samedi 28 octobre 2017

Cronstadt




Sur les événements de Cronstadt, il est très difficile de trouver de la documentation.

Emma Goldman se rendit en Russie et fut la témoin de ces événements qu'elle a relaté et que Daniel Guérin a compilé dans son ouvrage « Anthologie de l'anarchisme ». Tome 4


Adressé au Soviet des syndicats et de la défense de Petrograd ; Président Zinoviev :

« Garder le silence est devenu impossible : ce serait même criminel ! Les événements récents nous poussent, nous les anarchistes, à parler et à définir notre position devant la situation actuelle.
L'esprit de ferment et de mécontentement qui se manifeste parmi les travailleurs et les marins est le résultat de causes qui exigent notre attention sérieuse. Le froid et la faim ont produit du mécontentement et l'absence de possibilités de discussion et de critique forcent les ouvriers et les marins à exposer publiquement leurs griefs.
« Des bandes de gardes blancs souhaitent, et peuvent essayer, d'exploiter ce mécontentement dans l’intérêt de leur propre classe. Camouflés derrières les travailleurs et marins, ils lancent des slogans, réclamant l'assemblée constituante, le commerce libre, et posent des revendications similaires.
« Nous, les anarchistes, avons depuis longtemps déjà dénoncé l'erreur de ces slogans et nous déclarons devant le monde entier que nous allons combattre, les armes à la main, contre toute tentative contre-révolutionnaire, en coopération avec tous les amis de la révolution socialiste et la main dans la main avec les bolchéviks.
« En ce qui concerne le conflit entre le gouvernement et les travailleurs et marins, nous pensons qu'il doit être réglé, non par la force des armes, par un accord révolutionnaire et fraternel.
« La décision de verser le sang, prise par le gouvernement soviétique, ne tranquillisera pas les travailleurs, dans la situation actuelle. Au contraire, elle servira seulement à aggraver les choses et renforcera le jeu de l'Entente et de la contre-révolution à l'intérieur.
« Plus grave encore, l'usage de la force par le gouvernement des travailleurs et paysans contre les ouvriers et les marins aura un effet réactionnaire sur le mouvement révolutionnaire international et fera le plus grand tort à la révolution socialistes.
« Camarades bolchéviks, réfléchissez avant qu'il soit trop tard ! Ne jouez pas avec le feu : vous êtes en train de faire un pas décisif et très grave.
« Nous vous soumettons donc la proposition suivante : permettez l'élection d'une commission, composée de 5 personnes ; comprenant deux anarchistes. Cette commission se rendra à Cronstadt pour régler le conflit par des moyens pacifiques. Dans la présente situation, c'est la méthode la plus radicale. Elle sera d'une importance révolutionnaire internationale.

Petrograd, 5 mars 1921,
Alexandre Berkman, Emma Goldman...

Trotsky en arrivant à Cronstadt :

« déclara aux marins et aux soldats de Cronstadt qu'il allait « tuer comme des faisans » sur tous ceux qui avaient osé « lever la main contre la patrie socialiste » »

Les bolchéviques, pour salir la mémoire des marins, les accusèrent d'avoir été infiltré et manipulé par les blancs.

Quant à Trotsky, lui, engageait à ses côtés, un blanc du nom de Toukhatchevsky qu'il nomma commandant général pour l'attaque contre Cronstadt.

Emma Goldman tente de trouver un moyen de sauver encore les marins :

« Je m'adressai aux communistes que nous connaissions. Je les suppliai de faire quelque chose. Quelques uns se rendaient compte du crime monstrueux que leur parti était en train de commettre contre Cronstadt. Ils admettaient que l'accusation de contre-révolution était fabriquée de toutes pièces. [...]Loin de faire cause commune avec les généraux Tsaristes, ils avaient même refusé l'aide que leur offrait Tchernov, le dirigeant des socialistes-révolutionnaires. Ils ne voulaient pas de l'aide de l'extérieur. Ils demandaient le droit pour eux de choisir leurs propres députés dans les prochaines élections pur le soviet de Cronstadt et justice pour les grévistes de Petrograd. »

Les « amis communistes » passaient du temps à parler avec les anarchistes. Mais aucun d'eux ne voulaient intervenir de peur de représailles : exclu du parti sans ressources pour eux et leurs proches ; peur de disparaître sans laisser de trace...

« Et pourtant, ils nous assuraient que ce n'était pas la peur qui paralysait leur volonté. C'était l'inutilité complète d'une protestation ou d'un appel . Rien, absolument rien, ne pouvait arrêter les rouges communistes. Ils avaient été écrasé par eux ; ils n'avaient même plus la force de protester. »

Emma Goldman raconte les événements : après le 17 mars, lorsque les bruits de la bataille cessèrent :

« Tard dans l'après midi, la tension cédait la place à une horreur muette. Cronstadt avait été subjuguée. Des dizaines de milliers d'hommes assassinés, la ville noyée dans le sang. La Néva, dont l'artillerie lourde avait brisé la glace, devint la tombe d'une multitude d'hommes : Kursanty et jeunes communistes. Les héroïques marins et soldats avaient défendu leurs positions jusqu'au dernier souffle. Ceux qui n'avaient pas eu la chance de mourir en combattant tombaient entre les mains de l'ennemi pour être exécutés ou envoyés à la lente torture des régions glacées de la Russie.
[…]
« Dix huit mars : anniversaire de la Commune de Paris de 1871, écrasée deux mois plus tard par Thiers et Gallifet, les bouchers de 30 000 communards ! Imités à Cronstadt, le 18 mars 1921. »

Au X congrès, celui qui suivit le massacre, Lénine annonça la mise en place de la Nouvelle Politique Économique.

« Effrontément, comme toujours, il admit ce que des gens sincères et affichés dans le parti et à l'extérieur de celui-ci, avaient su pendant 17 jours à savoir que les hommes de Cronstadt ne voulaient pas des contre-révolutionnaires. « Mais ils ne voulaient pas non plus de nous ! » Les marins naïfs avaient pris au sérieux la devise de la révolution : « Tout le pouvoir aux soviets ! » à laquelle Lénine et son parti avaient promis solennellement de rester fidèles. Telle avait été la faute impardonnable des hommes de Cronstadt ! Pour cela il fallait qu'ils meurent. Ils devaient devenir des martyrs pour féconder la terre pour la nouvelle récolte de slogans de Lénine qui annulait complètement les anciens. Le chef d’œuvre était la nouvelle politique économique. »

Résolution de la réunion générale de la 1 et de la 2° escadre de la flotte de la Baltique, tenue à Cronstadt.

1 mars 1921

Après avoir entendu les rapports des représentants envoyés à Petrograd par la réunions générale des équipages pur y examiner la situation.
L'assemblée décide qu'il faut :
Étant donné que les soviets actuels n'expriment pas la volonté des ouvriers et des paysans,
1 Procéder immédiatement à la réélection des soviets au moyen du vote secret. La campagne électorale parmi les ouvriers et les paysans devra se dérouler en pleine liberté de parole et d'action ;
2 Établir la liberté de parole et de presse pour tous les ouvriers et les paysans pour les anarchistes et pour les partis socialistes de gauche ;
3 Accorder la liberté de réunion aux syndicats et aux organisations paysannes ;
4 Convoquer en dehors des partis politiques une conférence des ouvriers, soldats rouges et marins de Pétrograd, de Cronstadt et de la province de Petrograd pour le 10 mars 1921 au plus tard ;
5 Élargir tous les prisonniers politiques socialistes et aussi tous les ouvriers, paysans, soldats rouges et marins, emprisonnés à la suite des mouvements ouvriers et paysans ;
6 Élire une commission aux fins d'examiner les cas de ceux qui se trouvent dans les prisons et les camps de concentrations ;
7 Abolir les « offices politiques », car aucun parti politique ne doit avoir de privilèges pour la propagande de ses idées, ni recevoir de l’État des moyens pécuniaires dans ce but. Il faut instituer à leur place des commissions d'éducation et de culture, élues dans chaque localité et financés par le gouvernement ;
8 Abolir immédiatement tous les barrages ;
9 Uniformiser les rations pour tous les travailleurs excepté pour ceux qui excentrent des professions dangereuses pour la santé ;
10 Abolir les détachements communistes de choc dans toutes les fabriques et usines. En cas de besoin les corps de garde pourront être désignés dans l'armée par les compagnies et dans les usines et fabriques par les ouvriers eux-mêmes ;
11 Donner aux paysans la pleine liberté d'action en ce qui concerne leurs terres et aussi le droit de posséder du bétail, à condition qu'ils s'acquittent de leur tâche eux-mêmes, c'est-à-dire sans avoir recours au travail salarié ;
12 Désigner une commission ambulante de contrôle ;
13 Autoriser le libre exercice de l'artisanat, sans emploi d'un travail salarié ;
14 Nous demandons à toutes les unités de l'armée et aussi aux camarades « kursanty » militaires de se joindre à notre résolution ;
La résolution est adoptée par la réunion des équipages de l'escadre. Deux personnes se sont abstenus
Signé Petritchenko, président de la réunion ; Pérelkine, secrétaire.

