Sur
les événements de Cronstadt, il est très difficile de trouver de
la documentation.
Emma
Goldman se rendit en Russie et fut la témoin de ces événements
qu'elle a relaté et que Daniel Guérin a compilé dans son ouvrage
« Anthologie de l'anarchisme ». Tome 4
Adressé au Soviet des syndicats
et de la défense de Petrograd ; Président Zinoviev :
« Garder le silence est
devenu impossible : ce serait même criminel ! Les
événements récents nous poussent, nous les anarchistes, à parler
et à définir notre position devant la situation actuelle.
L'esprit de ferment et de
mécontentement qui se manifeste parmi les travailleurs et les marins
est le résultat de causes qui exigent notre attention sérieuse. Le
froid et la faim ont produit du mécontentement et l'absence de
possibilités de discussion et de critique forcent les ouvriers et
les marins à exposer publiquement leurs griefs.
« Des bandes de gardes
blancs souhaitent, et peuvent essayer, d'exploiter ce mécontentement
dans l’intérêt de leur propre classe. Camouflés derrières les
travailleurs et marins, ils lancent des slogans, réclamant
l'assemblée constituante, le commerce libre, et posent des
revendications similaires.
« Nous, les anarchistes,
avons depuis longtemps déjà dénoncé l'erreur de ces slogans et
nous déclarons devant le monde entier que nous allons combattre, les
armes à la main, contre toute tentative contre-révolutionnaire, en
coopération avec tous les amis de la révolution socialiste et la
main dans la main avec les bolchéviks.
« En ce qui concerne le
conflit entre le gouvernement et les travailleurs et marins, nous
pensons qu'il doit être réglé, non par la force des armes, par un
accord révolutionnaire et fraternel.
« La décision de verser
le sang, prise par le gouvernement soviétique, ne tranquillisera pas
les travailleurs, dans la situation actuelle. Au contraire, elle
servira seulement à aggraver les choses et renforcera le jeu de
l'Entente et de la contre-révolution à l'intérieur.
« Plus grave encore,
l'usage de la force par le gouvernement des travailleurs et paysans
contre les ouvriers et les marins aura un effet réactionnaire sur le
mouvement révolutionnaire international et fera le plus grand tort à
la révolution socialistes.
« Camarades bolchéviks,
réfléchissez avant qu'il soit trop tard ! Ne jouez pas avec le
feu : vous êtes en train de faire un pas décisif et très
grave.
« Nous vous soumettons
donc la proposition suivante : permettez l'élection d'une
commission, composée de 5 personnes ; comprenant deux
anarchistes. Cette commission se rendra à Cronstadt pour régler le
conflit par des moyens pacifiques. Dans la présente situation, c'est
la méthode la plus radicale. Elle sera d'une importance
révolutionnaire internationale.
Petrograd, 5 mars 1921,
Alexandre Berkman, Emma
Goldman...
Trotsky
en arrivant à Cronstadt :
« déclara aux marins et
aux soldats de Cronstadt qu'il allait « tuer comme des
faisans » sur tous ceux qui avaient osé « lever la main
contre la patrie socialiste » »
Les
bolchéviques, pour salir la mémoire des marins, les accusèrent
d'avoir été infiltré et manipulé par les blancs.
Quant
à Trotsky, lui, engageait à ses côtés, un blanc du nom de
Toukhatchevsky qu'il nomma commandant général pour l'attaque contre
Cronstadt.
Emma Goldman tente de
trouver un moyen de sauver encore les marins :
« Je m'adressai aux
communistes que nous connaissions. Je les suppliai de faire quelque
chose. Quelques uns se rendaient compte du crime monstrueux que leur
parti était en train de commettre contre Cronstadt. Ils admettaient
que l'accusation de contre-révolution était fabriquée de toutes
pièces. [...]Loin de faire cause commune avec les généraux
Tsaristes, ils avaient même refusé l'aide que leur offrait
Tchernov, le dirigeant des socialistes-révolutionnaires. Ils ne
voulaient pas de l'aide de l'extérieur. Ils demandaient le droit
pour eux de choisir leurs propres députés dans les prochaines
élections pur le soviet de Cronstadt et justice pour les grévistes
de Petrograd. »
Les « amis
communistes » passaient du temps à parler avec les
anarchistes. Mais aucun d'eux ne voulaient intervenir de peur de
représailles : exclu du parti sans ressources pour eux et leurs
proches ; peur de disparaître sans laisser de trace...
« Et pourtant, ils nous
assuraient que ce n'était pas la peur qui paralysait leur volonté.
C'était l'inutilité complète d'une protestation ou d'un appel .
Rien, absolument rien, ne pouvait arrêter les rouges communistes.
Ils avaient été écrasé par eux ; ils n'avaient même plus la
force de protester. »
Emma
Goldman raconte les événements : après le 17 mars, lorsque
les bruits de la bataille cessèrent :
« Tard dans l'après midi,
la tension cédait la place à une horreur muette. Cronstadt avait
été subjuguée. Des dizaines de milliers d'hommes assassinés, la
ville noyée dans le sang. La Néva, dont l'artillerie lourde avait
brisé la glace, devint la tombe d'une multitude d'hommes :
Kursanty et jeunes communistes. Les héroïques marins et soldats
avaient défendu leurs positions jusqu'au dernier souffle. Ceux qui
n'avaient pas eu la chance de mourir en combattant tombaient entre
les mains de l'ennemi pour être exécutés ou envoyés à la lente
torture des régions glacées de la Russie.
[…]
« Dix huit mars :
anniversaire de la Commune de Paris de 1871, écrasée deux mois plus
tard par Thiers et Gallifet, les bouchers de 30 000 communards !
Imités à Cronstadt, le 18 mars 1921. »
Au X congrès, celui qui suivit
le massacre, Lénine annonça la mise en place de la Nouvelle
Politique Économique.
« Effrontément, comme
toujours, il admit ce que des gens sincères et affichés dans le
parti et à l'extérieur de celui-ci, avaient su pendant 17 jours à
savoir que les hommes de Cronstadt ne voulaient pas des
contre-révolutionnaires. « Mais ils ne voulaient pas non plus
de nous ! » Les marins naïfs avaient pris au sérieux la
devise de la révolution : « Tout le pouvoir aux
soviets ! » à laquelle Lénine et son parti avaient
promis solennellement de rester fidèles. Telle avait été la faute
impardonnable des hommes de Cronstadt ! Pour cela il fallait
qu'ils meurent. Ils devaient devenir des martyrs pour féconder la
terre pour la nouvelle récolte de slogans de Lénine qui annulait
complètement les anciens. Le chef d’œuvre était la nouvelle
politique économique. »
Résolution de la réunion
générale de la 1 et de la 2° escadre de la flotte de la Baltique,
tenue à Cronstadt.
1 mars 1921
Après avoir entendu les
rapports des représentants envoyés à Petrograd par la réunions
générale des équipages pur y examiner la situation.
L'assemblée décide qu'il
faut :
Étant donné que les soviets
actuels n'expriment pas la volonté des ouvriers et des paysans,
1 Procéder immédiatement à la
réélection des soviets au moyen du vote secret. La campagne
électorale parmi les ouvriers et les paysans devra se dérouler en
pleine liberté de parole et d'action ;
2 Établir la liberté de parole
et de presse pour tous les ouvriers et les paysans pour les
anarchistes et pour les partis socialistes de gauche ;
3 Accorder la liberté de
réunion aux syndicats et aux organisations paysannes ;
4 Convoquer en dehors des partis
politiques une conférence des ouvriers, soldats rouges et marins de
Pétrograd, de Cronstadt et de la province de Petrograd pour le 10
mars 1921 au plus tard ;
5 Élargir tous les prisonniers
politiques socialistes et aussi tous les ouvriers, paysans, soldats
rouges et marins, emprisonnés à la suite des mouvements ouvriers et
paysans ;
6 Élire une commission aux fins
d'examiner les cas de ceux qui se trouvent dans les prisons et les
camps de concentrations ;
7 Abolir les « offices
politiques », car aucun parti politique ne doit avoir de
privilèges pour la propagande de ses idées, ni recevoir de l’État
des moyens pécuniaires dans ce but. Il faut instituer à leur place
des commissions d'éducation et de culture, élues dans chaque
localité et financés par le gouvernement ;
8 Abolir immédiatement tous les
barrages ;
9 Uniformiser les rations pour
