jeudi 3 mai 2018

Journal de la Commune


On lit dans la Commune :

« Les efforts tentés par M. Jules Favre, pour chercher dans l’intervention prussienne un point d’appui contre la Révolution du 18 mars, vont enfin être percés à jour. Interpellé, dans la séance nocturne du 23, sur la communication officielle du quartier général prussien au Gouvernement de l’Hôtel-de-Ville, le ministre de la capitulation n’a pu que se réfugier dernière des faux-fuyants pour faire concorder ce document avec celui dont il avait donné lecture la veille. A la déclaration si catégorique du commandant prussien, il n’a trouvé à opposer que deux dépêches de Berlin et de Rouen, dans lesquelles l’autorité prussienne se réserve le droit de réprimer l’émeute de Paris.
Ces réserves sont formulées en ces termes par la Gazette de l’Allemagne du Nord, organe officiel de M. de Bismarck : « IL EST DE LA PLUS GRANDE IMPORTANCE POUR NOUS QUE LE NOUVEAU GOUVERNEMENT DU COMITÉ CENTRAL DE PARIS AIT AUSSI L’INTENTION D’EXÉCUTER LE TRAITÉ DE PAIX.
« NOUS POURRONS DONC TRANQUILLEMENT ATTENDRE LA MARCHE ULTÉRIEURE DES CHOSES. »
Mais une révélation bien autrement grave nous est rapportée par un journal anglais, le Weekly Lloyd, que nous traduisons fidèlement pour l’édification de ceux qui, jusqu’à ce jour, ont eu des yeux pour ne point voir et des oreilles pour ne point entendre.
Voici ce que dit le journal anglais :
« Le comte de Bismarck en arrivant à Berlin s’entretint avec les notables qui sollicitaient l’autorisation de présenter leurs hommages au chef diplomatique de la campagne. A l’un, le chancelier fédéral affirmait que la Champagne ne serait pas longtemps occupée, attendu que la France payerait certainement l’indemnité aussi tôt que possible.
« À d’autres, M. de Bismarck confia que L’ASSEMBLÉE NATIONALE AURAIT PRÉFÉRÉ VOIR LA PRUSSE OCCUPER PARIS, DÉSARMER LA GARDE NATIONALE PLUTÔT QUE DE S’INCLINER DEVANT L’OPINION RÉPUBLICAINE. »
Ces lignes portent tout naturellement à croire que le gouvernement et l’Assemblée ont pu s’entendre avec M. de Bismarck pour étouffer la révolution et assassiner la République.
Le journal anglais nous donne lui-même à ce sujet tous les renseignements désirables.
Continuons :
« Nous sommes en mesure, écrit-il, d’affirmer, de façon à défier même un démenti de l’ambassadeur que M. Thiers s’est cru le devoir d’envoyer à Londres, que ce sont bien MM. Jules Favre et Thiers qui ont fait au comte de Bismarck L’OUVERTURE DONT IL EST QUESTION CI-DESSUS, c’est-à-dire de lui livrer Paris, en s’autorisant de l’opinion de la majorité de l’Assemblée nationale.
« Quant à la réponse de M. de Bismarck à ces attrayantes ouvertures, elle serait navrante pour M. Thiers. Il aurait, assure-t-on, répondu que les affaires intérieures de la France ne le regardent pas, que d’ailleurs les hommes du Comité central, Assi entre autres, n’ont trompé personne ; que lorsque MM. Jules Favre et Thiers ont accepté, — alors qu’on vantait leurs vertus, — ces hommes intègres, comme instruments de leur opposition à l’Empire, ils ne le faisaient qu’au point de vue de leurs intérêts personnels ou dynastiques. Que, dans ce cas, le Comité central est encore le pouvoir qui lui inspire le plus d’estime ; qu’à peine vainqueur, il parle de s’effacer, tandis que vaincus par le ridicule, après avoir été déshonorés par le crime, les hommes du 4 septembre s’obstinent à vouloir demeurer! »
Il résulte donc de l’opinion du journal anglais que le patriotisme de Versailles équivaut à un patriotisme monarchique. Le roi avant tout, même avec le Prussien, et meure la France si l’on peut crier Vive le roi !
Aujourd’hui, ils envoient l’amiral Saisset pour parlementer.
Méfions-nous d’un parlementaire qui se présente l’arme au poing. Cette concession cache une surprise, un piège ; ne nous y laissons pas prendre.

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