V.
CLÉMENT. J’ai passé la nuit à la Cour martiale et j’ai vu, là
d’abord, la partialité avec laquelle le citoyen Rossel procédait,
et je l’accuse ici formellement de partialité. Il a une façon
théâtrale de présider: il prononce des discours politiques qui
n’ont rien à voir dans les jugements qu’il a à rendre. De plus,
je l’ai entendu dire ceci à un accusé : «Il y a là des rapports
qui vous feront condamner, je l’espère.»
BRUNEL.
Je viens réclamer auprès de vous, citoyens, au nom du 105e
bataillon, qu’un jugement du Conseil de guerre vient de frapper, en
entier, injustement. Tout le bataillon ne peut être atteint; qu’on
frappe seulement les coupables. Le 105e bataillon est peut-être le
plus patriotique des bataillons du 7e arrondissement, et je demande
la cassation du jugement qui l’atteint.
GÉRARDIN. Je m’étonne d’une mesure aussi sommaire, prise contre tout un bataillon; que l’on ne frappe que ceux qui ne veulent pas marcher!
RANVIER. Il y a une chose qui doit frapper tout le monde. On dirait qu’il y a un parti-pris de désorganisation. Prononcer de tels jugements, c’est démoraliser la Garde nationale.
V. CLÉMENT. J’ai passé la nuit à la Cour martiale et j’ai vu, là d’abord, la partialité avec laquelle le citoyen Rossel procédait, et je l’accuse ici formellement de partialité. Il a une façon théâtrale de présider: il prononce des discours politiques qui n’ont rien à voir dans les jugements qu’il a à rendre. De plus, je l’ai entendu dire ceci à un accusé : «Il y a là des rapports qui vous feront condamner, je l’espère.» (Murmures.)
V. CLÉMEMT. J’ai entendu aussi dire à des gardes nationaux, sortant de la séance: «Eh! bien, nous nous ferons fusiller s’il le faut; mais nous ne marcherons pas pour des républicains qui prononcent de tels jugements.»
PARISEL. Je crois qu’il est nécessaire, si l’on peut, que l’on révise le jugement qui a été prononcé. On pourrait baser la révision de ce jugement sur ce fait qu’il y a des relations de famille entre l’ancien chef de bataillon et son successeur. Je demande donc qu’il y ait une révision, si c’est possible. Le citoyen Protot nous dira bien s’il y a un moyen de réviser le jugement, qui a été prononcé à propos du 105e bataillon.
SICART appuie la proposition du citoyen Parisel.
VERMOREL croit que les actes de la Cour martiale sont frappés de nullité. I1 faut d’abord vider les questions pendantes.
LE PRÉSIDENT. Formulez une proposition.
VERMOREL. Oui, oui! je la formulerai avec vous, mais d’abord je dis ceci: Il est bien admis que la Cour martiale a fonctionné d’une façon impolitique. La.Commune révise et ne revient pas sur ses décisions. Quand la Guerre nous a demandé la formation de cours martiales, nous n’avons pas refusé et nous entendions que la cour fonctionnerait régulièrement, avec cinq ou six membres. J’ai une lettre de Rossel qui confirme ceci; l’on constate que dans l’affaire du commandant Girod, il y a des secrets. Aujourd’hui, en présence des résultats impolitiques obtenus, il ne faut pas craindre de casser cette Cour. Je prétends que les jugements de la Cour martiale ont manqué de discernement; je crois que l’assemblée doit statuer sur cette opinion, par un décret qui frappera les jugements de la Cour de révision. Il faut faire un décret, disant que la Cour a statué irrégulièrement; il sera bien vu de la population.
LE PRÉSIDENT lit la proposition Clémence.
CLUSERET. Vous avez accepté ma proposition de la formation d’une Cour martiale, et aujourd’hui vous voulez aller contre; il me serait impossible alors d’accepter la responsabilité de la direction militaire. Si vous voulez placer la question politique au-dessus de la question militaire, vous le pouvez; mais je déclinerai, je le répète, toute responsabilité des conséquences qui en résulteront. Il faut des mesures exceptionnelles de répression, parce que des bataillons lâchent pied devant l’ennemi; ce ne sont pas les hommes qui lâchent, ce sont les officiers qui les commandent. Il est bien entendu que tous les officiers ne sont pas mauvais, mais les cas sont nombreux où les officiers n’ont pas su tenir devant l’ennemi.
MIOT. On fatigue les bataillons aux bastions.
CLUSERET. Il faut une répression sévère contre les lâches, et c’est pour cela que vous avez adopté la création d’une Cour martiale. Je dis que, quand des bataillons ont lâché pied, ce sont toujours les officiers qui ont donné le signal. Si vous placez toujours la question de personnes au-dessus de la question militaire, c’est-à-dire le courage en face de l’ennemi, il faut alors que vous en preniez la responsabilité. Maintenant, je répondrai à deux faits qu’on m’a reprochés. Pour le citoyen Garanti, il a été arrêté dans les circonstances suivantes: une instruction était en train de se faire sur le 105e balaillon. Dans le cours de cette instruction, on a découvert que Garanti était impliqué dans l’affaire; on a arrêté le citoyen Garanti. J’ai donné l’ordre de le mettre en lierté, sur la proposition des membres de la Commune, qui s’offraient en caution pour lui. Le citoyen Faltot a été arrêté pour une disparition de chevaux. Lorsque j’ai pris possession du ministère de la Guerre, j’ai fait appeler au ministère le citoyen Faltot. Il m’a déclaré 800 chevaux au fort de Vincennes. Depuis, le citoyen Faltot ne m’a plus accusé que le nombre 450; il y a là une différence que je ne m’explique pas, d’autant plus que j’ai moi-même donné l’ordre de faire rentrer tous les chevaux. D’un autre côté, il m’arrivait chaque jour des renseignements, constatant que des chevaux, appartenant à l’État, se trouvaient entre les mains des paysans. Dans ces conditions, j’avais résolu de faire arrêter le citoyen Faltot. Maintenant, j’ai fait arrêter Faltot père dans la circonstance que voici. Je me suis trouvé par hasard à la rencontre du citoyen Faltot, au moment où Faltot fils menaçait violemment mon chef d’état-major et ce, en présence de quarante personnes. J’ai donné l’ordre d’arrêter immédiatement Faltot fils. Le père a pris fait et cause pour le fils, qui se mettait ainsi en révolte contre la discipline, et a déclaré qu’on n’arrêterait pas le fils sans arrêter le père. J’ai fait arrêter le père et le fils et je crois que c’était mon devoir, plus peut-être que mon droit. On les a emmenés à la prison du Cherche-Midi, où ils doivent être, et j’ai donné l’ordre d’instruire immédiatement l’affaire de Faltot père sur la seule question de la disparition des chevaux.
JOURDE. Vous voyez le peu de méthode qui règne dans cette assemblée. ll y avait une commission d’enquête au sujet des reproches que nous devions adresser à Cluseret. Une foule d’incidents sont venus nous distraire de la question, et nous, n’avons encore rien fait Je demande que nous revenions à l’ordre du jour.
MEILLET. Je demande la parole pour une motion d’ordre. Je demande que l’on revienne à l’incident de la Cour martiale.
PLUSIEURS VOIX. Mais cela viendra à la suite.
LE PRÉSIDENT. La parole est au rapporteur de la Commission.
AVRIAL, rapporteur. Citoyens, notre rapport se résume plutôt en questions que nous avons à adresser au citoyen Cluseret. On se plaint de ce que la Garde nationale n’est pas organisée, que personne ne la commande; à chaque instant, arrivent des ordres et contre-ordres; elle ne sait pas à qui elle doit obéir. On se plaint de ce qu’elle n’a ni capotes, ni souliers, ni pantalons, qu’on la laisse pendant quinze jours dans les tranchées, où on la nourrit exclusivement de viandes salées qui amènent la maladie.
CLUSERET. Pardon! Si vous me posez toutes les questions à la fois, je ne pourrai y répondre.
LE PRÉSIDENT. Je vais les inscrire.
AVRIAL. Je demanderai à Cluseret s’il connaît le nombre exact des forces militaires dont il peut disposer.
GÉRARDIN. Je m’étonne d’une mesure aussi sommaire, prise contre tout un bataillon; que l’on ne frappe que ceux qui ne veulent pas marcher!
RANVIER. Il y a une chose qui doit frapper tout le monde. On dirait qu’il y a un parti-pris de désorganisation. Prononcer de tels jugements, c’est démoraliser la Garde nationale.
V. CLÉMENT. J’ai passé la nuit à la Cour martiale et j’ai vu, là d’abord, la partialité avec laquelle le citoyen Rossel procédait, et je l’accuse ici formellement de partialité. Il a une façon théâtrale de présider: il prononce des discours politiques qui n’ont rien à voir dans les jugements qu’il a à rendre. De plus, je l’ai entendu dire ceci à un accusé : «Il y a là des rapports qui vous feront condamner, je l’espère.» (Murmures.)
V. CLÉMEMT. J’ai entendu aussi dire à des gardes nationaux, sortant de la séance: «Eh! bien, nous nous ferons fusiller s’il le faut; mais nous ne marcherons pas pour des républicains qui prononcent de tels jugements.»
PARISEL. Je crois qu’il est nécessaire, si l’on peut, que l’on révise le jugement qui a été prononcé. On pourrait baser la révision de ce jugement sur ce fait qu’il y a des relations de famille entre l’ancien chef de bataillon et son successeur. Je demande donc qu’il y ait une révision, si c’est possible. Le citoyen Protot nous dira bien s’il y a un moyen de réviser le jugement, qui a été prononcé à propos du 105e bataillon.
SICART appuie la proposition du citoyen Parisel.
VERMOREL croit que les actes de la Cour martiale sont frappés de nullité. I1 faut d’abord vider les questions pendantes.
LE PRÉSIDENT. Formulez une proposition.
VERMOREL. Oui, oui! je la formulerai avec vous, mais d’abord je dis ceci: Il est bien admis que la Cour martiale a fonctionné d’une façon impolitique. La.Commune révise et ne revient pas sur ses décisions. Quand la Guerre nous a demandé la formation de cours martiales, nous n’avons pas refusé et nous entendions que la cour fonctionnerait régulièrement, avec cinq ou six membres. J’ai une lettre de Rossel qui confirme ceci; l’on constate que dans l’affaire du commandant Girod, il y a des secrets. Aujourd’hui, en présence des résultats impolitiques obtenus, il ne faut pas craindre de casser cette Cour. Je prétends que les jugements de la Cour martiale ont manqué de discernement; je crois que l’assemblée doit statuer sur cette opinion, par un décret qui frappera les jugements de la Cour de révision. Il faut faire un décret, disant que la Cour a statué irrégulièrement; il sera bien vu de la population.
LE PRÉSIDENT lit la proposition Clémence.
CLUSERET. Vous avez accepté ma proposition de la formation d’une Cour martiale, et aujourd’hui vous voulez aller contre; il me serait impossible alors d’accepter la responsabilité de la direction militaire. Si vous voulez placer la question politique au-dessus de la question militaire, vous le pouvez; mais je déclinerai, je le répète, toute responsabilité des conséquences qui en résulteront. Il faut des mesures exceptionnelles de répression, parce que des bataillons lâchent pied devant l’ennemi; ce ne sont pas les hommes qui lâchent, ce sont les officiers qui les commandent. Il est bien entendu que tous les officiers ne sont pas mauvais, mais les cas sont nombreux où les officiers n’ont pas su tenir devant l’ennemi.
MIOT. On fatigue les bataillons aux bastions.
CLUSERET. Il faut une répression sévère contre les lâches, et c’est pour cela que vous avez adopté la création d’une Cour martiale. Je dis que, quand des bataillons ont lâché pied, ce sont toujours les officiers qui ont donné le signal. Si vous placez toujours la question de personnes au-dessus de la question militaire, c’est-à-dire le courage en face de l’ennemi, il faut alors que vous en preniez la responsabilité. Maintenant, je répondrai à deux faits qu’on m’a reprochés. Pour le citoyen Garanti, il a été arrêté dans les circonstances suivantes: une instruction était en train de se faire sur le 105e balaillon. Dans le cours de cette instruction, on a découvert que Garanti était impliqué dans l’affaire; on a arrêté le citoyen Garanti. J’ai donné l’ordre de le mettre en lierté, sur la proposition des membres de la Commune, qui s’offraient en caution pour lui. Le citoyen Faltot a été arrêté pour une disparition de chevaux. Lorsque j’ai pris possession du ministère de la Guerre, j’ai fait appeler au ministère le citoyen Faltot. Il m’a déclaré 800 chevaux au fort de Vincennes. Depuis, le citoyen Faltot ne m’a plus accusé que le nombre 450; il y a là une différence que je ne m’explique pas, d’autant plus que j’ai moi-même donné l’ordre de faire rentrer tous les chevaux. D’un autre côté, il m’arrivait chaque jour des renseignements, constatant que des chevaux, appartenant à l’État, se trouvaient entre les mains des paysans. Dans ces conditions, j’avais résolu de faire arrêter le citoyen Faltot. Maintenant, j’ai fait arrêter Faltot père dans la circonstance que voici. Je me suis trouvé par hasard à la rencontre du citoyen Faltot, au moment où Faltot fils menaçait violemment mon chef d’état-major et ce, en présence de quarante personnes. J’ai donné l’ordre d’arrêter immédiatement Faltot fils. Le père a pris fait et cause pour le fils, qui se mettait ainsi en révolte contre la discipline, et a déclaré qu’on n’arrêterait pas le fils sans arrêter le père. J’ai fait arrêter le père et le fils et je crois que c’était mon devoir, plus peut-être que mon droit. On les a emmenés à la prison du Cherche-Midi, où ils doivent être, et j’ai donné l’ordre d’instruire immédiatement l’affaire de Faltot père sur la seule question de la disparition des chevaux.
JOURDE. Vous voyez le peu de méthode qui règne dans cette assemblée. ll y avait une commission d’enquête au sujet des reproches que nous devions adresser à Cluseret. Une foule d’incidents sont venus nous distraire de la question, et nous, n’avons encore rien fait Je demande que nous revenions à l’ordre du jour.
MEILLET. Je demande la parole pour une motion d’ordre. Je demande que l’on revienne à l’incident de la Cour martiale.
PLUSIEURS VOIX. Mais cela viendra à la suite.
LE PRÉSIDENT. La parole est au rapporteur de la Commission.
AVRIAL, rapporteur. Citoyens, notre rapport se résume plutôt en questions que nous avons à adresser au citoyen Cluseret. On se plaint de ce que la Garde nationale n’est pas organisée, que personne ne la commande; à chaque instant, arrivent des ordres et contre-ordres; elle ne sait pas à qui elle doit obéir. On se plaint de ce qu’elle n’a ni capotes, ni souliers, ni pantalons, qu’on la laisse pendant quinze jours dans les tranchées, où on la nourrit exclusivement de viandes salées qui amènent la maladie.
CLUSERET. Pardon! Si vous me posez toutes les questions à la fois, je ne pourrai y répondre.
LE PRÉSIDENT. Je vais les inscrire.
AVRIAL. Je demanderai à Cluseret s’il connaît le nombre exact des forces militaires dont il peut disposer.
(À
suivre.)
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