tous les travailleurs excepté pour ceux qui excentrent des
professions dangereuses pour la santé ;
10 Abolir les détachements
communistes de choc dans toutes les fabriques et usines. En cas de
besoin les corps de garde pourront être désignés dans l'armée par
les compagnies et dans les usines et fabriques par les ouvriers
eux-mêmes ;
11 Donner aux paysans la pleine
liberté d'action en ce qui concerne leurs terres et aussi le droit
de posséder du bétail, à condition qu'ils s'acquittent de leur
tâche eux-mêmes, c'est-à-dire sans avoir recours au travail
salarié ;
12 Désigner une commission
ambulante de contrôle ;
13 Autoriser le libre exercice
de l'artisanat, sans emploi d'un travail salarié ;
14 Nous demandons à toutes les
unités de l'armée et aussi aux camarades « kursanty »
militaires de se joindre à notre résolution ;
La résolution est adoptée par
la réunion des équipages de l'escadre. Deux personnes se sont
abstenus
Signé Petritchenko, président
de la réunion ; Pérelkine, secrétaire.
Ils
lancèrent un appel à la radio pour essayer de démentir les
mensonges des communistes.
« A tous...à tous...à
tous...
Camarades, ouvriers, soldats
rouges et marins !
Ici, à Cronstadt, nous savons
combien vous souffrez, vous-mêmes, vos femmes et vos enfants
affamés, sous le joug de la dictature des communistes.
Nous avons jeté bas le soviet
communiste. Dans quelques jours, notre comité révolutionnaire
provisoire procédera aux élections du nouveau soviet, lequel, élu
librement, reflétera bien la volonté de toute la population
laborieuse et de la garnison, et non celle d'une poignés de fous
« communistes ».
Notre cause est juste .
Nous sommes pour le pouvoir des Soviets et non des partis Nous sommes
pour l'élection libre des représentants des masses laborieuses. Les
soviets falsifiés, accaparés et manipulés par le parti communiste,
ont toujours été sourds à nos besoins et à nos demandes ; la
seule réponse que nous avons reçue fut la balle assassine.
Actuellement, la patience des
travailleurs étant à bout, on veut fermer la bouche à l'aide
d'aumônes ; par ordre de Zinoviev, les barrages sont supprimés
dans la province de Pétrograd et Moscou assigne 10 millions de
roubles-or pour l'achat à l'étranger des vivres et des objets de
première nécessité.Mais nous savons que le prolétariat de
Pétrograd ne se laissera pas acheter avec ces aumônes. Par dessus
les têtes des communistes, Cronstadt révolutionnaire vous tend la
main et vous offre son aide fraternelle.
Camarades ! Non seulement
on vous trompe, mais on dénature impunément la vérité, on
s'abaisse jusqu'à la dissimulation la plus vile. Camarades, ne vous
laissez pas faire !
A Cronstadt le pouvoir est
exclusivement entre les mains des marins, des soldats et des ouvriers
révolutionnaires, et non entre celles de « contre-révolutionnaires
dirigés par un Kozlovsky » comme essaie de vous le faire
contre la radio mensongère de Moscou.
Ne tardez pas camarades !
Unissez-vous à nous ! Entrez en contact avec nous ! Exigez
que vos délégués sans parti soient autorisés à venir à
Cronstadt. Eux seuls pourront vous dire la vérité et démasque
l'abjecte calomnie sur « le pain finlandais » et les
menées de l'Entente.
Vive le prolétariat
révolutionnaire des villes et des champs !
Vive le pouvoir des Soviets
librement élus ! »
Sans
cesse il fallait communiquer afin de faire connaître la vérité de
leur situation et faire comprendre au peuple la réalité du
« communisme » de Trotsky et Lénine.
« Que le monde sache !
A tous...à tous...à tous...
Le premier coup de canon vient
d'être tiré. Le « feldmaréchal » Trotsky, taché du
sang des ouvriers, fut le premier à tirer sur Cronstadt
révolutionnaire qui se leva contre l'autocratie des communistes afin
de rétablir le véritable pouvoir des Soviets.
Sans avoir répandu une seule
goutte de sang nous nous sommes libérés, nous soldats rouges,
marins et ouvriers de Cronstadt, du joug des communistes. Nous avons
laissé la vie à ceux des leurs qui étaient parmi nous. Ils veulent
maintenant nous imposer à nouveau leur pouvoir, par la menace des
canons.
Ne voulant aucune effusion de
sang, nous avons demandé que fussent envoyés ici des délégués
de sans-parti du prolétariat de Petrograd pour qu'ils puissent se
rendre compte que Cronstadt combat pour le pouvoir des Soviets. Mais
les communistes cachèrent notre demande aux ouvriers de Petrograd
et ouvrirent le feu : réponse habituelle du prétendu
gouvernement ouvrier et paysan aux demandes des masses laborieuses.
Que les ouvriers du monde entier
sachent que nous, défenseurs du pouvoir des Soviets, veillerons aux
conquêtes de la Révolution Sociale.
Nous vaincrons ou nous périrons
sous les ruines de Cronstadt, en luttant pour la juste cause des
masses ouvrières.
Les travailleurs du monde entier
seront nos juges. Le sang des innocents retombera sur la tête des
communistes tous furieux enivrés par le pouvoir
Vive le pouvoir des Soviets !
Le comité révolutionnaire
provisoire. »
« Cronstadt libéré, aux
ouvrières du monde
Ce jour est un jour de fête
universelle : le jour de l'ouvrière. Nous, ceux de Cronstadt,
envoyons, au milieu du fracas des canons et des explosions, des obus
tirés par les communistes ennemis du peuple laborieux, nos
fraternels saluts aux ouvrières du monde : saluts de Cronstadt
Rouge révolutionnaire et libre.
Nous désirons que vous
réalisiez bientôt votre émancipation libre de toute forme de
violence et d'oppression.
Vivent les libres ouvrières
révolutionnaires !
Vive la révolution sociale
mondiale ! »
et
pour clore ce chapitre très triste , je vous offre le dernier texte
que j'ai retenu.
Pourquoi
publier cela maintenant ? C'est simplement pour prévenir les
personnes que l’idolâtrie aveugle ne peut occulter les erreurs que
l'histoire a révélée . Si la révolution d'Octobre 1917 fut un
événement majeure dans le peuple ouvrier du monde, l'adoration
aveugle ne peut nous faire fermer les yeux sur ce que furent les
années 1918 à 1923, avec l'écrasement des marins de Cronstadt qui
défendaient uniquement ce que Lénine vantait dès le début, les
Soviets, et celui de la Makhnochina qui voulait donner les terres au
peuple Ukrainien.
« Cronstadt est calme.
« Hier, le 7 mars, les
ennemis des travailleurs, les communistes, ont ouvert le feu contre
Cronstadt.
La population accueillit le
bombardement vaillamment. Les ouvriers coururent aux armes avec un
bel élan ! On voyait bien que la population laborieuse de la
ville vivait en parfait accord avec son comité révolutionnaire
provisoire.
Malgré l'ouverture des
hostilités, le comité jugea utile de proclamer l'état de siège.
En effet, qui aurait-il à craindre ? Certes, pas ses propres
soldats rouges, ni ses marins, ni ses ouvriers ou intellectuels !
Par contre, à Pétrograd, en raison de l'état de siège proclamé,
on n'est pas autorisé à sortir seulement que jusqu'à 7 heures.
Cela se comprend : les imposteurs ont à craindre leur propre
population laborieuse.
En faisant la Révolution
d'Octobre, la classe ouvrière avait espéré obtenir son
émancipation. Mais il en résulta un esclavage encore plus grand de
l'individualité humaine.
Le pouvoir de la monarchie
policière passa aux mains des usurpateurs, les communistes, qui, au
lieu de laisser la liberté au peuple, lui réservèrent la peur des
geôles de la Tchéka, dont les horreurs dépassent de beaucoup les
méthodes de la gendarmerie tsariste.
