mardi 24 janvier 2023

NATURIANISME (Néo) encyclopedie anarchiste de Sébastien Faure

 


Défini aujourd'hui comme une conception philosophique et sociale, basée sur la vie naturelle, dans le sens le plus tolérant du mot, le néo-naturianisme est étymologiquement récent, et théoriquement plus jeune encore.

Comme le naturianisme d'Emile Gravelle - dont il dérive - il est d'origine et d'essence libertaires. En tant que locution, ce néologisme fut créé et employé par Henri Zisly, dans son périodique La Vie Naturelle (n°5, déc. 1911), lequel créa aussi les termes « Libertaires naturiens » en 1900 et « Libertaires antiscientifiques » (Vie naturelle, 1907).

Cependant les bases du néo-naturianisme étaient à définir, les principes à formuler, et les néo-naturiens de l'époque - peu ou pas différents des naturiens semblent n'avoir pas voulu s'y soumettre ni s'y adonner, connue la déclaration suivante paraît vouloir l'indiquer, pou r l'histoire de ce mouvement : « Nous expliquons les gestes naturels, mais nous n'établissons ni une théorie, ni un système, car nous vulgarisons en même temps toutes tendances vers une vie naturelle : Naturianisme, Vie simple, Néo-Naturianisme ou Naturianisme libertaire, Vie nomade, Naturianisme égalitaire, Sauvagisme,Végétarisme, Fruitarisme, Antivivisectionnisme, Culture physique, etc .. . Nous sommes Néo-Naturiens, c'està-dire des anti-sectaires, enregistrant tout mouvement se manifestant vers une vie harmonieuse et anti-artificielle, et nous mêlant parfois, si nous le jugeons utile, aux événements sociaux d'actualité. Si nous sommes scientifiques de par notre étude des lois naturelles, nous sommes anti-scientifiques en ce sens que nous condamnons l'industrialisme obligatoire et collectif, contraire à une existence libre et heureuse ». (Zisly, La Vie naturelle, n° 5, déc, 1911.)

A noter que cette déclaration ne répudie plus le végétarisme, alors que le naturianisme d'antan comportait des déclarations anti-végétariennes.

Il faut attendre l'année l920 pour voir se créer un mouvement néo-naturien. Jusqu'à cette époque, le néo-naturianisme fait peu parler de lui, le naturianisme ayant davantage influencé et laissé dans les milieux libertaires des traces plus certaines.

En effet, fin d'année 1919, dans la petite commune de Chatillon-sur-Thouet, voit se fonder Le Néo-Naturien, revue qui arborait fièrement en son frontispice, la devise « Beauté-Liberté », « Art et Nature » ; elle avait groupé une collaboration éclectique et répandait les différentes conceptions de la vie naturelle.

Parmi ses collaborateurs parisiens, figuraient les pionniers du végétalisme alors naissant : G, Butaud, S, Zaïkowska et L. Rimbault ; Henri Zisly, vétéran du naturianisme ; Gérard de Lacaze-Duthiers, créateur de l'Artistocratie ; Aug. Trousset, auteur de « Civilisation et Naturianisme » ; des végétariens, etc ...

Le Néo-Naturien, par sa tenue, par ses informations provenant des cinq parties du monde, puis par ses travaux - dans lesquels le néo.naturianisme fut développé et créé théoriquement - devint la revue mondiale du néo-naturianisme ; c'est de cet organe que devaient partir également les premières idées naturocratiques, tentative de vulgarisation de l'étude naturographique et l'embryon de l'Internationale naturophile.

Le néo-naturianisme sut rester éclectique et tolérant, et son organe contribua largement à répandre le végétalisme. Comme le naturianisme, il est anti-scientifique ; mais, à l'encontre de ce dernier, il possède peu de théoriciens. Le néonaturianisme n'est pas mystique, il n'a pas de règles de vie monastique, pas de religiosité, il porte en ses formes, en ses façons de s'exprimer, une certaine jovialité, qu'il hérita du naturianisme. Comme lui, il n'est pas puritaniste, il échappa aux momifications où certains mouvements végétarianistes et naturistes, sous l'influence de principes - pour la plupart - d'origine angle-saxonne se réfrigérèrent dans une sorte d'anabiose.

Il a encore en lui les empreintes du gavrochisme et de la bohème, où son enfance s'ébaucha parmi les novateurs parisiens, avec l'artiste Em. Gravelle, le chansonnier montmartrois et rabelaisien Paul Paillette, Beylie, Ichalanda, Bonnery, Fouques jeune ; puis, plus tard, Aug. Trousset.

Il n'existe pas de mystique naturianiste. Le néo-naturianisme est éclectique dans ses principes comme dans ses applications ; pas d'exclusivisme alimentaire, végétaliste ou autre, pas de dogmes, pas d'absolutisme., Il fait sien tout ce qui peut constituer la vie des hommes hors des villes infernales, parmi les bois, les plaines, les rivières et les côtes ; il admet la pêche, la chasse, les cultures simples, l'apiculture. La vie au grand air, le camping, la liberté sont ses assises.

Protecteur de la forêt, du fruit, des végétaux sauvages, des oiseaux insectivores, il combat le déboisement, la pollution de l'air et des cours d'eau.

Dans la famille naturophile, il fait bon voisinage avec le végétalisme, le fruitarisme et le naturocratisme.

Dans la grande famille libertaire, il lutte fraternellement aux côtés des autres tendances.

Le néo-naturianisme est un réactif contre notre époque de décadence et de dégénérescence, contre la vie de laideur que crée notre société industrialiste standardisée, taylorisée, où l'individu est broyé.

A la ville tentaculaire, au luxe insolent,, au mensonge, à la chimie meurtrière, à la vie artificielle, aux forces du mal et de la contrainte, le néo-naturianisme oppose son principe de vie: « La Liberté dans la Nature ».

- Henry LE FÈVRE

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