Sur
la Grève Générale
« cette
définition si nette et si claire, que contient une communication du
syndicat des maçons de Reims, partie dans la Voix du Peuple, organe
de la Confédération générale du Travail, du 8 mai 1904. Rendant
compte d'une causerie, il est dit « Passant en revue les questions
portées à l'ordre du jour du Congrès de Vichy, Guyot explique que
la grève générale ne peut être que la Révolution elle-même,
car, comprise autrement, elle ne serait qu'une nouvelle duperie. Des
grèves générales corporatives ou régionales la précéderont et
la prépareront.»
«La
grève générale, dans son expression dernière, n'est pas pour les
milieux ouvriers le simple arrêt des bras; elle est la prise de
possession des richesses sociales mises en valeur par les
corporations, en l'espèce les syndicats, au profit de tous. Cette
grève générale, ou révolution, sera violente ou pacifique selon
les résistances à vaincre. Elle sera la totalisation des efforts
des producteurs sous l'impulsion des groupements ouvriers. »
sur
le Patriotisme :
« Par
conséquent, tout le problème social se pose à moi dans des
conditions tirées de mon savoir, de mes. moyens d'existence, de mes
besoins. Et, comme mon savoir n'est pas celui d'un Jaurès, comme mes
moyens d'existence ne sont pas ceux d'un Gérault-Richard, comme mes
besoins ne sont pas ceux d'un Schneider, je ne conçois pas l'idée
de patrie comme eux. »
«La
patrie, dit-on, est l'ensemble des traditions, le patrimoine d'un
peuple; elle est une portion du sol de notre planète; elle est le
lieu où l'on vit en assurant à notre être les satisfactions
nécessaires. Or, les traditions morales de notre pays et son
patrimoine m'échappent, faute de pouvoir les saisir et les
comprendre la moindre parcelle du sol ne m'appartient pas,
et la vie qui m'y est faite
est loin de réunir les satisfactions indispensables. Je suis
étranger à tout ce qui constitue le rayonnement moral de ma
nation, je ne possède rien, je dois vendre mon travail pour faire
face à mes besoins les
plus
stricts. Donc,rien de ce qui, pour certains, forme une patrie
n'existe pour moi. Je ne puis pas être patriote.
Pourquoi
serais-je patriote? Pour défendre ce fameux patrimoine moral, nos
libertés? Mais de chaque côté des frontières, chaque peuple parle
de son patrimoine moral. »
Les
syndicats et le parti socialiste :
« N'était-il
pas préférable, pour les dirigeants, de codifier, sous des
apparences libérales, le progrès qui pousse les hommes vers un
meilleur avenir, de régler l'usage de ce progrès, en essayant d'en
diminuer le courant et d'en amoindrir la force? On sait que ce
libéralisme, pas plus que la répression méliniste, n'a atteint son
but. Malgré des dissentiments inévitables, le mouvement ouvrier a
grandi, et il a grandi parce qu'il y a eu ce libéralisme
corrupteur,contre lequel il s'est dressé. La loi de 1884 avait pour
but de réglementer, en le paralysant, l'usage du droit
d'organisation; elle voulait lui donner un caractère étroit et un
rôle limité. De même, la loi sur les associations et la loi sur la
séparation ont eu pour but d'enlever à l'Église une partie de sa
puissance, et non de permettre l'exercice normal et perfectible de la
religion. La loi autorise le syndicat à faire telle ou celle besogne
dont le choix appartient au gouvernement et lui interdit telle autre
dont le choix lui appartient également. Naturellement, dans ces
choix, la bourgeoisie s'est inspirée de ses intérêts et, en
établissant un cadre, elle a posé une barrière, espérant qu'elle
constituerait une digue la protégeant contre les luttes
ouvrières. »'
«Les
syndicats, dans leur grande majorité, ont depuis longtemps brisé le
cadre de la loi; ils ont dépassé le but assigné par le pouvoir;
ils ont lutté et combattu en dépit de la loi, le plus souvent
contre l'esprit de la loi. Ils n'ont, à aucun moment, voulu
respecter la légalité et ils ont défendu les intérêts ouvriers.
En combattant, sont-ils, dans des circonstances, restés dans les
attributions légales? C'est à voir. Mais ont-ils lutté sans tenir
compte de la légalité, renversant les résistances légales pour ne
s'incliner que devant la force? C'est certain. Une illégalité est
commise, lorsque les travailleurs en grève emploient tous les moyens
pour amener à eux d'autres travailleurs, et ils emploient tous les
moyens, non parce qu'ils sont permis ou défendus,mais parce qu'ils
leur sont imposés par les conditions mêmes du combat. »
«De
là, le projet sur l'arbitrage obligatoire et la réglementation des
grèves, tendant, par un mécanisme compliqué, à rendre impossible
tout conflit. Puis, selon la formule du maître « II faut que le
capital travaille et que le travail possède », on a parlé de
capacité commerciale,afin de faire pénétrer dans les syndicats
l'esprit mercantile du négoce. »
Sur
les relations internationales des syndicats :
28
août 1907.
Camarade
secrétaire,
Comme
vous, la Confédération Générale du Travail de France a reçu du
Bureau international une invitation à se faire représenter à la
Conférence internationale qui se tiendra le 16 septembre, à
Christiania.
Cette
invitation ayant été soumise au Comité confédéral, celui-ci,
s'inspirant du vote émis à son Congrès national, qui s'est tenu à
Amiens, en septembre 1906, a décidé de ne pas se faire représenter
à Christiania, mais en même temps de faire connaître aux
organisations ouvrières des différentes nationalités les motifs de
sa non participation.
Vous
vous rappelez sans doute, camarade, certains incidents de la
Conférence de Dublin ( 1903) sur lesquels nous ne voulons pas
revenir. A cette Conférence, nos délégués avaient mandat de
présenter un rapport sur l'antimilitarisme et sur la grève
générale, rapport avec texte en français, en allemand et en
anglais, qui, par suite du mauvais fonctionnement de cette
Conférence, ne put pas même être déposé.
Lorsque
nous parvint l'invitation d'assister à la Conférence d'Amsterdam
(1905), le Comité confédéral fut amené à poser comme condition
de sa participation,la mise en discussion des deux questions
rappelées plus haut, auxquelles, vu l'actualité, était ajoutée la
« journée de huit heures ». Nos propositions transmises au
secrétaire international le camarade Legien, celui-ci répondit par
un refus. Cependant, devant l'insistance du Comité confédéral, il
consentit à consulter les Centres syndicaux nationaux.
Toutefois,
au lieu de conserver la neutralité qui convenait en la circonstance,
le camarade Legien voulut influencer la décision à intervenir en
faisant connaître son avis, en même temps qu'il envoyait le
referendum, Aucune réponse n'étant parvenue en France, une lettre
envoyée au dernier moment par Legien lui fut retournée pour
insuffisance d'adresse. La Confédération Générale du Travail de
France ne crut pas devoir se faire représenter à Amsterdam. A cette
Conférence, le secrétaire international proposa et fit décider, au
nom de l'Allemagne, que désormais les Conférences internationales
ne seraient plus appelées à discuter des questions de principe et
qu'elles se borneraient à étudier des points d'administration
syndicale. Dans cette décision, les organisations ouvrières
françaises virent une violation de l'autonomie des organisations
nationales, et aussi l'inutilité des Conférences organisées dans
ces conditions.
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