vendredi 8 septembre 2017

Commune de Paris Séance nuit du 30 mars 1871



des menées réactionnaires, qui se trament dans Paris…

La séance, qui avait été fixée à neuf heures, est ouverte seulement à dix. Beaucoup de membres sont absents.
Le citoyen JOURDE annonce que toutes les sommes perçues à Paris par les différents services sont expédiées sur Versailles.
Si l’on hésite à prendre des mesures radicales, demain les services seront désorganisés. Il est important d’enlever, ce soir même, la caisse de la boulangerie.
Les citoyens MORTIER et BILLIORAY sont chargés d’aller enlever cette caisse.
Le citoyen OUDET, ayant annoncé que l’octroi, des Halles centrales, réuni ce soir dans un café, avait été, d’après un ordre, entouré par le Comité Central, le citoyen JOURDE fait remarquer combien il est fâcheux qu’un membre, sans décision de la Commune, prenne sur lui de donner de tels ordres; les agents de l’octroi se sont ralliés à la Commune, et ils étaient réunis, pour prendre, d’accord avec elle, les mesures commandées par les circonstances.
Le citoyen PROTOT reconnaît qu’un membre seul ne doit pas donner des ordres. Mais où sont les membres de la Commission militaire? Les membres absents sont coupables. Dans de tels moments, il n’est pas permis de s’absenter.
Le citoyen VALLÈS demande que les noms des membres absents soient inscrits à l’Officiel.
Le citoyen LEROY donne sa démission, « la Commune, prétend-il, outrepassant son pouvoir».
Le citoyen GOUPIL dit avoir la preuve que le citoyen LEROY connaissait, en acceptant son mandat, les attributions de la Commune.

Le citoyen BERGERET rend compte de la mission dont il avait été chargé, et déclare qu’il s’est emparé du ministère de la Marine, de l’hôtel de la Paix; quant à l’Assistance publique, il croit ses ordres exécutés également.

Les citoyens PARlSEL, PROTOT, RÉGÈRE, CHAMPY et GOUPIL signalent successivement des menées réactionnaires, qui se trament dans Paris, et demandent qu’il soit mis des forces suffisantes entre les mains du citoyen Bergeret, afin de les déjouer. Sur la demande des citoyens MALON et J. VALLÈS, la discussion de la réorganisation des municipalités est reprise.

Lecture est faite, une seconde fois, de la proposition Ostyn.

Le citoyen DEREURE propose le projet suivant :
« IL sera nommé, dans chaque arrondissement, un délégué qui s’adjoindra, lui-même, deux membres, lesquels prendront le nom d’officiers d’état civil et feront exécuter les décisions de la Commune.»
Le citoyen FRUNEAU se déclare partisan du projet du citoyen Dereure et repousse la nomination d’une Commission municipale.
Le citoyen LEFÈVRE demande surtout la liberté du suffrage universel.
Le citoyen MALON se range au projet du citoyen Dereure, mais demande qu’il soit ajouté le considérant suivant : «réservant la question du suffrage universel que nous respectons, agissons ainsi vu les circonstances exceptionnelles où nous sommes».

Le citoyen OSTYN, trouvant qu’il n’a été présenté aucune objection sérieuse contre son projet, déclare y persister (Incident).

Le citoyen CHALAIN dépose sur le bureau la proposition suivante:
« 1° La Commune de Paris nomme le citoyen Pindy commandant-gouverneur de l’Hôtel de Ville.
« 2° Le citoyen Assi est relevé de ces fonctions.»
L’Assemblée consultée déclare surseoir à cette proposition et passe à l’ordre du jour.
Demande est faite par le Comité central d’une somme de mille francs. Cette demande est renvoyée à la Commission exécutive qui alloue la somme.

