur ou le négateur un accord sur la signification de chaque mot de la proposition. Je trouve, dit Bradlaugh, ce mot fréquemment employé par des personnes instruites qui se sont fait une réputation dans diverses
branches des sciences, plutôt pour déguiser leur ignorance que pour expliquer ce qu’elles savent. Diverses sectes de théistes attribuent à ce mot des significations, mais souvent ces significations se contredisent elles-mêmes. Chez les Juifs monothéistes, chez les chrétiens trinitaires, chez les  soniciens ou unitaires, chez les anciens polythéistes, chez les calvinistes, le mot Dieu, dans chaque cas, exprime une idée absolument irréconciliable avec les idées des autres sectes.

Lorsque les croyants cherchent à s’entendre sur une signification, ils n’arrivent à rien. Lorsque le théiste affirme que Dieu est un être différent, séparé de l’univers matériel, quand il orne cet être hypothétique de nombreux attributs : omniscience, omnipotence, omniprésence, immuabilité, immortalité, parfaite bonté, l’athée peut répondre : « Je nie l’existence d’un tel être parce que cette définition théiste est contradictoire en elle-même et contraire à l’expérience journalière. »

L’un des plus remarquables poètes et critique du XIXè siècle en Angleterre, Matthew Arnold, fils du grand éducateur et pasteur qui a rendu fameuse l’école de Rugby, écrit dans son célèbre ouvrage Littérature et Dogmatisme : 

« Examinons le terme suprême dont est remplie la religion, le terme Dieu. L’ambiguïté dans l’usage de ce mot est à la racine de toutes nos difficultés religieuses. On s’en sert comme si c’était une idée parfaitement définie et certaine dont nous pourrions extraire des propositions et tirer des conclusions. Par exemple, j’ouvre un livre et je lis : Nos sentiments de la morale nous disent telle et telle chose
et notre sentiment de Dieu d’un autre côté nous dit telle chose. Or, la morale représente pour tout le monde une idée définie et certaine, l’idée de conduite humaine réglée d’une certaine manière. Ici le mot Dieu est employé avec le mot morale comme si le premier représentait une idée aussi définie que le second. Mais le mot Dieu est le plus souvent employé dans un sens pas du tout scientifique ni
précis : mais comme un terme de poésie, un terme jeté à un objet pas du tout clair pour l’orateur - un terme littéraire - et l’humanité le prend dans des sens différents selon que diffère la conscience psychologique. »

« Dieu est le nom que depuis le commencement des temps jusqu’à nos jours les hommes ont donné à leur ignorance (Max Nordau, Morale et Évolution de l’Homme). » Si l’on parle à l’athée d’un Dieu créateur, il répond que la conception d’une création est impossible. Il nous est impossible de nous représenter en pensée que rien puisse devenir quelque chose ou que quelque chose puisse devenir rien.

Les mots création et destruction dénotent un changement de phénomène, ils ne dénotent ni origine ni cessation de la substance. Le théiste qui parle de Dieu créant l’univers doit supposer ou bien que ce
Dieu l’a tiré de soi-même ou bien qu’il l’a produit de rien. Mais le théiste ne peut regarder l’univers comme une évolution de la déité, parce que cela identifierait l’univers et la déité, cela serait du panthéisme (du grec pan toute chose et théos dieu). Il n’y aurait pas de distinction de substance, pas de création. Le théiste ne peut non plus regarder l’univers comme créé de rien, puisque selon lui la déité est nécessairement éternelle et infinie. L’existence de dieu éternelle et infinie exclut la possibilité de la conception du vide qui doit être rempli par l’univers créé. Nul ne peut penser à un point de l’étendue ou de la durée et dire : Voici le point de séparation entre le créateur et la créature. Il est aussi impossible de concevoir un commencement absolu ou une fin absolue de l’existence.

L’athée affirme qu’il connaît les effets, que ceux-ci sont à la fois causes et effets, causes des effets qu’ils précèdent et effets des causes qui les précèdent. Donc pas de création, pas de créateur.


