« On n’a peut-être pas
suffisamment montré que le colonialisme ne se contente pas d’imposer sa loi au
présent et à l’avenir du pays dominé. Le colonialisme ne se satisfait pas
d’enserrer le peuple dans ses mailles, de vider le cerveau colonisé de toute
forme et de tout contenu. Par une sorte de perversion de la logique, il
s’oriente vers le passé du peuple opprimé, le distord, le défigure, l’anéantit.
Cette entreprise de dévalorisation de l’histoire d’avant la colonisation prend
aujourd’hui sa signification dialectique. Quand on réfléchit aux efforts qui
ont été déployés pour réaliser l’aliénation culturelle si caractéristique de
l’époque coloniale, on comprend que rien n’a été fait au hasard et que le résultat
global recherché par la domination coloniale était bien de convaincre les
indigènes que le colonialisme devait les arracher à la nuit. Le résultat,
consciemment poursuivi par le colonialisme, était d’enfoncer dans la tête des
indigènes que le départ du colon signifierait pour eux retour à la barbarie,
encanaillement, animalisation. Sur le plan de l’inconscient, le colonialisme ne
cherchait donc pas à être perçu par l’indigène comme une mère douce et
bienveillante qui protège l’enfant d’un environnement hostile, mais bien sous
la forme d’une mère qui, sans cesse, empêche un enfant fondamentalement pervers
de réussir son suicide, de donner libre cours à ses instincts maléfiques. La
mère coloniale défend l’enfant contre lui-même, contre son moi, contre sa physiologie,
sa biologie, son malheur ontologique. »
"Tout abandon de principes aboutit forcément à une défaite" Elisée Reclus "Le dialogue, c'est la Mort" L'injure sociale
lundi 23 août 2021
Les damnés de la terre par Franz Fanon
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