RÉGÈRE.
[…] Véritablement, ces démissions, que l’on nous propose à
chaque instant, ressemblent à un relâchement moral et presque à
une désertion. Je demande que l’on refuse les démissions.
LE
PRÉSIDENT. Citoyens, nous avons un grand nombre de communications à
vous faire.
MEILLET. Je demande la parole pour donner ma démission de questeur. Je ne puis être questeur et administrateur de mon arrondissement. Veuillez me donner un successeur et je vais faire cesser ce tapage qui vous importune depuis longtemps.
CHALAIN. D’après les ordres donnés par la Commission exécutive, je me suis rendu à l’imprimerie Dubuisson, où s’impriment les 4 journaux supprimés, qui ont reparu malgré le décret, avec ordre d’arrêter l’imprimeur si je le trouvais. Nous étions deux seulement, et après trois sommations on n’a pas ouvert. J’ai requis la force publique. Des gardes nationaux sont venus, et après six sommations, nous avons été obligés de faire enfoncer la porte. L’imprimeur n’était pas là, et nous avons trouvé seulement quatre femmes qui pleuraient. Ce ne sont pas là des missions agréables. Comme cela pourrait faire un peu de tapage, comme on pourrait nous accuser de violer le domicile, je tiens à faire constater les faits, afin que la Commune sache bien que c’est après des sommations réitérées que nous en sommes venus à cette extrémité et que je me suis présenté d’abord seul. J’ai intimé au représentant de l’imprimerie de n’avoir à publier aucun des journaux suspendus, l’Opinion nationale et le Soir étaient composés, j’ai fait briser les formes de ces journaux, et il ne paraîtra aujourd’hui à l’imprimerie Dubuisson que le journal la Commune, dont je n’avais pas à ordonner la suppression.
Le président lit les communications suivantes signées Briosne, Rogeard et Félix Pyat:
MEILLET. Je demande la parole pour donner ma démission de questeur. Je ne puis être questeur et administrateur de mon arrondissement. Veuillez me donner un successeur et je vais faire cesser ce tapage qui vous importune depuis longtemps.
CHALAIN. D’après les ordres donnés par la Commission exécutive, je me suis rendu à l’imprimerie Dubuisson, où s’impriment les 4 journaux supprimés, qui ont reparu malgré le décret, avec ordre d’arrêter l’imprimeur si je le trouvais. Nous étions deux seulement, et après trois sommations on n’a pas ouvert. J’ai requis la force publique. Des gardes nationaux sont venus, et après six sommations, nous avons été obligés de faire enfoncer la porte. L’imprimeur n’était pas là, et nous avons trouvé seulement quatre femmes qui pleuraient. Ce ne sont pas là des missions agréables. Comme cela pourrait faire un peu de tapage, comme on pourrait nous accuser de violer le domicile, je tiens à faire constater les faits, afin que la Commune sache bien que c’est après des sommations réitérées que nous en sommes venus à cette extrémité et que je me suis présenté d’abord seul. J’ai intimé au représentant de l’imprimerie de n’avoir à publier aucun des journaux suspendus, l’Opinion nationale et le Soir étaient composés, j’ai fait briser les formes de ces journaux, et il ne paraîtra aujourd’hui à l’imprimerie Dubuisson que le journal la Commune, dont je n’avais pas à ordonner la suppression.
Le président lit les communications suivantes signées Briosne, Rogeard et Félix Pyat:
«Au citoyen président de la Commune de Paris.
«Citoyen Président,
«La Commune vient de valider mon élection, sans tenir compte de l’insuffisance des votes acquis, qui sont au-dessous du huitième des électeurs inscrits.
«Le motif invoqué est la situation créée à l’arrondissement par le départ d’une partie de la population.
«Ce motif est juste; invoqué avant l’élection, il eût justifié une modification des conditions de la validité; invoqué après, il peut bien permettre à la Commune de m’accepter, mais cette décision ne peut pas faire que je sois élu, alors que véritablement je ne le suis pas.
«Malgré mon vif désir de siéger sur les bancs de la Commune, pour être l’égal de mes collègues, je suis obligé de n’y siéger qu’aux conditions qui les y ont fait admettre, c’est-à-dire d’être réellement élu par mes électeurs, conformément aux conditions imposées préalablement pour la validité de l’élection.
«Avant donc de me rendre à l’Hôtel de Ville, je me soumettrai, comme les candidats qui n’ont pas été validés, à une réélection aux conditions nouvelles qui auront été arrêtées.
« Salut et égalité.
«BRIOSNE,
«216, rue St-Maur».
«Au citoyen président de la Commune de Paris.
«Citoyen Président,
«La mesure qui modifie la loi de 1849, pour valider les élections du 16 avril, ayant à mes yeux au moins le double tort d’être tardive et rétroactive, j’ai l’honneur de vous informer que je n’accepte pas, en ce qui me concerne, la validation extra-légale résolue par la Commune et considère comme nulle et non avenue ma prétendue élection dans le sixième arrondissement.
«Salut et Fraternité,
«A. ROGEARD,
«43, rue Madame.
«Jeudi, 20 avril 1871».
«Paris, 20 avril 1871.
«Citoyen Président,
«Si je n’avais été retenu au Ministère de la guerre, le jour où la question des élections a été tranchée, j’aurais voté avec la minorité de la Commune.
«Je crois que la majorité cette fois s’est trompée.
«Je doute qu’elle veuille revenir sur son vote. Mais je crois que les élus n’ont pas le droit de remplacer les électeurs. Je crois que les mandataires ne doivent pas se substituer au souverain. Je crois que la Commune ne peut créer aucun de ses membres, ni les faire, ni les parfaire; qu’ainsi elle ne peut, de son chef, fournir l’appoint qui leur manque pour leur nomination légale.
«Je crois enfin, puisque la guerre a changé la population, qu’il était juste de changer la loi plutôt que de la violer.
«Née du vote, la Commune, en se complétant sans lui, se suicide. Je ne veux pas être complice de la faute.
«Je suis convaincu de ces vérités au point que, si la Commune persiste dans ce qui me semble une usurpation du pouvoir électif, je ne pourrai concilier le respect dû au vote de la majorité, et celui dû à ma conscience. Et alors je serai forcé, à mon grand regret, de donner, avant la victoire, ma démission de membre de la Commune.
« Salut et fraternité
«Félix PYAT».
CHALAIN demande s’il doit restituer une brochure de Victor Considérant qu’il a trouvée à l’imprimerie et qui est maintenant à la Préfecture de police.
PLUSIEURS MEMBRES. Oui, oui!
OUDET. Je demanderai à être relevé de mon poste à Passy. Je demanderai que des citoyens dévoués aillent là-bas; je demanderais à ce que Longuet se rendît à ce poste. Accordez-moi au moins un peu de repos. Veuillez choisir parmi vous des citoyens qui veuillent se rendre à Passy.
LE PRÉSIDENT. Le citoyen Oudet était délégué de la Commune.
LEFRANÇAIS. Quel est le travail à faire?
OUDET. Vous vous rendez au secteur, vous donnez les ordres, depuis le Point-du-Jour jusqu’à la Porte-Maillot; s’il y a des besoins, vous en avisez le ministère de la Guerre, vous en recevez communication et vous faites votre devoir. Cette population de Passy est irritée de voir quelqu’un qui lui est inconnu; elle verrait avec plaisir plusieurs membres de la Commune se succéder. Nommez des délégués ayant la confiance du pays, aidez-nous vite, ne nous laissez pas succomber. C’est le point le plus important de Paris; c’est la défense de la capitale. Vous avez là 6.000 hommes le jour, 3.000 la nuit, ou plutôt 2.500, pour garder la canonnière Farcy; vous y avez des poudrières, un commandant. Si, demain, un de ces points se trouvait emporté, vous seriez pris et vaincus: j’en appelle au délégué à la Guerre, qui est là. Vous avez là de braves commandants, mais aussi la réaction la plus terrible. Si j’ai été excentrique souvent, si j’ai prononcé des paroles acerbes, c’était par excès de fatigue. Voulez-vous m’accorder 24 heures de repos?
PLUSIEURS MEMBRES. Oui, oui!
OUDET. Qu’on voie continuellement des membres de la Commune, au 6e secteur, et tout ira bien.
LEFRANÇAIS. Le citoyen Oudet peut-il encore nous donner le temps nécessaire pour installer l’un de nous à sa place?
OUDET. Mais certainement; je donnerai 48 heures, s’il le faut.
LEFRANÇAIS. Eh! bien je demande à remplacer le citoyen Oudet.
GAMBON. Et moi aussi.
LE PRÉSIDENT. Les citoyens Lefrançais et Gambon se proposent pour être délégués au 6e secteur. Je vais consulter l’Assemblée, sur l’acceptation de la proposition du citoyen Oudet.
L’Assemblée, consultée, décide, à l’unanimité, que les citoyens Lefrançais et Gambon seront délégués par la Commune au 6e secteur.
LE PRÉSIDENT, après une demande du citoyen Clémence, qui réclame la parole, l’accorde au citoyen Régère.
RÉGÈRE. Je me demande quelle attitude nous devons prendre devant la décision de Félix Pyat. Il n’est pas possible que nous nous déjugions; il y a un vote acquis. Véritablement, ces démissions, que l’on nous propose à chaque instant, ressemblent à un relâchement moral et presque à une désertion. Je demande que l’on refuse les démissions.
UN MEMBRE appuie fortement cette proposition.
AMOUROUX. Nous ne devons pas nous préoccuper davantage des démissions qui nous sont offertes, nous ne devons y répondre que par le silence. Nous n’avons, ni à accepter, ni à refuser. Il y a un vote acquis. Le citoyen Félix Pyat croit devoir donner sa démission; eh! bien, s’il nous fallait nous occuper de tous les incidents de cette nature et y donner suite, il arriverait un moment où l’Assemblée n’aurait plus personne pour délibérer. Je demande donc formellement que l’on passe à l’ordre du jour.
VOIX. L’ordre du jour!
RÉGÈRE. Je demande qu’on vote sur ma proposition: refus de toute démission.
VOIX. C’est voté!
BESLAY. J’ai voulu faire revenir le citoyen Pyat sur sa démission, mais je crois que ce sera très difficile. Vous devez publier sa lettre, car il veut constater qu’il n’a pas voté avec la majorité. Qu’on l’engage, si l’on veut, à en faire une autre; mais je crois que, vu la ténacité qu’il y a mise, il sera difficile de le faire revenir sur sa décision.
AVRIAL. Je crois qu’il serait très difficile de lui faire retirer sa lettre, car elle est peut-être en ce moment à l’impression.
CHAMPY. Je suis d’avis qu’il ne faut pas accepter la démission du citoyen Pyat. Je demande qu’on retranche le paragraphe dans lequel il donne sa démission , et qu’on publie le reste de sa lettre.
LE PRÉSIDENT. L’ordre du jour est demandé; il y a une demande d’ordre du jour pur et simple et une demande d’ordre du jour motivé.
L’ordre du jour pur et simple est adopté.
(À
suivre).
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