L'Organisation
« Ici,
les limites entre nous et les autres deviennent floues, pour un
succès immédiat on accepte la démagogie, la lutte politique, les
élections, tout. Pour gagner quelques militants, on est prêt à
abandonner non seulement notre nom mais aussi notre physionomie
idéologique, le fédéralisme est vite remplacé par un centralisme
dynamique. Ou bien, l'expérience néfaste d'une organisation
pareille pousse d'autres camarades à nier toute organisation
anarchiste l'identifiant à un parti. Et on tourne en rond. »
Bakounine :
« «...
Il n'y a qu'un doute que si nous ne formulions pas nettement le
caractère réel de nos principes, le nombre de nos adhérents
pourrait devenir vite considérable, nous pourrions dans ce cas
accepter dans nos rangs, comme on nous le propose, des militaires et
des prêtres, et pourquoi pas des policiers. Mais comme on dit : qui
trop embrasse mal étreint, nous achèterons ces adhérents au prix
de notre suicide idéologique et nous deviendrons les pires des
plaisantins dans la masse des phraseurs et des hypocrites qui
empoisonnent maintenant l'opinion publique en Europe. De l'autre
côté, il est évident que si nous proclamons à haute voix nos
principes, le nombre de nos membres sera très limité. Mais enfin de
compte, ce sont des adhérents sincères sur qui nous pouvons
sûrement compter, et notre travail de propagande, un travail
sérieux, sincère, éducatif, pourra assainir moralement notre
public... Les erreurs de St Simon et Fourrier se résument ainsi :
- Ils ont cru sincèrement que par une propagande pacifiste et par la
force de leurs convictions, ils arriveraient à convaincre les riches
à un tel degré que les riches eux-mêmes donneraient le superflu de
leurs richesses.
Ils
ont imaginé qu'on pourrait théoriquement construire a-priori le
paradis social dans lequel l'humanité se calmera pour l'éternité.
Ils n'ont pas compris que, malgré qu'il est pour nous possible de
prévoir les grands principes du futur développement de l’humanité,
la réalisation pratique de ces principes devra au moins être
réservée à l'expérience future... »
(Fédéralisme,
Socialisme et antithéologisme, Bakounine, Tome 3 p. 123 - 138 du
texte russe)
Maria
Korn « Pain et volonté »
«
En ce qui concerne les moyens, ils changent, bien entendu, d'après
les conditions, les besoins de l'époque. Par exemple, dans un pays
les anarchistes peuvent avoir comme tâche principale une lutte de
partisans, dans un autre le travail dans les syndicats, dans un
troisième la propagande théorique. Mais tous ces moyens d'activité
ne se contredisent pas, au contraire. Il faut qu'ils se complètent
entre eux. L'absence de programme-minimum (lequel est souvent source
de déviation), et l'accord complet en ce qui concerne les buts -
tout cela fait l'unité, une unité que ne pourrait faire aucune
mesure artificielle... »
Majorité
et Minorité
« Le
principe de la majorité vient de la pratique de la lutte politique,
du suffrage universel, du parlementarisme. Là, il est nécessaire,
plus, il est l'unique facteur indispensable à la bonne marche du
système. La lutte pour la majorité n'a jamais été et ne pourra
jamais être franche et honnête. Pour gagner des voix, personne ne
dévoile son vrai visage, les mécanismes de son jeu ni les vrais
buts qu'il poursuit. Les appels les plus révolutionnaires ne sont
que de simples propositions, vagues et susceptibles de rallier un
vaste spectre d'individus ; les sermons les plus solennels ne sont
que les cris des démagogues qui essaient de toucher les sentiments
bas de la foule, soit égoïste, soit faussement humanitaire. Cette
vaste mascarade des beaux parleurs est bien orchestrée dans les
coulisses par les jeux d'intimidation, de menaces économiques et
autres, ainsi que des promesses et des avantages. »
« Il
existe aussi un dernier facteur lié à l'organisation : les
camarades qui entrent dans cette organisation doivent accepter
librement sa nécessité et son rôle. C'est l'évidence même. Celui
qui n'a pas dépassé un stade individuel strict, qui ne peut
imaginer d'autres structures sociales que celles des individus isolés
et dispersés, fera mieux de rester isolé, d'aider les autres quand
il le veut, mais de ne pas encombrer la vie de l'organisation par ses
pratiques individuelles et intransigeantes. Pour cette catégorie de
camarades, souvent d'ailleurs très bon camarades, il faut trouver
une autre nomenclature et les accepter tels qu'ils sont.
« Une
organisation vraiment démocratique se reconnaît d'après sa
conduite envers sa propre opposition. C'est encore plus valable pour
une organisation libertaire qui prétend préparer la société de
demain. Chaque fois qu'une majorité discute et applique les limites
imaginées par la majorité elle-même dans lesquelles l'opposition
doit exercer son activité, on peut en trouver deux causes : ou
l'admission des membres étaient très large, ou il existe, dans
cette même organisation, des individus qui veulent jouer le rôle de
dirigeants. Ces deux possibilités ne s'excluent pas l'une l'autre :
tel ou tel membre qui veut s'emparer de l'organisation y fera rentrer
de nouveaux membres pour augmenter les chances de sa propre
majorité ».
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