Au bout de longues années de
luttes et de souffrances, le travailleur de la Russie soviétique n'a
obtenu que des ordres impertinents, des coups de baïonnettes et le
sifflement des balles des « cosaques » de la Tchéka. De
fait, le pouvoir communiste a substitué à l'emblème glorieux des
travailleurs, la faucille et le marteau, cet autre symbole : la
baïonnette et les barreaux, ce qui a permis à la nouvelle
bureaucratie, aux commissaires et aux fonctionnaires communistes de
s'assurer une vie tranquille et sans soucis.
Mais ce qui est le plus abject
et le plus criminel, c'est l'esclavage spirituel instauré par les
communistes : ils mirent la main aussi sur la pensée, sur la
vie morale des travailleurs, obligeant chacun à penser uniquement
suivant leur formule.
A l'aide des syndicats étatisés,
ils attachèrent l'ouvrier à la machine et transformèrent le
travail en un nouvel esclavage, au lieu de le rendre plaisant.
Aux protestations des paysans,
allant jusqu'à des révoltes spontanées ; aux réclamations
des ouvriers, obligés par les conditions mêmes de leur vie de
recourir à des grèves, ils répondent par des fusillades en masse
et par une férocité qu'auraient enviée les généraux tsaristes.
La Russie des travailleurs, la
première qui leva le drapeau rouge de l'émancipation du travail,
est reniée dans le sang des martyrs pour la plus grande gloire de la
domination communiste. Les communistes noient dans cette mer de sang
toutes les grandes et belles promesses et possibilités de la
Révolution prolétarienne.
Il devenait de plus en plus
clair, et il devient maintenant évident que le parti communiste
n'est pas, comme il feignait de l'être, le défenseur des
travailleurs. Les intérêts de la classe ouvrière lui sont
étrangers. Après avoir obtenu le pouvoir, il n'a qu'un seul souci :
de ne pas le perdre. Aussi considère-t-il que tous les moyens lui
sont bons : diffamation, tromperie, violence, assassinat,
vengeance sur les familles des rebelles.
Mais la patience des
travailleurs martyrs est à bout.
Le pays s'illumine çà et là
par l'incendie des rebellions dans la lutte contre l'oppression et la
violence. Les grèves ouvrières se multiplient.
Les limiers bolchévistes
veillent. On prend toutes les mesures pour empêcher et étouffer
l'inévitable troisième Révolution.
Malgré tout, elle est venue.
Elle est réalisée par les masses laborieuses elles-mêmes. Les
généraux du communisme voient bien que c'est le peuple qui s'est
soulevé, convaincu qu'il est de leur trahison des idées de la
Révolution. Craignant pour leur peau et sachant qu'ils ne pourront
se cacher nulle part pour échapper à la colère des travailleurs,
les communistes cherchent à terroriser les rebelles, avec l'aide de
leurs « cosaques », par la prison, l’exécution et
autres atrocités. Sous le joug de la dictature communiste, la vie
même est devenue pire que la mort.
Le peuple laborieux en révolte
a compris que dans la lutte contre les communistes et contre le
régime de servage rétabli, on ne peut s'arrêter à mi-chemin. Il
faut aller jusqu'au bout. Les communistes feignent d'accorder des
concessions ; ils enlèvent les barrages dans les provinces de Petrograd ; ils assignent 10 millions de roubles-or pour
l'achat des produits à l'étranger. Mais qu'on ne s'y trompe pas :
c'est la poigne de fer du maître, du dictateur, qui se cache
derrière cet appât ; du maître qui , le calme revenu, fera
payer cher ces concessions.
Non pas d'arrêt à mi-chemin !
Il faut vaincre ou mourir !
Cronstadt la Rouge, terreur de
la contre-révolution de gauche comme de droite, en donne l'exemple.
C'est ici que la grande poussée
nouvelle de la Révolution fut réalisée ? Ici fut hissé le
drapeau de la révolte contre la tyrannie des trois dernières
années, contre l'oppression de l'autocratie communiste qui fit pâlir
les trois siècles du joug monarchiste.
C'est ici, à Cronstadt, que fut
scellé la pierre fondamentale de la troisième révolution qui
brisera les dernières chaînes du travailleur et lui ouvrira la
nouvelle et large route de l'édification socialiste.