On revient à la discussion des municipalités. Après un long débat auquel prennent part les citoyens VAILLANT, ARNOULD, URBAIN, DEMAY, VERMOREL, RÉGÈRE, FÉLIX PYAT, GOUPIL, ALLIX et LANGEVIN et dans lequel il est établi que des élections municipales,en ce moment, seraient dangereuses, qu’il ne faut pas de dualisme, que la Commune, du reste, a réellement le pouvoir municipal, le projet primitif est ainsi modifié:
« Art. 1° : Les membres de la Commune ont la direction administrative de leur arrondissement.
« Art. 2°: Ils sont autorisés à s’adjoindre, à leur choix et sous leur responsabilité, une commission pour l’expédition des affaires.
« Art. 3° : Les membres de la Commune ont seuls qualité pour procéder aux actes de l’état-civil.»

Proposition:
Le citoyen GOUPIL demande la nomination d’une commission de promulgation et d’insertion dans les journaux des décrets votés par la Commune.
L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition du citoyen Arthur Arnould.
Le citoyen VERMOREL demande la priorité pour la proposition suivante qu’il considère comme très urgente:
«La Commune délègue à la Justice le citoyen Protot pour l’expédition des affaires civiles et criminelles les plus urgentes et notamment pour garantir la liberté individuelle de tous les citoyens.»
Après avoir entendu les citoyens PARISEL, RÉGÈRE, JULES VALLÈS et PROTOT, l’Assemblée rejette la proposition.

Le ciloyen RANVIER propose que l’on désigne un signe quelconque qui servira à faire reconnaître les membres de la Commune.
L’urgence de cette proposition ayant été déclarée, elle est renvoyée à la Commission des services municipaux.

Le citoyen BESLAY rend compte de sa mission auprès de la Banque de France.

Le citoyen BILLIORAY, chargé d’enlever la caisse de la boulangerie, rend compte de sa mission.
Les caisses sont gardées par un poste de la Garde nationale.

Le citoyen ARNOULD soutient sa proposition, de rendre, aussitôt qu’il sera possible, les séances publiques et de donner chaque jour, un compte rendu analytique ou un procès-verbal des séances dans le Journal Officiel.
La discussion s’engage. Les citoyens RASTOUL et PARISEL sont partisans de la plus grande publicité. Le véritable ennemi de la Commune, à l’heure présente, c’est l’indifférence, c’est la terreur que cause l’exécution de certains actes mal compris.
Le citoyen CLÉMENT proteste contre toute publicité des séances, tant que la Commune ne sera pas absolument maîtresse de la situation. Une observation de VALLÈS fait abandonner la discussion. L’Assemblée n’est pas assez nombreuse pour trancher une aussi grave question.

Le président donne lecture de la proposition suivante:
«Le Comité central des vingt arrondissements de Paris déclare donner son adhésion pleine et entière aux trois décrets rendus, le 29 mars, par la Commune, relatifs:
«1° Aux loyers;
«2° À la conscription;
«3° Aux objets engagés au Mont de Piété.»

Lecture est également donnée de l’acte d’adhésion du Comité central d’artillerie de la Seine.
Le citoyen BESLAY demande qu’il soit décrété d’urgence la levée du séquestre apposé sur les caisses des compagnies d’assurance.

Les citoyens PROTOT et BILLIORAY appuient la motion et proposent le décret suivant :
«Les cinq compagnies d’assurances: la Nationale, l’Urbaine, le Phénix, la Générale et l’Union, sont autorisées à lever les scellés apposés sur leurs livres et caisses à la date du 29 courant.
La saisie pratiquée à la requête de la Commune est maintenue.»
La Commune consultée adopte à l’unanimité ce décret.
Le citoyen Chalain dépose sur le bureau la proposition suivante:
«Nous demandons que les barricades soient enlevées et les voies encombrées rendues à la circulation; nous pensons que cette mesure affirmera notre force et ramènera la confiance.»

Le projet de décret suivant est également déposé par le citoyen RASTOUL.
«Projet de décret:
«Tout individu appartenant à la Police, Gendarmerie, Garde municipale, du gouvernement de Versailles, qui sera pris sous un déguisement de soldat, garde-national, ou vêtu d’un costume autre que celui prescrit par le règlement du corps auquel il appartient, sera considéré comme espion et, après constatation d’identité, immédiatement fusillé.»

La Commune, n’étant plus en nombre, la discussion de ces projets est renvoyée à la séance du lendemain.
Le président lève la séance à une heure 1/4 du matin.


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