Si
la crédulité est un mal, la défiance en est un autre. Il n’est
pas bon d’être trop confiant et de se livrer aveuglément à qui
que ce soit, mais ce n’est pas non plus une solution de douter de
tous ceux qui nous approchent. « L’esprit de défiance nous fait
croire que tout le monde est capable de nous tromper », a dit La
Bruyère, et la défiance est d’autant plus mauvaise conseillère
qu’à force de douter des autres l’homme défiant arrive à
douter de lui-même et est de ce fait victime d’un continuel
malaise. L’être défiant se figure que tout le monde veut le
tromper et soupçonne quiconque vient à lui d’être guidé par un
calcul ou par un intérêt quelconque ; il est toujours dans
l’inquiétude et ne peut trouver d’amis craignant éternellement
d’avoir en face de lui un individu masqué qui cache ses véritables
intentions. Il est un proverbe qui dit que la « défiance est mère
de sûreté » et un autre que « dans la société actuelle, il faut
être défiant si l’on ne veut pas être trompé ». Il est de
toute évidence que la société regorge d’individus desquels il
faut se. méfier et s’écarter ; mais ce serait exagérer de penser
que le monde n’est qu’un composé de filous et de coquins et que
tous les individus sont corrompus. Il ne faut pas se donner et se
livrer sans examen et sans réflexion, mais il faut aussi reconnaître
qu’il existe des hommes sincères et désintéressés auxquels on
peut se confier et qui n’abusent jamais de la confiance qu’on
leur a accordée. Ne soyons donc pas trop méfiants et ne nous
laissons pas absorber par la méfiance ; tâchons de trouver en nous
assez de force et de courage pour ne pas avoir recours à d’autres
afin de réaliser notre bonheur et nous serons alors garantis contre
les manoeuvres intéressées de tous ceux qui cherchent à nous
exploiter physiquement, moralement et intellectuellement.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire