samedi 27 octobre 2018

Recherche Libertaire N°2 Février 1967



« Une philosophie authentique, une philosophie en actes, est un effort pour situer dans la totalité de son monde et proposer des solutions lui permettant de s'y affirmer.Pour développer une philosophie libertaire actuelle, nous devons tenir compte de la somme d'expérience et de réflexion exprimée dans la pensée contemporaine. Le vase clos c'est le ressassement stérile d'un passé appauvri, la mort par asphyxie ».


« L'homme travailleur, organisateur de la rationalité de son monde , se heurte inévitablement à une limite qui est la mort. Dans le monde organisé en vue de l'existence humaine, la mort apparaît comme l'absolu scandale. L'irruption soudaine de la violence incontrôlable dans le monde de l'ordre. L'existence du cadavre témoignant de la mort, l'horreur qu'inspire la mort est vécue comme l'horreur du cadavre, signe de la mort ; cette qualité de signe de la mort faisant du cadavre un objet fondamentalement différent de tout autre objet et les cérémonies entourant le cadavre ont pour but la conjuration de la violence présente signifiée par la mort ».

« La transgression s'organise sous forme d'un rituel dont les occasions sont codifiées et les limites parfaitement définies. La transgression garde un aspect ambigu : elle lève l'interdit tout en le conservant, que l'interdit porte en lui la transgression ».

« Sur le plan sexuel, la classe capitaliste est obligée de renforcer l'interdit. Toute énergie humaine doit servir le capital. La répression atteint des sommets jamais approchés auparavant. La capitalisme crée des idéologies, chrétiennes, ou athées, sous le nom de puritanisme en hommage à la plus fanatique d'entre elles. Le plaisir devient le seul péché vraiment capital. Mais la nécessité de la production d'enfants s'insère dans la dialectique générale interdit-transgression. Le pêché sera permis et même recommandé à condition qu'il ait pour but la reproduction ( j'exposerai, dans un article ultérieur comment chez l'homme sexualité et reproduction ne sont pas absolument liées. Ici, considérons cette idée comme acquise).
La politique de répression sexuelle se double d'une politique nataliste et tout acte sexuel qui n'a pas pour but la reproduction ( usage de contraceptifs, homosexualité) est violemment réprimé ( dans certains états américains le coit extra vaginal , même entre époux, est puni de prison, en France, il peut être un cas de divorce) ».

« L'Etat au service du capital assure, par ses lois et son appareil policier, judiciaire et pénitentiaire, la répression, quand les tabous intrajectés par l'éducation dans l' âme des individus ne suffisent pas à contenir leurs pulsions ».

« Pour neutraliser les revendications des victimes le système intègre leurs organisations : partis intégrés dans le jeu stupide électoral, intégration des syndicats dans l'entreprise etc... »

« La répression reste confiée à l'état qui monopolise l'éducation des enfants et les moyens d'action idéologique sur les masses : radio, tv, presse et le système répressif décrit plus haut ».


« Je crois que cette digression était nécessaire pour mieux nous faire comprendre ce qui va suivre. Ceci nous montre donc, contre toute attente, que la raison rn' est pas un fait entièrement acquis, Elle est une lutte de tous les jours contre cette partie obscure de nous-mêmes, et l'homme a tendance à abandonner cette lutte, et est prêt à retomber dans 1'inconscient". Citons ici une pensée de Shaw : ""Je n'hésite pas à croire que de nombreux individus se sentent relativement mieux dans un état de contrainte que dans un état de responsabilité personnelle (G. B. Shaw : « Man and Superman").
Vous vous demandez peut-être : quel rapport avec le sujet qui nous préoccupe ?
Il est assez simple : l'homme qui glisse vers 1'inconscient abandonne ses responsabilités aux autres. Laissons parler Jung : « Sur la voie de l'inconscient on croit que la tâche à résoudre peut être en toute tranquillité abandonnée "aux autres" et, en fin de compte, à l'Etat anonyme. Mais qui sont donc ces autres? A tout le moins, ils devraient manifestement être des surhommes, puisqu'on prétend leur faire accomplir ce dont chacun, dans son for intérieur, se croit incapable. En fait, il s'agit de personnes pareilles à tout un chacun, qui, pensent et sentent comme nous, mais qui , à tout le mieux, sont passées maîtresses dans l'art d'abandonner une tâche difficile aux autres, Et, en fin de compte, qu'est ce que l'Etat ? Il est fait de la somme de toutes les nullités qui le composent. Si on pouvait le personnifier, il serait représenter par un individu ou, plutôt, par un monstre qui , du point de vue moral et spirituel se situeraient bien au-dessous du niveau des individus qui le composent, car l'Etat représente, à sa suprême puissance, la psychologie de la masse. »



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