Aucun des croyants n’a une idée autre que celle d’un Dieu anthropomorphe (c’est à dire à forme humaine) ; chacun se représente un Dieu sous la forme d’un vieillard, assis sur un trône et planant dans les nuages. Raphaël et les peintres de la Renaissance l’ont peint sous la forme d’un vieillard à longue barbe, volant par les airs et vêtu d’une vaste robe. Dans les tableaux d’église, même par des peintres de génie, comme Michel Ange, on voit cette déité peinte en chair et en os, tantôt la tête ceinte d’une auréole, survivance du culte du soleil, tantôt formant le centre d’un triangle.

Dans mes voyages en Russie, j’ai souvent vu des paysans qui, avant de se découvrir en entrant dans une chambre, cherchaient l’image que les orthodoxes ont généralement dans un angle de leurs chambres et quand ils ne voyaient pas l’icône, demander « Gdié Bogh. » (Où est Dieu ?) Pour eux, ce morceau de bois peint placé dans un cadre doré, était bien Dieu, un portrait de Dieu.

L’évêque américain Brown, qui a été deux fois condamné par ses pairs pour hérésie, a écrit dans son livre « Christianism and Communism » : « Mon Dieu est une trinité dont la matière est le Père, la Force est le Fils, et la Loi le Saint Esprit » ; dans un autre endroit, il dit : « Dieu est la nature et les travailleurs. »

L.K. Washburn écrit : « Nous nous servons du mot Dieu et il n’y a pas deux personnes qui aient la même idée de ce que le mot Dieu signifie. » Dans le Truth-Seeker le même auteur dit : « II règne une notion assez nuageuse de la divinité, notion qu’il serait bien difficile d’exprimer en paroles. »

La bible nous parle de dieux (Elohim, pluriel de El, dieu sémite) créant la lumière avant le soleil, formant de ses mains d’abord un être hermaphrodite, homme et femme, puis, dans un second récit de la création, Yaveh (Dieu d’une tribu du SinaÏ) formant un être isolé et, pendant son sommeil, lui arrachant une côte pour en fabriquer une femme. Il plante des arbres exprès pour faire succomber ses
créatures. De son ciel, il ne voit pas ce qui se passe dans le jardin d’Eden et descend pour s’y promener et surveiller la conduite des deux époux, il leur coud des vêtements. Dieu se fait voir à Moïse face à face, une autre fois, il ne se montre que de dos. Dieu, de son doigt, grave les commandements sur la pierre, ailleurs, il lutte toute une nuit avec Jacob sur les rives du Jabbok, il est vaincu par l’homme : Dieu est donc un être matériel.

Athéisme Part 1



Le mot athéisme est formé de deux mots grecs : (a), particule négative et du substantif (theos) dieu. L’athéisme est la théorie de ceux qui ne reconnaissent pas l’existence d’un dieu quelconque, d’un être supérieur à la nature humaine, d’une intelligence réglant les mouvements de l’univers et intervenant dans les affaires des hommes.

Le contraire d’athéisme est théisme, dont une des formes est le déisme. Un anarchiste, qui ne veut pas de maître tout puissant sur la terre, pas de gouvernement autoritaire, doit nécessairement repousser l’idée d’un maître omnipotent auquel tout doit être soumis ; il doit, s’il est conscient, se déclarer athée, dans le sens ordinaire, mais cela ne suffit pas pour se rendre compte des difficultés que ce mot a de tout temps soulevées et pour comprendre l’idée qu’on semble avoir adoptée.

L’athéisme a excité la haine, le mépris de ceux qui n’en ont compris ni la philosophie, ni la morale, ni l’histoire. Nous allons, pour commencer, citer quelques appréciations d’auteurs connus.

— « L’athéisme est une opinion dénaturée et monstrueuse, difficile à établir dans l’esprit humain, quelque déréglé qu’il puisse être. » (Montaigne.)

— « Il n’y a d’athéisme que dans la froideur, l’égoïsme, la bassesse. » (Madame de Staël.)

— « Si l’athéisme ne fait pas verser le sang des hommes, c’est moins pour l’amour de la paix que par indifférence pour le bien. » (J.-J. Rousseau.)

— « Une preuve que l’athéisme n’est pas enraciné dans les coeurs, c’est la démangeaison de le répandre ; quand on ne se méfie pas de ses opinions on n’a pas besoin de leur chercher des appuis et des défenseurs : on veut convaincre les autres afin de se persuader soi-même. » (A. Bacon.)

Toutes ces phrases de philosophes sont bien creuses ; on peut, en quelque mots, en détruire l’effet. Nous espérons démontrer, dans cet article, que toutes les objurgations jetées à la face des athées sont absolument sans fondement.

Voyez plutôt la phrase du célèbre philosophe anglais, auteur du Novum Organum. Quel parti ne cherche pas à faire des prosélytes ? N’ont-ils pas tous des journaux, des livres pour défendre leurs idées ? Les chrétiens ne sont-ils pas les premiers à prêcher dans leurs églises, à envoyer des missionnaires ? Faudrait-il donc croire que tous doutent des dogmes qu’ils enseignent ? Pourtant, nous savons qu’il y a des chrétiens, ou simplement des théistes, bien convaincus des dogmes
qu’ils cherchent à répandre.

« L’athéisme, a dit Bossuet, appauvrit l’humanité et lui ôte les plus grands biens : Dieu, l’âme, l’immortalité. »

A cela nous pouvons répondre que l’existence d’aucun de ces biens n’a été prouvée scientifiquement et que tout esprit libre peut légitimement douter de cette existence ou même la nier. Toutes les sectes religieuses prétendent que l’athéisme conduit au mal, que les athées sont nécessairement des hommes vicieux qui ont adopté les idées athées comme défi à la divinité justement offensée par leur vie
scandaleuse.

Nous ne voulons pas nous arrêter ici pour demander la définition des mots vertu, vice, dont les acceptions varient avec chaque individu, chaque pays, chaque époque, chaque profession.

Les croyants affirment que parmi les causes directes de l’athéisme, on trouve le défaut d’éducation, les sociétés perverses, une vie licencieuse. Or, toute personne qui s’est donné la peine d’étudier sans parti pris reconnaît que les athées sont peut être les gens les plus vertueux, les plus honorables, les plus dévoués à l’humanité.
Qui pourrait être comparé aux frères Reclus, ces modèles de tout ce qu’il y a de bon, quoique nettement anarchistes et athées ! Quelles nobles figures que celles de Kropotkine, de Bakounine, de Tchernychevsky, de Myskhine, de Shelley, de Carlyle, de Holcroft, d’Owen, de William Morris qui tous ont lutté pour l’athéisme et la liberté ! Et en France, n’a-t-on pas vu des hommes comme Sylvain Maréchal, Lalande, Laplace, Helvétius, Berthelot, tous des modèles de vertu et de science ?

Nous verrons dans la suite de cette étude que depuis les plus anciens temps, depuis Confucius, Lao-Tsée, depuis Gautama Cakya-mouni, dit le Bouddha, depuis les anciens philosophes grecs jusqu’à nos jours, les athées, les agnostiques qui, pour moi, sont des athées puisqu’ils n’affirment pas l’existence d’un dieu quelconque loin d’être des dévergondés ou de malhonnêtes gens ont été des modèles de tout ce qu’il y a de louable.

Les statistiques des prisons, des pénitenciers des États-Unis prouvent que ces établissements sont remplis d’hommes pieux, élevés dans des milieux religieux, ayant conservé toute leur vie leurs idées théistes, tandis que les athées, quoique nombreux dans la population, sont pour ainsi dire inconnus parmi les pensionnaires de l’État. S’il s’y trouve des personnes athées, ce sont des hommes qui ont été condamnés comme politiciens, avocats d’idées anarchistes, ou pour des discours nettement blasphématoires, chose qu’interdisent les lois de plusieurs États américains et même la législation anglaise. Il suffit encore à présent de nier Dieu dans des discours publics pour que les juges théistes condamnent un orateur à plusieurs mois de détention, ce qui est arrivé, il n’y a pas longtemps, au
propagandiste Gott qui a été condamné à plusieurs mois de prison pour avoir distribué des brochures athées, bien que son nom signifiât Dieu ; ce pauvre homme
est mort en prison.

Arrêtons le jeu hypocrite

Nous sommes des lâches!

Pourquoi?

Parce que nous ne renversons pas la table, nous ne nous révoltons plus devant les mensonges auxquels nous ne croyons plus, si un jour on y a cru.

Nous devrions être dans la rue pour récupérer tout ce que l'on a perdu à cause de notre feignatise, de notre lâcheté, de notre confort...

Nous ne faisons que geindre, larmoyer et espérer en 1 sauveur. Celui là plutôt qu'un autre. Et celui ci nous n'avons jamais essayé.

Nous sommes de bien tristes et dangereuses chimistes car pour continuer à pouvoir geindre et larmoyer, nous sommes prêt à toutes les alchimies.

Jusqu'à la dernière...Jusqu'à ce que l'on ne puisse pas revenir en arrière.

Le peuple devrait être dans la rue. Le peuple, dans sa globalité, dans sa diversité...

Salariés, fonctionnaires, précaires, chômeurs, étudiants, collégiens, stagiaires, tous, dans la rue, pour gagner.

Mais pour gagner, il faut se donner les moyens. Il faut se réunir. Il faut se rencontrer, se parler.

Mais où? dans la rue aux mains de la Bac, raciste et violente?
Dans la maison des syndicats? Qu'est ce qu'un syndicat?

Comment peut-on encore rester sans bouger lorsqu'on entend que l'on va baisser les charges?

Les charges sont des cotisations sociales. Il faut le redire à chaque fois. Mais qui le dit? Les journaleux aux ordres des milliardaires libéraux???
Les hommes politiques? C'est à dire des gens qui ont fait de la politique leur profession et comme tout salarié, ils sont prêts à tout pour conserver un siège.

40 ans que l'on entend le même discours. L'emploi? Toujours rien. Personne n'y gagne, sauf les patrons qui se gavent de cet argent qu'ils ne réinvestissent pas.

Moins de code de travail? Mais on ne cesse de le rogner mais rien ne change non plus. Jusqu'où? Jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de code. Voilà, plus de règles. La jungle.

Ce code écrit avec le sang de nos camarades, morts à cause du travail. C'est à dire qu'à chaque morceau que l'on enlève, on crache sur un mort.

Et puis, la peur des prud'hommes?  Je ris. La loi condamne et demande des réintégrations. Le patron paie une amende ridicule et il ne réintègre pas...

Mais on casse les prud'hommes, on casse les inspecteurs du travail...

Et nous, on ne bouge pas...On geint, on se tord de douleurs...Mais on regarde Hanouna, la chiasse intellectuelle.

Il ne faut plus parler, on ne doit plus être immobile.

On doit se battre intellectuellement mais aussi physiquement.

On licencie des militants pour une chemise arrachée?
Un politique détourne de l'argent, il a une peine dérisoire et en plus il a du sursis.
Un homme vole pour manger, il a plus et du ferme en plus.

De toute façon, il est question de foutre en taule celui qui conteste. Alors, pourquoi hésiter?

Nous ne devons pas condamner les blacks blocs et ceux que vous appelez les "casseurs" parce que les journalistes vous ont dit de les appeler "casseurs".

Ils ont compris que, de toute façon, on va en arriver là.

Ne jouons plus leur jeu, jouons le nôtre et redevenons des hommes et des femmes debout et fiers de l'être.


lundi 5 juin 2017

Noir et Rouge Anthologie



Anthologie

Par conséquent , nous considérons l'anarchisme comme un idéal profondément humain, dépassant les intérêts d'une classe quelconque, étant donné qu'il nous conduit vers une société sans classe.

Mais constatant qu'à la base de la société actuelle se trouvent deux facteurs : économique et celui du pouvoir , nous sommes amenés à souligner la réalité de la structure de classes. Certaines de ces classes doivent être considérées comme défenseurs de la société actuelle, les autres comme ces ennemies conscientes ou inconscientes , menant la lutte contre le capitalisme , l'état ou la religion comme causes et conséquences de la division en classes de l'oppression et de l'inégalité, lutte dirigée contre cette société en tant que telle et par conséquent contre les classes qui a soutiennent, lutte menée principalement par les exploités et les opprimés, engagées par intérêt vital dans cette lutte et la révolution.

Nous considérons donc que le caractère de classe est un des éléments fondamentaux de l'anarchisme dans la lutte jusqu'à et pendant la révolution.
Nous tenons à donner une brève explication sur notre conception des classes :

-Les classes sont l'expression des rapports de forces économiques dans la société actuelle ; d'un côté ceux qui possèdent les biens, les crédits, les moyens de production, les transports et d'échanges , les capitalistes , les exploiteurs directs ou indirects ; de l'autre ceux qui n'ont que leurs forces physiques ou intellectuelles à vendre pour vivre – les exploités directs et indirects. Mais une classe, même sur un plan économique , n'est ni contrastée ni compacte, c'est à dire son intégralité varie selon la situation économique et sociale du moment, et selon les passages des éléments d'une classe à l'autre. Les intérêts des différentes couches d'une même classe peuvent ne pas être identiques dans certains cas et peuvent être même opposés. Sur ce fait est est basée la pratique de la collaboration de classes ( social-démocratie et tous les réformismes de gauche ). Mais ce fait prouve également l'erreur du syndicalisme étroit , de l'ouvriérisme. Le seul facteur économique , malgré son importance primordiale, n'est pas capable ni suffisant pour réveiller la conscience et la solidarité de classe pour écarter le danger d'une nouvelle dictature , pour fixer les buts de la révolution et de la société nouvelle.

-La classe, par ailleurs, est l'expression du pouvoir, autre caractéristique fondamentale de la société actuelle – c'est à dire de gouvernants et des gouvernés, des oppresseurs et des oppressés. Mais le pouvoir et l'état, en tant que tels, sont capables, d'autre part , d'engendrer des classes nouvelles, par la création des institutions de l'état, d'un appareil bureaucratique, des responsabilités, des privilèges, des avantages économiques, de la technocratie. 

Invariance N 0

Il s'agit d'un document datant des années 1970, sans doute. Il analyse les tendances diverses du communisme. On peut, en ôtant ce dogme de "communisme" tant haï car détourné par une dictature d'état que le monde capitaliste a montré du doigt pour dénoncer cette idéologie dont ils ont une peur incommensurable; passer outre et réfléchir à comment faire pour garder une idée vivante et non statique de la révolution.

Comment ne pas rester figé sur un moment précis et faire évoluer les structures afin de rester au plus près du moment présent ?

N'est-il donc pas de fait la remise en cause de ces "professionnels politiques ou syndicaux" qui passent leur temps dans des instances et de discuter de situations avec lesquelles ils n'ont plus de contact?

Et puis, ce phénomène d'immobilisme dans les instances et dans les formes, ne rendent-ils pas depuis longtemps les "syndicats" comme des instances contre-révolutionnaires et en conséquence des freins à tous progrès sociaux?

Ces syndicats qui n'existeraient plus si la révolution sociale était en place. En conséquence, n'y-a-t-il pas là une part de schizophrénie chez les syndicats qui œuvreraient à leur propre disparition? Chez beaucoup de salariés, les syndicats sont là pour freiner leur "part révolutionnaire" qu'ils ont en eux. Sous le prétexte d'"être constructifs", ils bordent "les incivilités" pour rentrer dans un ordre qui ne fait rien évoluer.

Nous sommes de plain pied dans la question du réformisme.

A partir de quel moment sommes nous réformistes?

Lorsque nous voyons un collègue exploser de rage, que doit être l'attitude du syndicaliste? De le raisonner pour le conduire dans une confrontation "normée" avec la direction, donc à terme sans réel poids.
Ou d'être à ses côtés pour que sa colère reste en éveil et pourquoi pas faire partager cette révolte à tous afin de déplacer les lignes de la confrontation sur un terrain instable pour le patronat?

Examinons la gêne de Monsieur Mélenchon devant les salariés qui ont piégé leur usine. Leur a-t-il accordé un soutien sans faille? Il a compris leur désarroi, bien sûr, mais quels auraient été les commentaires de la presse bourgeoise si il avait crié bien haut son soutien et qu'il était d'accord avec eux.

 "oui, ils ont eu raison. Cette foutaise de dialogue social nous a amené à cette extrémité. Et bientôt ce sera vraiment pire. Car de la menace nous passerons aux actes."

J'ai toujours dit: la peur doit changer de camp.

Et cette casse du code de travail, une nouvelle fois, de l'inversion des normes, va nous pousser à nous poser la question fondamentale:

quand allons-nous arrêter de participer hypocritement à tout ce mensonge?

Ne vaudrait-il pas mieux que ces syndicats disparaissent pour laisser la place à d'autres formes plus vivantes et moins figés?

Se mettre dans un syndicat avec la volonté de faire évoluer la société dans le bon sens, car, gardons à l'esprit que la charte d'Amiens, constitutive des syndicats, parlent bien de changer le système de société, est ce le bon choix ou sommes nous le complice de ce système que nous voulons mettre à bas?

 Est-on encore dans les syndicats dans cet optique là?

Vivent-ils réellement cette Charte d'Amiens, ou n'est ce qu'un vœu pieu vidé de toute sa substance?

Pour progresser dans le bons sens, nous devons prendre à bras le corps les questions et surtout, ne pas avoir des réponses possibles.

Et pour conclure, nous le savons tous, car nous en reculons l'échéance jusqu'à l'extrême limite du supportable, quand est-ce que l'irrémédiable va-t-il arriver?

Nous le savons tous: ils ne veulent rien lâcher donc il faudra leur prendre de force. Nous le savons. La seule chose que nous ne connaissons pas encore c'est en quelle année cela va-t-il arriver?

"« De même qu'un petit parti radical ne peut faire une révolution, de même ne pas plus la faire un grand parti de masse ou une coalition de partis divers. Elle jaillit spontanément des masses , les actions décidées par un parti révolutionnaire peuvent parfois donner l'impulsion (toutefois cela arrive rarement) mais les forces décisives se trouvent ailleurs, dans les facteurs psychiques, au fond du subconscient des masses et au fond des grands événements de la politique mondiale. La tâche d'un parti révolutionnaire consiste à répandre à l'avance des notions claires de façon que, partout dans la masse, des éléments qui sachent ce qu'ils doivent faire dans de tels moments , et sachent juger par eux-mêmes de la situation. Et pendant la révolution , le parti doit arrêter les programmes, les solutions, les directives qui soient reconnus justes par la masse agissant spontanément parce qu’elle y retrouve en forme parfaite ses propres objectifs et s'élève vers eux par une plus grande clarté ; c'est ainsi que le parti devient un guide dans la lutte. Tant que les masses restent amorphes il peut sembler qu'un tel travail soit inefficace ; mais, la clarté des principes agit intérieurement sur de nombreuses personnes qui se tiennent d'abord éloignées de la révolution et montre sa force active en leur donnant une directive sûre. Si au contraire on cherche à former un grand parti en édulcorant les principes , en faisant des coalitions et des concessions, on donne la possibilité , lorsque survient la révolution, à des éléments douteux d'acquérir de l'influence sans que les masses puissent s'apercevoir de leur insuffisance. L'adaptation aux vues traditionnelles est un essai d'acquérir le pouvoir sans qu'en soit vérifiée la condition préalable, le bouleversement des idées. Cela agit donc dans le sens de retenir les cours de la révolution . De plus, c'est une illusion, car les masses, quand elles se mettent en révolution, ne peuvent que saisir les idées les plus radicales ; au contraire, tant que la révolution tarde, elles ne saisissent que les idées modérées. Une révolution est, en même temps, une période de bouleversement profond des idées des masses ; elle crée les conditions d'une tel bouleversement et est à son tour conditionnée, et c'est pour cela, par la force des principes clairs de bouleversement du monde entier, que la direction de la révolution revient au parti communiste ».

« Aucune minorité résolue ne peut résoudre les problèmes qui ne peuvent l'être que par l'activité de la classe toute entière , et lorsque la population laisse s'accomplir avec une indifférence apparente une telle prise de pouvoir , elle n'est pas en fait une masse réellement passive , mais, dans la mesure où elle n'est pas acquise au communisme, elle est capable à tout instant de retourner contre la révolution , en tant que suite active de la réaction. Même une « coalition avec le gibet tout de suite après » ne serait qu'un palliatif insuffisant pour une telle dictature de parti. Si le prolétariat par un soulèvement violent détruit le pouvoir bourgeois en banqueroute, et que son avant-garde la plus consciente, le parti communiste, assume la direction politique , il n'a alors qu'un devoir : mettre en œuvre tous les moyens pour extirper les causes de la faiblesse du prolétariat et en accroître les forces afin de la rendre apte au plus haut degré aux luttes révolutionnaires de l'avenir. Il faut alors pousser les masses à l'activité la plus grande, stimuler leurs initiatives, renforcer en leur confiance en elle-même, afin qu'elle se rendent compte par elles-mêmes des tâches qui leur reviennent, car c'est seulement ainsi qu'elles pourront s'en acquitter. Pour atteindre un tel objectif, il est nécessaire de briser la prépondérance des formes traditionnelles d'organisation et des vieux chefs – et donc en aucun cas former avec eux une coalition gouvernementale, qui ne peut qu'affaiblir le prolétariat- il est nécessaire de construire les formes nouvelles, de renforcer les défenses matérielles des masses, c'est ainsi seulement qu'il sera possible de donner une nouvelle organisation à la production , de défendre véritablement la révolution contre les assauts du capitalisme venant de l'extérieur , et ceci est la première condition pour empêcher la contre-révolution ».

« La puissance que la bourgeoisie possède encore à l'heure actuelle est constituée par la servitude spirituelle et l'absence d'indépendance du prolétariat. Le développement de la révolution correspond au processus d'auto-libération du prolétariat d'une telle dépendance et de la tradition des temps passés, et ceci n'est possible que par le moyen de leur propre expérience dans la lutte. Là où le capitalisme est déjà ancien et là où la lutte du prolétariat contre lui dure déjà depuis quelques générations, le prolétariat dut créer à chaque période , les méthodes, les formes et les instruments de lutte qui fussent à chaque fois adaptés au degré précis de l'évolution du capitalisme ; mais ces méthodes, forme et instruments, bien vite, ne furent plus considérés dans leur réalité de nécessités limitées dans le temps ; mais au contraire furent sur-évalués comme des formes éternelles , absolument bonnes, divisées idéologiquement, et devinrent donc plus tard des obstacles à l'évolution qu'il est nécessaire de briser. Tandis la classe est enchaînée dans un bouleversement , dans une évolution toujours plus rapide, les chefs s'arrêtent à un stade déterminé, en représentant qu'une phase déterminée, et leur influence importante peut entraver le mouvement, les formes d'action sont élevés au rang de dogmes, et les organisations deviennent des fins en elles-mêmes, ce qui rend difficile une orientation nouvelle et l'adaptation à de nouvelles conditions de lutte. Ceci vaut aussi pour maintenant, chaque phase évolutive de la lutte de classe doit dépasser la tradition des phases précédentes afin de pouvoir reconnaître clairement ses objectifs propres et les atteindre ; seulement, à l'heure présente , l'évolution progresse à un rythme bien plus accéléré. C'est ainsi que la révolution se développe dans le processus de la lutte interne. Au sein du prolétariat lui-même croissent les résistances qu'il doit surmonter. En les surmontant, le prolétariat surmonte sa propre limitation et croît vers le communisme ».