samedi 21 juillet 2018

Journal de la Commune



ALLEMAGNE
Dans la séance de samedi, au parlement allemand, M. de Bismarck, au sujet des projets de loi relatifs à l’étranger, a fait une déclaration assez grave. Il a dit que l’empereur était résolu à s’abstenir encore de toute immixtion dans les affaires de la France, mais que cette résolution ne pouvait être maintenue que jusqu’à une certaine limite : les intérêts de l’Allemagne ne devaient pas être compromis par une abstention trop prolongée, surtout si les préliminaires de paix
étaient mis en question.
Le chancelier ne pouvait déterminer où commençait cette limite, mais il a ajouté que « si c’était nécessaire, l’épisode final de la guerre se serait mené à fin avec regret, mais avec la même énergie que jusqu’ici.
Le projet de loi relatif à l’annexion de l’Alsace et de la lorraine a été renvoyé à l’examen d’une commission spéciale.
Les délégués de la Chambre de commerce de Strasbourg ont été prévenus, que lorsque le moment sera venu de régler les indemnités en faveur des habitants de l’Allemagne qui ont éprouvé des dommages par suite de guerre, le gouvernement proposera au Conseil fédéral et au Reichstag de comprendre l’Alsace et la Lorraine dans cette répartition.
De sorte que la ruine et les désastres causés par les troupes allemandes à Strasbourg, etc…, seront payés par l’argent de France.
Nous extrayons les passages suivants d’une lettre qui nous est adressée par un Polonais du grand-duché de Posen :
« Enfin, voici nos pauvres Français qui partent, et nous en sommes bien heureux, car ils ont beaucoup souffert. Vous ne croiriez pas que, par des froids rigoureux de cet hiver, ils étaient parqués aux environs de nos villes dans de mauvaises baraques, aux troncs mal joints, et quelquefois sous la tente ! et cela sans couvertures et presque sans vêtements. Il en est mort beaucoup de froid et de privations.
« C’est sans doute à cause de l’amitié des Polonais pour la nation française que les pauvres soldats ont été plus maltraités ici qu’ailleurs, et qu’on ne les a point logés chez l’habitant, bien que nous les demandassions journellement. On les éloignait de nous à coups de crosse de fusil si nous voulions leur parler, et on ne nous permettait de leur donner aucune marque de sympathie. « Leur état inspira une telle pitié que l’on essaya de l’améliorer en créant une société de secours sous le protectorat du consulat britannique, et qui eut à sa tête des dames anglaises. L’autorité prussienne fit donner ordre de dissoudre la société, et elle ne permit jamais que l’on distribuât les quelques dons qu’elle avait déjà amassés.
L’Avenir de Berlin croit savoir qu’il est de nouveau question de grandes fêtes pour un couronnement impérial. On évoquait des vieilles annales de l’empire germanique les traditions relatives à ces sortes de solennités, et l’on ressusciterait, pour l’empereur Guillaume, les splendeurs des Habsbourg. Chaque souverain ou prince régnant de l’Allemagne serait tenu d’apporter son contingent d’hommages et de vassalité. La Bavière se chargerait de fournir un casque d’or avec couronne en diamants ; la Saxe, le glaive impérial avec garde en or et les noms des batailles gravés
sur la lame ; le Wurtemberg, l’écusson impérial ; le bâton du commandement impérial ; le Mecklembourg, le légendaire boeuf impérial, que le duc de Cobourg, en qualité de truchoess, écuyer tranchant, aurait l’honneur d’abattre. Quant aux frais de tout cela, ils seront faits par les contribuables. L’Avenir se demande où, dans cette affaire, finit le comique et commence le sérieux. Il se déclare hors d’état de le préciser.

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