Pour en finir avec le
froid… PARTIE I
Dimanche 18 décembre 2022
Je commence un journal parce
que j’ai froid
Je commence un journal parce
que j’ai froid sans qu’il n’y ait aucun espoir que celui-ci cesse de quelque
façon que ce soit
Et ce n’est pas en courant
ou en marchant dans le froid même couvert que celui-ci va s’arrêter puisqu’il
vient de l’intérieur
C’est un froid qui est en
moi c’est un froid qui est moi.
Pourquoi un journal alors
pourquoi un journal
Parce qu’un journal est un
chemin vers la fin il est daté car il va
prendre fin un jour un jour je dirais c’est la fin
Je le dirais parce que je
parle plus que je n’écris je parle car je suis seule et la compagnie c’est la
mienne unique enveloppante terrifiante je n’ai qu’une voix une seule qui ne
cesse de m’appartenir elle n’appartient à personne d’autre
Donc je marche et je suis
couverte parce que j’ai froid
Celui-ci va durer tant que
durera ma vie il ne cessera qu’avec ma vie
Je ne suis plus une animale
qui pense qui croit qui n’a pas envie de ne pas croire en la vie je suis
humaine donc je crois que j’ai ce pouvoir de mettre un terme à cette souffrance
Depuis quand est-elle
là dans ma chair à me mordre
J’en ai été insensibilisée
de par ma volonté humaine de la rendre sourde et parfois supportable
Mais mon humanité ma part
humaine a mis à mort ma part animale
Celle qui aurait fait que je me terrais pour
me soigner que je me tairais pour ne pas gêner me cacher pour panser mes plaies
ne pas penser mes plaies
Penser mes plaies pour
souffrir encore plus de ce froid
A la limite je ne suis déjà
plus cette humaine qui marche dans le froid je suis au-delà de l’humanité j’ai
dépassé des bornes infranchissables il y a quelques mois encore
Aujourd’hui j’écris mon
journal pour en dater le début mais surtout la fin essentiellement la fin
Déterminer la possibilité
d’une fin c’est encore espérer de vivre de pouvoir mettre un terme à ce journal
sans mettre un terme à la vie à sa vie
Elle marche pour décider
qu’elle ne pourra pas mourir
Mais elle en croise d’autres
des compagnons de journaux des compagnons de la souffrance intérieure de ces
froids infinis que puis-je faire pour eux pour nous quand je ne peux rien pour
moi
Nous ne sommes pas ensemble
nous sommes les solitudes qui se croisent ne se parlent pas sont dans la
volonté de l’ultime anonymat dans la volonté forcenée de ne rien voir et
surtout pas les semblables
Je ne suis qu’une pour ne
pas être autre je ne suis pas eux car je ne pense être que moi
Pour en finir avec le
froid… PARTIE II
Dimanche 18 décembre 2022
Comme un dimanche maudit qui
n’a jamais fait que commencer de s‘étirer et de se finir par cette
« ballade » que je décris ci-dessus
Ce matin donc lorsque le
froid m’a saisi et m’a jeté hors de mon petit confort chèrement préparé
chèrement agencé
L’évidence était que ce jour
ne serait jamais fini il puait déjà l’évidence de la journée sans fin
Je n’ai pas allumé je me
suis vêtue des habits de la veille terne gris sans couleur
Juste cette parka qui est
d’un rose sans avenir passé lavé délavé pleuré coulant
Je n’ai pas allumé et j’ai
pris un café debout près du micro-onde
Micro-onde qui ne projette
pas la chaleur et qui fonctionne même sans chaleur
Le micro-onde parfait objet
de la société actuelle complice de névroses complice de vies tristes au cours ininterrompu
J’ai posé le bol dans
l’évier je vais passer la matinée à attendre cette partie d’après-midi où je pourrais me prouver en marchant que la
vie est encore dans le mouvement
Dans une fuite sans but sans
paysage sans couleur
L’hiver est ma matière
préférée grise humide froide inhumaine incertaine
Noel n’est juste que cette
plainte que je ne veux plus entendre et qui monte jour après jour dans les
« foyers »
La course à la larme à la
famille soudée ressoudée
Où les absents qui n’ont
rien demandés sont de nouveau convoqués sans espoir de pouvoir dire non
Il faut dans cette société
que des lumières transpercent ce gris
Il faut que dans ce froid
ces couleurs froides on aperçoive comme un phare une lumière une étoile
Comme si la société voulait
nous faire croire à une suite heureuse à
une suite pour le moins
Pour en finir avec le
froid… PARTIE III
L’année suivante un jour de
plus qui est passé et on dit une année change mais rien ne change qui ne doit
pas changer
Ni la force
Ou ni le secours
La nécessité de mettre un
terme à ce froid ce froid intérieur et mortel
Il ne suffirait d’un rien un
petit rien
Elle est prête et elle se
contenterait
Il y a le froid de ceux qu’elle
croise
Elle n’est pas seule
Et puis une sensation qui
vient à contre sens elle cherche elle explore et elle a ce sourire blafard que
seuls les morts savent offrir à ceux qui restent à ceux qui luttent à ceux qui
pleurent
Elle a ce sourire blafard de
ceux qui ne savent pas qu’il existe peut-être quelque chose ailleurs loin d’ici
dans un autre compartiment de la vie
Et ce froid intense qui en
croise un autre et ce sont deux sourires qui se réchauffent et soudain jaillit
le rire celui que nul ne peut contenir ce rire de deux personnes qui s’enivrent
l’une de l’autre
Et ce froid qui à jamais
malgré sa présence ambiante ne rentrera plus jamais dans son cœur dans leur cœur
Ils sont deux ils sont deux
fléaux des morosités des sans-gênes de la douleur de la souffrance que l’on
veut imposer
Ils sont la force de la
solution la fin de la morosité
Rien jamais ne pourra les
atteindre malgré le froid malgré l’effroi les froids
De ceux qui ne vivent pas de
ceux qui ne savent pas vivre car ils avalent ils ingurgitent du prémâché ils recrachent du consensuel
Ils créent de la grisaille à
tour de bras de par leur seule volonté aphone desséchée incolore
Insipide
Et ces deux nouveaux rires
fendent tout cela de manière indécente violente insupportable à jamais
inhumaine dans ce siècle tragédie
Pour en finir avec le froid…pour
en finir avec le froid…
M.A 01/01/23
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