Vous
avez dit trahison ?
Le
débauchage auquel Sarkozy se livre, depuis son élection (il a même
commencé avant, le bougre), dans les rangs de la «gauche» et
notamment du PS a conduit les principaux leaders de ce dernier à
traiter leurs anciens camarades de traîtres et de renégats. Mais
qui ont-ils ou qu’ont-ils trahi exactement ?
Généralement
l’ampleur d’une trahison se mesure à la surprise qu’elle crée
et au gain qu’en retire le traître. Or, si l’événement a fait
la une de médias qui ne se nourrissent plus que de l’écume du
fleuve de l’histoire et qui font mousser n’importe quelle tempête
dans un bénitier, il faut avouer qu’il n’a pas été une
surprise pour tous ceux qui ont suivi de près l’évolution de tous
ces personnages depuis des lustres. Et quant à la portée de
l’événement, la médiocrité de sinécures offertes aux uns et
aux autres en donne l’exacte proportion. Si les «traîtres» n’ont
pas retiré grand bénéfice de leur allégeance à celui qu’il
feignait de combattre la veille encore, c’est aussi que l’opération
ne leur a pas coûté grand-chose non plus. Depuis que la gauche à
vocation gouvernementale, PS en tête, s’est mise à dériver à
droite et à rivaliser avec cette dernière, au gré des alternances
et des cohabitions successives, dans l’art et la manière
d’administrer au peuple l’amère potion néolibérale, la
distance qui l’en sépare s’est de plus en plus réduite, pour
finir par avoisiner l’épaisseur d’une feuille de papier
hygiénique de médiocre qualité. Et l’on pourra en juger dès
demain, en voyant les soi-disant traîtres continuer à faire au
service de la vraie droite ce qu’ils faisaient déjà dans les
rangs de la fausse gauche. Par exemple, un Bockel continuer à
prêcher des homélies démocrates-chrétiennes au regard desquelles
le néolibéralisme social d’un Jospin, d’un Schröder ou d’un
Blair en ferait presque les dignes héritiers de la bande à Bonnot.
En somme, si trahison il y a eu, elle ne date pas d’hier et n’a
pas été le fait des seules brebis galeuses que le berger
‘hollandais’ et sa ‘royal’ bergère stigmatisent aujourd’hui.
C’est une trahison collective de l’ensemble de la gauche
gouvernementale, remontant aux années Mitterrand, qui, de
compromissions honteuses en renoncements tapageurs, a ouvert la voie
aux médiocres opérations de débauchage auxquelles nous venons
d’assister. Lesquelles en préfigurent sans doute d’autres dans
les semaines et mois à venir, notamment à l’approche des
élections municipales. La seule chose qui ait été trahie, c’est
l’apparence que la gauche gouvernementale soit encore autre chose
qu’une seconde droite; apparence qui n’était plus qu’un secret
de Polichinelle que la rue de Solferino avait de plus en plus de mal
à garder. En somme, les «camarades socialistes» ou
apparentés récemment ralliés à l’étendard sarkozyste ne sont
que les sous-produits en fin de vie d’une entreprise politique
elle-même en fin de course. Car il en est de la vie politique comme
de l’industrie: on n’y recycle en définitive que les déchets.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire