En
toute immodestie
Depuis
le temps que vous nous fréquentez, vous avez fini par nous
connaître. Vous savez qu’il n’est pas dans nos habitudes de nous
jeter des fleurs et de péter plus haut que notre cul. Sans avoir été
élevés par les curés et les bonnes soeurs, nous avons tout demême
de l’éducation ! Mais cette fois-ci, on n’y résistera pas :
devant la déconfiture des marchés financiers, des banquiers, des
entrepreneurs et de leurs idéologues patentés, dont la crise a fait
éclater les baudruches verbales qui leur tenaient lieu d’analyses
en même temps qu’elle fait dégringoler les Bourses qu’ils
voyaientmonter au ciel, on ne peut s’empêcher de souligner que
nous soutenons depuis vingt ans(1) la thèse que, non seulement les
politiques néolibérales font le malheur de l’humanité, mais
qu’elles vont entraîner tout le monde, y compris le capital
lui-même, vers la catastrophe. Et cela pendant que des cohortes de
journalistes, d’universitaires, d’hommes politiques et d’hommes
d’affaires chantaient les vertus du capitalisme libéralisé et
mondialisé. Avec quelques petits groupes, nous avons été parmi les
rares qui n’ont jamais cru aux balivernes débitées par les
moulins à prière du capital. Contre marées mondialistes et vents
néolibéraux, nous avons maintenu notre conviction que ce monde
finira par s’écrouler comme un château de cartes. Le rappel de la
validité de notre analyse est d’autant plus nécessaire que la
cohorte des faillis idéologiques susmentionnés continue à tenir le
haut du pavé médiatique et à nous faire la leçon. N’entend-on
pas cette basse-cour roucouler aujourd’hui «Rerégulons,
rerégulons !» comme elle a caqueté des années durant
«Dérégulons, dérégulons !», avec le même psittacisme
dans la forme et la même stupidité sur le fond. L’art de
psalmodier de concert est décidément le seul dans lequel excelle ce
genre de volatiles. Nous autres, les minoritaires si souvent raillés
et déconsidérés – archéomarxistes, attardés du XIXe siècle -
nous nous félicitons aujourd’hui de ce que, étant tombés tout
petits, à l’âge où l’on s’éveille à la politique, dans la
potion magique du Capital, nous avons compris une fois pour
toutes que le capitalisme reste aujourd’hui ce qu’il était hier
et ce qu’il sera demain s’il réchappe de sa crise actuelle: un
mode de production fondamentalement contradictoire et donc instable,
dans lequel l’accumulation des forces productives de la société
ne peut venir que buter inexorablement sur les limites que lui impose
la propriété privée des moyens de production; et qu’aucune
innovation technique, aucune ‘nouvelle frontière’, aucune
sophistication financière ne pourront jamais le délivrer de cette
contradiction. Les circonstances présentes nous autorisent à jouer
les immodestes et à nous amuser un instant des inquiétudes et des
contorsions idéologiques ridicules de nos adversaires de classe. Ils
sont déstabilisés; c’est plaisant. Mais ils pourraient se
rétablir si le prolétariat ne songe pas à les bousculer un peu
plus; ça, ce serait moins réjouissant.
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