Cette nouvelle révolution
secouera les masses laborieuses de l'Orient et de l'Occident. Car
elle montrera l'exemple d'une nouvelle construction socialiste en
opposition à la « construction » communiste, mécanique
et gouvernementale. Les masses laborieuses de l'autre côté de nos
frontières seront alors convaincues par les faits que tout ce qui a
été fabriqué chez nous jusqu'à présent., au nom des ouvriers et
paysans, n'était pas le socialisme.
Le premier pas dans ce sens est
fait sans un seul coup de fusil, sans répandre une seule goutte de
sang. Les travailleurs n'ont pas besoin de sang. Ils n'en feront
couler qu'en cas de légitime défense. Malgré tous les actes
révoltants des communistes, nous aurons assez de maîtrise de
nous-même pour nous borner à les isoler de la vie sociale afin de
les empêcher de nuire au travail révolutionnaire par leur fausse et
malveillante agitation.
Les ouvriers et les paysans vont
de l'avant, irrésistiblement. Ils laissent derrière eux la
constituante avec son régime bourgeois, et la dictature du parti
communiste avec sa Tchéka et son capitalisme d'état qui resserre le
nœud autour du cou des travailleurs et menace de les étrangler. Le
changement qui vient de se produire offre enfin aux masses
laborieuses la possibilité de s'assurer des Soviets librement élus
et qui fonctionneront sans aucune pression violente d'un parti. Ce
changement leur permettra aussi de réorganiser les syndicats
étatisés en associations libres d'ouvriers, de paysans et de
travailleurs intellectuels.
La machine policière de
l'autocratie communiste est enfin brisé. »
Finalement,
pour le plaisir, je ne peux m'empêcher de vous livrer un dernier
message des révoltés de Cronstadt au « camarade »
Trotsky.
« Écoute,
Trotsky !
« Dans
leurs radios, les communistes ont déversé des tombereaux d'ordures
sur les animateurs de la troisième Révolution, qui défendent le
véritable pouvoir des Soviets contre l'usurpation et l'arbitraire
des commissaires.
Nous
ne l'avons jamais caché à la population de Cronstadt. Toujours,
dans nos Izvestia, nous avons rendu publiques ces attaques
calomnieuses.
Nous
n'avions rien à craindre. Les citoyens savaient comment la révolte
s'était produite et par qui elle avait été faite.
Les
ouvriers et les soldats rouges savent qu'il n'existe, dans la
garnison, ni généraux ni gardes blancs.
De
son côté, le comité révolutionnaire provisoire a envoyé à Petrograd une radio exigeant l'élargissement des otages détenus
par les communistes dans des prisons surpeuplées : ouvriers,
marins et leurs familles, et aussi la mise en liberté des détenus
politiques.
Notre
seconde radio proposait de faire venir à Cronstadt des délégués
sans parti qui, ayant vu sur place ce qui se passait chez nous,
pourraient dire la vérité aux masses laborieuses de Petrograd.
Et
bien ! Les communistes, qu'ont-ils fait ? Ils ont caché
cette radio aux ouvriers et aux soldats rouges.
Quelques
unités des troupes du « feld-maréchal » Trotsky,
passées de notre côté, nous ont remis des journaux de Petrograd.
Dans ces journaux, pas un seul mot de nos radios !
Et
pourtant, il n'y a pas bien longtemps, ces tricheurs habitués à
jouer avec des cartes biseautée, criaient qu'il ne fallait pas avoir
de secrets pour le peuple, même pas de secrets diplomatiques !
Écoute,
Trotsky ! Tant que tu réussiras à échapper au jugement du
peuple, tu pourras fusiller des innocents par paquets. Mais il est
impossible de fusiller la vérité. Elle finira par se frayer un
chemin. Toi et tes « cosaques » vous serez obligés alors
de rendre des comptes. »
Je
vous invite à lire « Anthologie de l'anarchisme tome 4»
de Daniel Guérin afin d'y lire un témoignage sur ces événements.
Il existe aussi Cinnella
Ettore « Makhno et la révolution Ukrainienne ».
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire