Ingénuité,
confiance naïve. L'homme candide est sans défiance et accepte
aveuglément ce qu'on lui dit. Si la candeur dénote une bonne
nature, elle n'en est pas moins un défaut, car elle permet à une
caste d'intrigants d'opérer impunément par le mensonge et la
tartuferie. Le peuple est, hélas, affligé de beaucoup trop de
candeur. Malgré qu'il ait été trompé mille et mille fois, il
suffit qu'un charlatan se présente pour qu'il se laisse de nouveau
berner. Il accepte comme argent comptant les promesses les plus
fantaisistes et les déclarations de foi les plus suspectes. Rien ne
décourage sa confiance tenace. Parfois une brève colère le fait se
dresser quand il s'aperçoit qu'il vient d'être dupé, mais que,
l'instant d'après, le même homme qui l'a trompé vienne lui donner
de fallacieuses explications et voilà de nouveau le peuple prêt à
écouter des boniments. Candeur : voter pour des politiciens de
droite ou de gauche qui cherchent uniquement à satisfaire leur
ambition.
Candeur
: accepter les discours de soi-disant « ministres de Dieu sur la
terre ». Candeur : se figurer que les guerres ont pour objet de
défendre la « patrie » alors que seuls sont en jeu des trusts ou
des compétitions financières. Candeur : croire exactes des
informations que publie une presse vendue aux puissances
capitalistes. Candeur : considérer comme des actes de justice les
jugements partiaux et criminels d'un tribunal ou d'un jury. Etc...
Seule la candeur de la foule permet à certaines institutions de
continuer leur besogne néfaste. Le jour où tous les hommes jugeront
sainement, en
pesant
soigneusement les arguments, en examinant froidement les choses et
les gens, ce jour-là ils se demanderont comment ils ont pu être les
victimes de mensonges aussi grossiers. Leur candeur aura fait place à
une raison saine et clairvoyante. Le règne des charlatans aura vécu.
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