Action
de domestiquer. « Action d'accoutumer les animaux sauvages à la
domesticité » dit le Larousse, qui nous cite le nom des animaux
dont la vie est attachée à celle de l'homme. Et, si nous regardons
au mot domesticité, nous voyons : « Etat de domestique. Ensemble
des domestiques d'une maison ». Hommes et animaux, naturellement,
car, pour le bourgeois, le « domestique » n'est ni plus moins
qu'une bête de somme, attachée au service de son maître. « Le
premier d'entre les hommes qui jeta une bride sur le cou d'un âne,
pour en faire sa bête de somme, et qui mit une livrée sur le dos
d'un lâche, pour en faire son serviteur, inventa certainement ce
qu'on appelle le principe d'autorité, en créant le domesticisme ».
(Farenthuld). L'homme serait-il inférieur à certains animaux? La
domestication du tigre, du lion, de la panthère est impossible et la
sauvagerie de ces fauves est combien supérieure à l'état de
dépendance, de servitude dans lequel vit une catégorie - et la plus
nombreuse - est-il possible de comprendre que la plus grande partie
de l'humanité se soit laissé domestiquer au point d'abandonner sa
vie et sa liberté entre les mains d'une poignée de parasites et de
privilégiés? Cela dépasse la compréhension, mais, cela est.
L'énorme majorité des hommes se trouve, vis-à-vis d'une minorité,
dans une situation inférieure, et consacre son existence à servir
cette minorité qui, en échange, lui permet de ne pas crever de
faim. Comme travail de domestication, c'est admirable. Le régime de
la domesticité évolue ; le servage a succédé à l'esclavage ; le
salariat au servage ; l'exploitation reste la même, la domestication
domine ; le principe ne change pas. Et l'on se demande parfois s'il y
a lieu de plaindre et non de blâmer ceux qui se livrent ainsi
volontairement à la domestication. Les deux peut-être. Certes, l'on
peut trouver des circonstances atténuantes aux malheureux qui n'ont
pas conscience de leur bassesse et de leur lâcheté. L'atavisme,
l'ignorance, la crainte, la faiblesse morale, physique et
intellectuelle sont des facteurs de domesticisme ; soit, mais tout de
même, en notre siècle de lumière, il n'est pas permis d'être
aussi sourd à toute raison et aussi aveugle à tout ce qui se voit.
L'ignorance absolue est une preuve de paresse, car chacun,
aujourd'hui, aussi faible, aussi dépourvu soit-il, a la possibilité
d'acquérir un minimum de connaissances et de lutter contre l'emprise
exercée par les maîtres! Non, ils n'ont pas d'excuses, les
domestiques volontaires, les heureux, les contents de leur sort et,
si nous ne souffrions pas de leur domestication, il n'y aurait qu'à
les laisser croupir dans leur crasse. Mais notre vie est intimement
liée à la leur et c'est pourquoi il nous faut continuer la lutte,
poursuivre notre oeuvre, pour jouir de notre liberté pleine et
entière, qui est subordonnée à la liberté de toute l'humanité.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire