Corps
susceptible de faire explosion. D'après l'expérience courante, un
explosif est un corps capable de réaliser, par sa décomposition, un
violent déplacement de matériaux ; cet effet résulte d'une
augmentation considérable du volume de l'explosif qui, pendant sa
décomposition, passe brusquement de l'état solide ou liquide à
l'état gazeux, en exerçant une forte pression sur les matériaux à
déplacer. De tels corps, capables d'une décomposition brusque, sont
naturellement dans un équilibre moléculaire très instable, tandis
que leur destruction violente donne naissance à des corps qui sont
dans un équilibre moléculaire très stable. Or, d'après les
principes de thermochimie, un tel changement d'équilibre
s'accompagne d'un grand dégagement de chaleur qui, portant à une
haute température les gaz produits, augmente énormément leur
pression et, par suite, la puissance de l'explosif. Nous retrouvons
ainsi, en partant de notions de sens commun, la définition classique
des explosifs donnée par Sarrau : « On appelle explosif tout corps
capable de se transformer rapidement en gaz à haute température ».
Il y a deux classes d'explosifs : les explosifs de chargement et les
explosifs de détonation ou d'amorçage... Il n'y a d'ailleurs pas de
différence essentielle entre ces deux catégories, et tel explosif,
comme le coton-poudre par exemple, se classe dans l'une ou dans
l'autre catégorie, suivant la forme physique qui lui est donnée.
Quelle que soit la stabilité relative des explosifs de chargement,
quelle que soit la sécurité habituelle de leur emploi, on ne doit
jamais oublier, en les manipulant, qu'un explosif, par sa définition
même, est un corps en équilibre instable et dont la moindre
imprudence peut provoquer la décomposition. (Paul Vérola : Chimie
et fabrication des explosifs, A. Colin 1922) ». Les explosifs
doivent présenter les qualités de stabilité suivantes : 1° Ne pas
détoner entre bois et fer sous un choc inférieur à 2 kilogr. par
centimètre carré. 2° Ne pas détoner par décomposition spontanée
par suite de l'excès de l'un des réactifs ou d'une impureté de
l'un de ceux-ci. 3° Résister pendant dix minutes au moins à une
température de 700°. Les matières premières utilisées dans la
fabrication des explosifs peuvent être classées de la façon
suivante : 1° Matières combustibles : charbon, soufre. 2° Sels
oxygénés : Nitrate de potasse ou salpêtre, de soude, d'ammoniaque,
de baryte, chlorate de potasse, fulminates, picrates. 3° Pyroxyles
et matières organiques nitrées : Fulmicoton, fulmipaille, fulmison,
fulmibois, nitroglycérine (C³H² [Az O³ H]³), nitrosaccharose,
nitromannite. Jusque vers la fin du dernier siècle, il n'existait
qu'un explosif : la poudre noire, et sa fabrication, améliorée au
cours des âges, avait acquis une perfection telle que cet explosif
s'adaptait à tous les besoins. Aujourd'hui, ces poudres ne
présentent qu'un intérêt très relatif pour les besoins de la
guerre, mais elles servent encore pour les armes de chasse.
D'ailleurs, elles présentent un certain nombre d'avantages : prix de
revient minime, fabrication facile et peu dangereuse, étant donné
leur insensibilité partielle aux flottements et aux chocs, stabilité
considérable et conservation commode ne nécessitant que l'abri de
l'humidité. Voici quelques formules: Poudre grise ordinaire :
Salpêtre 74,84. Charbon 13,32. Soufre 11,84. Salpètre 78,99.
Charbon 11,17. Soufre 9,84. Poudre de guerre : Canon = Salpêtre 75.
Soufre 12,5. Charbon 12.5. Fusil = Salp. 74. Soufre 10,5. Charbon
15,5. Poudre de chasse : Salpêtre 78. Soufre 10. Charbon 12. Poudre
de mine : Salpêtre 65. Soufre 20. Charbon 15. Poudre allemande de
1883 : Salpêtre 76. Soufre 9. Charbon 15. Poudre russe d'Ochta :
Azotate de potasse 75. Soufre 10. Charbon 15. Poudre de la marine
italienne, dite H/57: Salpêtre 77. Charbon 20. Soufre 3. Poudre
Pebble : Salpêtre 76.50. Soufre 10,25. Charbon 13,25. On a proposé
un grand nombre de modifications de la poudre grise ordinaire. Une
des plus importantes est sans contredit la « poudre chocolat »,
poudre brune « brown powder », ou « cocoa powder » ; inventée en
Allemagne en 1882. Sa composition est la suivante : Azotate de
potasse 79. Soufre 3. Charbon 18. A la même poudre se rattache la
poudre sans fumée C. S. ou « Chilworth special powder ». Elle est
formée de : Azotate de potasse 42. Azotate d'ammoniaque 38. Charbon
rouge 20. Poudre de Schwartz : Azotate de Potasse 48,6. Azotate de
soude 26,5. Soufre 9,2. Charbon 15,7. Poudre de Freiberg : Azotate de
soude 64. Soufre 18. Charbon 18. Poudre amide ou Gabe : Azotate de
potasse 101. Azotate d'ammoniaque 80. Charbon de bois 40. Poudre S.
A. 152 : Azotate de potasse 62. Azotate d'ammoniaque 11. Charbon
24,3. Soufre 1,3. Résine 1,3. Poudre Wynani : Azotate de Baryte 77.
Azotate de potasse 2. Charbon de bois 21.
Poudre Küp:
Azotate de baryte 80. Soufre 10. Charbon 10. Xantine : Azotate de
potasse 68,5. Xantate de potasse 27,4. Charbon de bois
4,1.
Poudres
chloratées D'une puissance beaucoup plus considérable que les
poudres ordinaires, elles ont des effets trop brisants. Un choc ou un
frottement suffisent à provoquer leur explosion : Poudre Cossigny :
Chlorate de potasse 75. Soufre 12,5. Charbon 12.5. Poudre de Kohler :
Chlorate de potasse 70. Soufre 20. Charbon 10. Poudre Mundel :
Chlorate de potasse 63,5. Soufre 31.5. Noir animal 1. Poudre de
chasse ord. 4. Poudre Hahn : Chlorate de potasse 36.7. Sulfure
d'antimoine 169. Charbon 18. Spermaceti 46. Rackarock : Chlorate de
potasse 87,5, 83,4, 89,3, 23,5. Huile de naphte 12,5, 8,3.
Nitrobenzine 8,3, 76,5. Térébenthine 10,7. Poudre Gallica :
Chlorate de potasse 75. Noix de galle pulvérisée 25. Poudre
Maréchal: Chlorate de potasse 84. Acide stéarique 16. Poudre
Monnier : Chlorate de potasse 71. Sucre 16. Charbon 6. Goudron de
houille 7. Bellfords powder : Charbon en poudre 19,5. Salpêtre 68.
Soufre 12,5. Poudre blanche anglaise : Chlorate de potassium 50.
Ferrocyanure de potassium 25. Sucre raffiné 25. Poudre de Pohl :
Chlorate de potasse 49. Ferrocyanure de potassium 28. Sucre de canne
23. Poudre de Feutons : Chlorate de potassium 16. Ferrocyanure de
potassium 4. Sucre 4. Il y a encore une quantité considérable de
poudres. On trouve dans le commerce des ouvrages très documentés.
Si l'on en croit certains auteurs, les révolutionnaires ont la
curiosité de savoir et la composition et l'emploi des explosifs ;
ils trouveront des ouvrages de vulgarisation dans les livres du Génie
militaire et de l'Artillerie.
- A.
LAPEYRE.
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