Le
Carême consiste en quarante jours de jeûne ou d'abstinence,
prescrit par l'église catholique, avant les fêtes de Pâques. On
ignore son origine, mais certains théologiens le font remonter au
temps des apôtres. Ce ne fut qu'au Concile de Nicée, en l'an 325,
qu'il reçut le sceau légal de l'Église. Durant ces quarante jours,
il est interdit de manger d'autre chair que celle du poisson, à
laquelle on peut ajouter des oeufs, des fruits et des légumes. En
vérité, de nos jours, le carême n'est plus observé que par de
vieilles bigotes, et encore pas toujours, car il est des
accommodements avec le ciel, et l'Église ne refuse jamais, moyennant
finance, d'accorder des dispenses aux fidèles qui en demandent.
En
un temps, le carême eut sans doute une certaine utilité et
répondait à une nécessité sociale. À l'époque où l'ignorance
régnait en maîtresse sur le monde, il est possible que le
législateur religieux ait prescrit le jeûne et l'abstinence, pour
réfréner les bas instincts de l'homme, en imposant un peu d'hygiène
et de décence publique. Durant le carême, il n'était pas seulement
interdit de manger certains mets, mais il fallait se priver
également, selon les lois de l'église, de tout amusement, sortie,
récréation, et s'abstenir de tout contact charnel. De cette
dernière mesure subsiste encore l'interdiction de se marier durant
le carême.
Des
prescriptions similaires se retrouvent dans toutes les religions. Les
Juifs doivent également jeûner plusieurs jours par an ; les
Mahométans ont le « ramadam », et les Bouddhistes exercent
les mêmes pratiques. Il semble donc bien que le carême n'est pas
d'essence spécifiquement chrétienne, mais qu'il fut institué bien
avant le Christianisme et avait pour but d'élever le moral de
l'espèce humaine.
En
vertu de vieilles coutumes, entretenues par certains intérêts
commerciaux, on continue dans certains pays à ne pas manger de
viande le Vendredi Saint, précédent le dimanche des Pâques. En
dehors de ce jour, le carême religieux a vécu. Mais il est des
malheureux que leur situation oblige à faire carême d'un bout de
l'année à l'autre. Le travailleur est contraint par la société de
s'abstenir de manger à sa faim, cependant que les magasins regorgent
de vivres, de vêtements, de nourriture. Si le carême religieux a
disparu, le carême social subsiste, et il faut le détruire comme le
premier. Ce sera l'oeuvre des Anarchistes.
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