Dans
son acception commune, ce mot signifie une opinion imposée par une
autorité en dehors et au-dessus de toute critique et de tout examen.
Dans la religion chrétienne, le dogme est une vérité révélée
par Dieu, et directement imposée, par l'Eglise, à la croyance des
fidèles. La révélation est la source du dogme, et son caractère
fondamental est l'intangibilité. Le dogmatisme catholique est
l'ensemble des dogmes préparés, définis et développés par les
Pères de l'Eglise, par les Conciles et par les Papes. Les trois
dogmes fondamentaux sont: Jésus, l’homme et Dieu ; Dieu, en une et
en trois personnes ; l'homme, tombé à cause du péché, et racheté
moyennant la grâce. Le dogme a été la base de l'intolérance
religieuse, puisque toute vérité philosophique ou scientifique
trouva dans le dogme intangible sa pierre d'achoppement. La vérité
étant unique, aucune autre vérité n'est admise. Donc, l'Eglise dit
: « Je suis en possession de la vérité, qui n'est pas avec moi est
dans l'erreur ». Combien de bûchers allumés, combien de sang a
fait verser la présomption de l'Eglise, qui, en définitive, n'était
que la présomption des prêtres installés sur les dogmes pour
guetter toute lumière de vérité nouvelle, afin de l'éteindre! Au
dogmatisme ecclésiastique s'unit le dogmatisme scientifique pendant
des siècles. A tel point que saint Thomas, les Conciles, le Pape,
infaillibles, eurent comme complice involontaire Aristote, dont les
oeuvres étaient considérées comme les colonnes d'Hercule du savoir
et de la pensée. Avec la réforme de la méthode scientifique, avec
l'hérésie religieuse et la critique philosophique, le dogmatisme se
confina dans l'Eglise. Puis vint à s'affaiblir l'éclat de
l'anathème, qui pendant des siècles avait été la foudre de Rome.
Le positivisme en philosophie, l'expérimentalisme en science ont
affranchi la pensée des dogmes religieux et scientifiques.
Aujourd'hui, l'homme cultivé ne veut plus croire en aveugle, il
demande des explications et il cherche des preuves. Le modernisme est
entré dans le corps de l'Eglise, cheval de Troie du rationalisrne.
L'histoire de la pensée est l'histoire du dogme et du libre examen
en lutte. Et l'histoire nous montre combien de fois le premier
étouffa le second en retardant la civilisation. A près Kant, le
dogmatisme a perdu sa bataille. Allons-nous vers le triomphe de la
raison? Certains courants philosophiques fatigués et les
restaurations cléricales imposées par les gouvernements
réactionnaires en certaines nations nous laisseraient redouter un
nouveau Moyen-âge, s'il n'y avait pas des courants de pensée vifs
et riches dans les pays libres, et s'il n'y avait pas beaucoup
d'hommes qui ne cessent de lutter contre la tyrannie. Mais s'il est
naturel d'espérer en demain, certains que le patrimoine de la pensée
ne peut subir les catastrophes des systèmes politiques, nous ne
devons pas ignorer combien il est nécessaire d'intensifier la lutte
contre le dogmatisme. Le bolchevisme en Russie, la tyrannie
jésuitique fasciste en Italie, la dictature clérico-militaire en
Espagne sont la preuve que la civilisation ne va pas du même pas que
le progrès. Le dogme est là, protéiforme et tenace. Il est là,
mais il est en nous aussi.
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C. B.
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