Ils lancèrent un appel à la radio pour essayer de démentir les mensonges des communistes.

« A tous...à tous...à tous...
Camarades, ouvriers, soldats rouges et marins !
Ici, à Cronstadt, nous savons combien vous souffrez, vous-mêmes, vos femmes et vos enfants affamés, sous le joug de la dictature des communistes.
Nous avons jeté bas le soviet communiste. Dans quelques jours, notre comité révolutionnaire provisoire procédera aux élections du nouveau soviet, lequel, élu librement, reflétera bien la volonté de toute la population laborieuse et de la garnison, et non celle d'une poignés de fous « communistes ».
Notre cause est juste . Nous sommes pour le pouvoir des Soviets et non des partis Nous sommes pour l'élection libre des représentants des masses laborieuses. Les soviets falsifiés, accaparés et manipulés par le parti communiste, ont toujours été sourds à nos besoins et à nos demandes ; la seule réponse que nous avons reçue fut la balle assassine.
Actuellement, la patience des travailleurs étant à bout, on veut fermer la bouche à l'aide d'aumônes ; par ordre de Zinoviev, les barrages sont supprimés dans la province de Pétrograd et Moscou assigne 10 millions de roubles-or pour l'achat à l'étranger des vivres et des objets de première nécessité.Mais nous savons que le prolétariat de Pétrograd ne se laissera pas acheter avec ces aumônes. Par dessus les têtes des communistes, Cronstadt révolutionnaire vous tend la main et vous offre son aide fraternelle.
Camarades ! Non seulement on vous trompe, mais on dénature impunément la vérité, on s'abaisse jusqu'à la dissimulation la plus vile. Camarades, ne vous laissez pas faire !
A Cronstadt le pouvoir est exclusivement entre les mains des marins, des soldats et des ouvriers révolutionnaires, et non entre celles de « contre-révolutionnaires dirigés par un Kozlovsky » comme essaie de vous le faire contre la radio mensongère de Moscou.
Ne tardez pas camarades ! Unissez-vous à nous ! Entrez en contact avec nous ! Exigez que vos délégués sans parti soient autorisés à venir à Cronstadt. Eux seuls pourront vous dire la vérité et démasque l'abjecte calomnie sur «  le pain finlandais » et les menées de l'Entente.
Vive le prolétariat révolutionnaire des villes et des champs !
Vive le pouvoir des Soviets librement élus ! »

Sans cesse il fallait communiquer afin de faire connaître la vérité de leur situation et faire comprendre au peuple la réalité du « communisme » de Trotsky et Lénine.

« Que le monde sache !

A tous...à tous...à tous...

Le premier coup de canon vient d'être tiré. Le « feldmaréchal » Trotsky, taché du sang des ouvriers, fut le premier à tirer sur Cronstadt révolutionnaire qui se leva contre l'autocratie des communistes afin de rétablir le véritable pouvoir des Soviets.
Sans avoir répandu une seule goutte de sang nous nous sommes libérés, nous soldats rouges, marins et ouvriers de Cronstadt, du joug des communistes. Nous avons laissé la vie à ceux des leurs qui étaient parmi nous. Ils veulent maintenant nous imposer à nouveau leur pouvoir, par la menace des canons.
Ne voulant aucune effusion de sang, nous avons demandé que fussent envoyés ici des délégués de sans-parti du prolétariat de Petrograd pour qu'ils puissent se rendre compte que Cronstadt combat pour le pouvoir des Soviets. Mais les communistes cachèrent notre demande aux ouvriers de Petrograd et ouvrirent le feu : réponse habituelle du prétendu gouvernement ouvrier et paysan aux demandes des masses laborieuses.
Que les ouvriers du monde entier sachent que nous, défenseurs du pouvoir des Soviets, veillerons aux conquêtes de la Révolution Sociale.
Nous vaincrons ou nous périrons sous les ruines de Cronstadt, en luttant pour la juste cause des masses ouvrières.
Les travailleurs du monde entier seront nos juges. Le sang des innocents retombera sur la tête des communistes tous furieux enivrés par le pouvoir
Vive le pouvoir des Soviets !

Le comité révolutionnaire provisoire. »



« Cronstadt libéré, aux ouvrières du monde

Ce jour est un jour de fête universelle : le jour de l'ouvrière. Nous, ceux de Cronstadt, envoyons, au milieu du fracas des canons et des explosions, des obus tirés par les communistes ennemis du peuple laborieux, nos fraternels saluts aux ouvrières du monde : saluts de Cronstadt Rouge révolutionnaire et libre.
Nous désirons que vous réalisiez bientôt votre émancipation libre de toute forme de violence et d'oppression.
Vivent les libres ouvrières révolutionnaires !
Vive la révolution sociale mondiale ! »


et pour clore ce chapitre très triste , je vous offre le dernier texte que j'ai retenu.

Pourquoi publier cela maintenant ? C'est simplement pour prévenir les personnes que l’idolâtrie aveugle ne peut occulter les erreurs que l'histoire a révélée . Si la révolution d'Octobre 1917 fut un événement majeure dans le peuple ouvrier du monde, l'adoration aveugle ne peut nous faire fermer les yeux sur ce que furent les années 1918 à 1923, avec l'écrasement des marins de Cronstadt qui défendaient uniquement ce que Lénine vantait dès le début, les Soviets, et celui de la Makhnochina qui voulait donner les terres au peuple Ukrainien.

« Cronstadt est calme.

« Hier, le 7 mars, les ennemis des travailleurs, les communistes, ont ouvert le feu contre Cronstadt.
La population accueillit le bombardement vaillamment. Les ouvriers coururent aux armes avec un bel élan ! On voyait bien que la population laborieuse de la ville vivait en parfait accord avec son comité révolutionnaire provisoire.
Malgré l'ouverture des hostilités, le comité jugea utile de proclamer l'état de siège. En effet, qui aurait-il à craindre ? Certes, pas ses propres soldats rouges, ni ses marins, ni ses ouvriers ou intellectuels ! Par contre, à Pétrograd, en raison de l'état de siège proclamé, on n'est pas autorisé à sortir seulement que jusqu'à 7 heures. Cela se comprend : les imposteurs ont à craindre leur propre population laborieuse.
En faisant la Révolution d'Octobre, la classe ouvrière avait espéré obtenir son émancipation. Mais il en résulta un esclavage encore plus grand de l'individualité humaine.
Le pouvoir de la monarchie policière passa aux mains des usurpateurs, les communistes, qui, au lieu de laisser la liberté au peuple, lui réservèrent la peur des geôles de la Tchéka, dont les horreurs dépassent de beaucoup les méthodes de la gendarmerie tsariste.
Au bout de longues années de luttes et de souffrances, le travailleur de la Russie soviétique n'a obtenu que des ordres impertinents, des coups de baïonnettes et le sifflement des balles des « cosaques » de la Tchéka. De fait, le pouvoir communiste a substitué à l'emblème glorieux des travailleurs, la faucille et le marteau, cet autre symbole : la baïonnette et les barreaux, ce qui a permis à la nouvelle bureaucratie, aux commissaires et aux fonctionnaires communistes de s'assurer une vie tranquille et sans soucis.
Mais ce qui est le plus abject et le plus criminel, c'est l'esclavage spirituel instauré par les communistes : ils mirent la main aussi sur la pensée, sur la vie morale des travailleurs, obligeant chacun à penser uniquement suivant leur formule.
A l'aide des syndicats étatisés, ils attachèrent l'ouvrier à la machine et transformèrent le travail en un nouvel esclavage, au lieu de le rendre plaisant.
Aux protestations des paysans, allant jusqu'à des révoltes spontanées ; aux réclamations des ouvriers, obligés par les conditions mêmes de leur vie de recourir à des grèves, ils répondent par des fusillades en masse et par une férocité qu'auraient enviée les généraux tsaristes.
La Russie des travailleurs, la première qui leva le drapeau rouge de l'émancipation du travail, est reniée dans le sang des martyrs pour la plus grande gloire de la domination communiste. Les communistes noient dans cette mer de sang toutes les grandes et belles promesses et possibilités de la Révolution prolétarienne.
Il devenait de plus en plus clair, et il devient maintenant évident que le parti communiste n'est pas, comme il feignait de l'être, le défenseur des travailleurs. Les intérêts de la classe ouvrière lui sont étrangers. Après avoir obtenu le pouvoir, il n'a qu'un seul souci : de ne pas le perdre. Aussi considère-t-il que tous les moyens lui sont bons : diffamation, tromperie, violence, assassinat, vengeance sur les familles des rebelles.
Mais la patience des travailleurs martyrs est à bout.
Le pays s'illumine çà et là par l'incendie des rebellions dans la lutte contre l'oppression et la violence. Les grèves ouvrières se multiplient.
Les limiers bolchévistes veillent. On prend toutes les mesures pour empêcher et étouffer l'inévitable troisième Révolution.
Malgré tout, elle est venue. Elle est réalisée par les masses laborieuses elles-mêmes. Les généraux du communisme voient bien que c'est le peuple qui s'est soulevé, convaincu qu'il est de leur trahison des idées de la Révolution. Craignant pour leur peau et sachant qu'ils ne pourront se cacher nulle part pour échapper à la colère des travailleurs, les communistes cherchent à terroriser les rebelles, avec l'aide de leurs « cosaques », par la prison, l’exécution et autres atrocités. Sous le joug de la dictature communiste, la vie même est devenue pire que la mort.
Le peuple laborieux en révolte a compris que dans la lutte contre les communistes et contre le régime de servage rétabli, on ne peut s'arrêter à mi-chemin. Il faut aller jusqu'au bout. Les communistes feignent d'accorder des concessions ; ils enlèvent les barrages dans les provinces de Petrograd ; ils assignent 10 millions de roubles-or pour l'achat des produits à l'étranger. Mais qu'on ne s'y trompe pas : c'est la poigne de fer du maître, du dictateur, qui se cache derrière cet appât ; du maître qui , le calme revenu, fera payer cher ces concessions.
Non pas d'arrêt à mi-chemin ! Il faut vaincre ou mourir !
Cronstadt la Rouge, terreur de la contre-révolution de gauche comme de droite, en donne l'exemple.
C'est ici que la grande poussée nouvelle de la Révolution fut réalisée ? Ici fut hissé le drapeau de la révolte contre la tyrannie des trois dernières années, contre l'oppression de l'autocratie communiste qui fit pâlir les trois siècles du joug monarchiste.
C'est ici, à Cronstadt, que fut scellé la pierre fondamentale de la troisième révolution qui brisera les dernières chaînes du travailleur et lui ouvrira la nouvelle et large route de l'édification socialiste.
Cette nouvelle révolution secouera les masses laborieuses de l'Orient et de l'Occident. Car elle montrera l'exemple d'une nouvelle construction socialiste en opposition à la « construction » communiste, mécanique et gouvernementale. Les masses laborieuses de l'autre côté de nos frontières seront alors convaincues par les faits que tout ce qui a été fabriqué chez nous jusqu'à présent., au nom des ouvriers et paysans, n'était pas le socialisme.
Le premier pas dans ce sens est fait sans un seul coup de fusil, sans répandre une seule goutte de sang. Les travailleurs n'ont pas besoin de sang. Ils n'en feront couler qu'en cas de légitime défense. Malgré tous les actes révoltants des communistes, nous aurons assez de maîtrise de nous-même pour nous borner à les isoler de la vie sociale afin de les empêcher de nuire au travail révolutionnaire par leur fausse et malveillante agitation.
Les ouvriers et les paysans vont de l'avant, irrésistiblement. Ils laissent derrière eux la constituante avec son régime bourgeois, et la dictature du parti communiste avec sa Tchéka et son capitalisme d'état qui resserre le nœud autour du cou des travailleurs et menace de les étrangler. Le changement qui vient de se produire offre enfin aux masses laborieuses la possibilité de s'assurer des Soviets librement élus et qui fonctionneront sans aucune pression violente d'un parti. Ce changement leur permettra aussi de réorganiser les syndicats étatisés en associations libres d'ouvriers, de paysans et de travailleurs intellectuels.
La machine policière de l'autocratie communiste est enfin brisé. »

Finalement, pour le plaisir, je ne peux m'empêcher de vous livrer un dernier message des révoltés de Cronstadt au « camarade » Trotsky.

« Écoute, Trotsky !

« Dans leurs radios, les communistes ont déversé des tombereaux d'ordures sur les animateurs de la troisième Révolution, qui défendent le véritable pouvoir des Soviets contre l'usurpation et l'arbitraire des commissaires.
Nous ne l'avons jamais caché à la population de Cronstadt. Toujours, dans nos Izvestia, nous avons rendu publiques ces attaques calomnieuses.
Nous n'avions rien à craindre. Les citoyens savaient comment la révolte s'était produite et par qui elle avait été faite.
Les ouvriers et les soldats rouges savent qu'il n'existe, dans la garnison, ni généraux ni gardes blancs.
De son côté, le comité révolutionnaire provisoire a envoyé à Petrograd une radio exigeant l'élargissement des otages détenus par les communistes dans des prisons surpeuplées : ouvriers, marins et leurs familles, et aussi la mise en liberté des détenus politiques.
Notre seconde radio proposait de faire venir à Cronstadt des délégués sans parti qui, ayant vu sur place ce qui se passait chez nous, pourraient dire la vérité aux masses laborieuses de Petrograd.
Et bien ! Les communistes, qu'ont-ils fait ? Ils ont caché cette radio aux ouvriers et aux soldats rouges.
Quelques unités des troupes du « feld-maréchal » Trotsky, passées de notre côté, nous ont remis des journaux de Petrograd. Dans ces journaux, pas un seul mot de nos radios !
Et pourtant, il n'y a pas bien longtemps, ces tricheurs habitués à jouer avec des cartes biseautée, criaient qu'il ne fallait pas avoir de secrets pour le peuple, même pas de secrets diplomatiques !
Écoute, Trotsky ! Tant que tu réussiras à échapper au jugement du peuple, tu pourras fusiller des innocents par paquets. Mais il est impossible de fusiller la vérité. Elle finira par se frayer un chemin. Toi et tes « cosaques » vous serez obligés alors de rendre des comptes. »

Je vous invite à lire « Anthologie de l'anarchisme  tome 4» de Daniel Guérin afin d'y lire un témoignage sur ces événements. Il existe aussi Cinnella Ettore « Makhno et la révolution Ukrainienne ».

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