L'exception sanitaire par Serge Margel
"Dans la crise sanitaire actuelle, qui a tous les traits d'une surenchère potentielle infinie, d'une interminable exception, la stratégie des sociétés néolibérales consiste à protéger la santé publique par le contrôle massif de la
mobilité, ce qui confirme l'hypothèse de Schmitt, qui parle du contrôle des apparitions imprévisibles. Le gouvernement allemand vient d'ailleurs de décréter un
Verweilverbot, l'interdiction de rester sur place. On n'a plus le droit de passer un moment quelque part. C'est dangereux, c'est menaçant, donc c'est interdit. Le mouvement et le repos sont "levés" par un nouvel état d'exception. Le contrôle des mobilités, c'est l'obligation de bouger, mais d'une certaine manière, en prenant certaines mesures de précaution et en suivant des codes de prescription déterminée. C'est donc bel et bien là que se joue désormais "l'état d'exception" des nouvelles sociétés de contrôle. Mais comment comprendre ce contrôle des mobilités? S'agit-il d'un nouveau type d'enfermement, d'une nouvelle forme de prise de corps, d'un abandon définitif de l'
Habeas corpus? Comment ce contrôle est-il articulé avec l'hypothèse de Carl Schmitt d'une nouvelle forme de terrorisme? Et comment penser ce nouvel état d'exception: contrôler les mobilités pour protéger l'état contre ses propres systèmes de protection? Il faut prendre la mesure de ce fait, car visiblement nous sommes prêts à payer le prix du désastre, social, économique et psychique. Ce nouvel état d'exception ne lève plus le droit, créant ce vide juridique que Schmitt, dans les années 1930, voulait combler par une état de dictature."
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire