Les
délégués de la société l’éducation nouvelle ont été
reçus hier par les membres de la Commune, auxquels ils ont remis une
requête conçue en ces termes :
À
la Commune de Paris.
Considérant
la nécessité qu’il y a, sous une république, à préparer la
jeunesse au gouvernement d’elle-même par une éducation qui est
toute à créer ; Considérant que la question de l’éducation,
laquelle n’est exclusive d’aucune autre, est la question mère,
qui embrase et domine toutes les questions politiques et sociales, et
sans la solution de laquelle il ne sera jamais fait de réformes
sérieuses et durables ; Considérant que les maisons d’instruction
et d’éducation entretenues par la commune, ou par le département
ou par l’Etat, doivent être ouvertes aux enfants de tous les
membres de la collectivité, quelles que soient les croyances intimes
de chacun d’eux ; Les soussignés délégués de la société
l’Education nouvelle, demandent d’urgence, au nom de la
liberté de conscience, au nom de la justice : Que l’instruction
religieuse ou dogmatique soit laissée tout entière à l’initiative
et à la direction libre des familles, et qu’elle soit
immédiatement et radicalement supprimée, pour les deux sexes, dans
toutes les écoles, dans tous les établissements dont les frais sont
payés par l’impôt ; Que ces maisons d’instruction et
d’éducation ne contiennent aux places exposées aux regards des
élèves ou du public aucun objet de culte, aucune image religieuse
Qu’il n’y soit enseigné ou pratiqué, en commun, ni prières, ni
dogmes, ni rien de ce qui est réservé à la conscience individuelle
; Qu’on n’y emploie exclusivement que la méthode expérimentale
ou scientifique, celle qui part toujours de l’observation des
faits, quelle qu’en soit la nature, physiques, moraux,
intellectuels ; Que toutes les questions du domaine religieux soient
complètement supprimées dans tous les examens publics, et
principalement dans les examens pour brevets de capacité ; Qu’enfin,
les corporations enseignantes ne puissent plus exister que comme
établissements
privés ou libres.
La
qualité de l’enseignement étant déterminée tout d’abord par
l’instruction rationnelle, intégrale, qui deviendra le meilleur
apprentissage possible de la vie privée, de la vie professionnelle
et de la vie politique ou sociale, la société l’Education
nouvelle émet en outre le voeu que l’instruction soit
considérée comme un service public de premier ordre ; qu’en
conséquence, elle soit gratuite et complète pour tous les enfants
des deux sexes, à la seule condition du concours pour les
spécialités professionnelles.
Enfin,
elle demande que l’instruction soit obligatoire, en ce sens qu’elle
devienne un droit à la portée de tout enfant, quelle que soit sa
position sociale, et un devoir pour les parents ou pour les tuteurs,
ou pour la société.
Au
nom de la société l’Education nouvelle, les délégués nommés
dans la séance du 26 mars 1871, à l’Ecole Turgot :
Henriette
GAROSTE, rue Saint-Paul, 43 ; — Louise LAFITTE, rue Saint-Paul, 43
; J. MANIER, rue du Faubourg-Saint-Martin, 148 bis ; — RHEIMS, rue
d’Hauteville, 33 ; — Maria VERDURE, rue sainte-Marie-du-Temple,
8.
Il
a été répondu aux délégués que la Commune était complètement
favorable à une réforme radicale de l’éducation dans le sens
qu’ils indiquaient ; qu’elle comprenait l’importance capitale
de cette réforme, et qu’elle considérait la présente démarche
comme un encouragement à entrer dans la voie où elle était résolue
à marcher.
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