samedi 30 septembre 2017

Commune de Paris Séance du 24 avril 1871 (2)



JOHANNARD. Il y aura certainement beaucoup de victimes. Le public se pressait, croyant à l’armistice. Il y avait une quantité de voitures de déménagement. Je le répète, les victimes seront nombreuses; jamais il n’est tant tombé d’obus.

URBAIN demande la lecture du rapport de la Commission de justice.

ARNAUD. Je n’ai que deux mots à dire. J’ai des nouvelles de province; 1,500 programmes de la Commune ont été distribués à Lyon; j’ai des nouvelles de ce matin. L’agitation règne dans cette ville; des groupes nombreux se forment; les élections communales vont avoir lieu dans deux ou trois jours. Le mouvement paraît bien accentué, il est de bon augure. Les nouvelles sont sûres, je le répète.

RÉGÈRE donne les mêmes nouvelles au sujet de Bordeaux.

ARNAUD. J’ajouterai que l’artillerie de la Garde nationale était allée au fort de la Vitriolerie pour faire la manœuvre, elle n’a pu entrer, on a tourné contre elle deux mitrailleuses. Ces faits vous montrent dans quelles dispositions d’esprit se trouve la Garde nationale.

VERMOREL. Nous avons nommé il y a huit jours une Commission chargée de publier les papiers des hommes du Quatre-Septembre. On n’a rien fait. Je demande que la Commune adjoigne trois membres de la Commune à cette Commission. Le citoyen Fortuné, qui connaît des documents sur les marchés scandaleux faits par M. Ferry et autres, devrait faire partie de cette Commission.

RIGAULT. Je demande aussi à en faire partie.

La proposition Vermorel est adoptée.

Les citoyens VERMOREL, RIGAULT, FORTUNÉ, font partie de la Commission.

AMOUROUX. Je demande à adresser une interpellation sur la manière dont l’armistice est exécuté. Je viens de Neuilly, et jamais on ne s’est battu d’une manière aussi violente qu’on le fait actuellement.

LEFRANÇAIS. J’avais demandé la parole pour faire la même observation.

JOHANNARD. Il y aura certainement beaucoup de victimes. Le public se pressait, croyant à l’armistice. Il y avait une quantité de voitures de déménagement. Je le répète, les victimes seront nombreuses; jamais il n’est tant tombé d’obus.

MALON. Citoyens, vous savez que le bombardement s’étend de plus en plus. À Clichy, à Levallois, il y a des victimes tous les jours.
Citoyens, nous avons tous les jours, aux différentes mairies, une foule de gens, qui viennent nous demander des logements. Nous ne pouvons satisfaire à toutes ces demandes. Je crois qu’il faudrait un décret d’urgence, autorisant les mairies à réquisitionner les logements inhabités pour les mettre à la disposition des nécessiteux. Les municipalités se trouvent très embarrassées; elles ne peuvent faire ce qu’elles désireraient pour le bien de tous; il faut donc leur donner formellement l’autorisation indispensable pour qu’elles puissent procéder comme je l’indique. Je demande donc un décret d’urgence. Ainsi, pour moi, comme adjoint de mairie, j’ai dû, pendant le Siège, loger dans des hôtels une foule de réfugiés. Depuis, je suis assailli de réclamations incessantes. On m’accuse de violation de domicile, etc., etc. Je le répète, cette position est intolérable; il faut absolument un décret d’urgence. (Approbations.)

TRINQUET. J’ai déposé, il y a trois jours, une proposition relative aux maisons abandonnées; j’en demande la lecture.

LE PRÉSIDENT. Voici le texte du projet de décret présenté par le citoyen Malon:
«La Commune de Paris,
«Considérant qu’il est indispensable de fournir le logement aux victimes du second bombardement de Paris, et considérant qu’il y a urgence,
«Décrète:
«Art. 1er. Réquisition est faite de tous les appartements abandonnés depuis le 18 mars.
«Art. 2. Les logements seront mis à la disposition des habitants des quartiers bombardés au fur et à mesure des demandes.
«Art. 3. La prise en possession devra être précédée d’un état des lieux, dont copie sera délivrée aux représentants des possesseurs en fuite.
«Art. 4. Les municipalités sont chargées de l’exécution immédiate du présent décret. Elles devront, en outre, dans la mesure du possible, faciliter les moyens de déménagement des citoyens qui en feront la demande.»

ARNOULD. Il y a une lacune dans la proposition Malon. Le citoyen Malon demande la réquisition des logements de tous ceux qui ont quitté Paris depuis le 18 mars; il faut réquisitionner tous les logements vacants quels qu’ils soient. (Appuyé.)

LE PRÉSIDENT. Le citoyen Amouroux propose un amendement qui n’a pas trait directement au projet Malon, mais qui peut s’y rattacher. En voici le texte: «Chaque arrondissement sera tenu…»

UN MEMBRE. C’est là une question de réglementation et non pas de décret.

MALON. Je crois, en effet, qu’il n’est pas possible d’obliger les municipalités à fournir chacune un nombre de 50 voitures; les unes le pourront, et ce sera impossible pour d’autres. Qu’on les invite seulement à faire ce qu’elles pourront. Aujourd’hui, à Batignolles, nous avons plus de 50 voitures toutes prêtes, mais, je le répète, beaucoup de mairies ne pourront en faire autant.

AMOUROUX. Ma proposition est plutôt une invitation urgente à faire aux municipalités; qu’un amendement; elle n’aurait d’effet que pour l’armistice.

BABICK. On parle d’armistice ici. Je ne sache pas cependant que la Commune ait voté un armistice.

LE PRÉSIDENT. Si tout le monde parle ici, nous ne ferons rien de sérieux.
(À suivre.)





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