Action
de dégrever ; de décharger du poids de l’impôt un individu ou
une portion de la population. La guerre de 1914-1918 a lourdement
grevé le peuple qui fut obligé d’en faire tous Ies frais, et il
ne semble pas qu’il puisse espérer un dégrèvement de ses charges
dans le proche futur, s’il s’en tient aux méthodes d’action
employées présentement. Il est de toute évidence que les classes
productrices supportent la totalité des charges fiscales de la
nation et que les classes privilégiées, par le jeu du commerce, se
déchargent de leurs impôts directs en augmentant progressivement le
prix de vente des produits de première nécessité et de
consommation courante ; en conséquence les dégrèvements d’impôts
que les gouvernements accordent aux classes pauvres ne sont
qu’apparents, en réalité, ils n’existent pas. Certains éléments
politiques d’extrême-gauche et en particulier les socialistes
espèrent obtenir par le jeu du parlementarisme un dégrèvement des
charges qui pèsent sur les épaules des travailleurs. C’est une
illusion dangereuse dont se laisse malheureusement bercer le
prolétariat. Il y aurait, certes, un moyen de dégrever le peuple ;
mais ce moyen n’appartient pas à la politique. Il faudrait pour
cela supprimer toutes les dépenses inutiles qui sont nombreuses, et
qui comme nous le disons plus haut viennent toujours, en fin de
compte, arracher au budget familial du petit la somme indispensable à
sa vie normale.
D’après
les documents officiels présentés par le sénateur Bérenger au
cours des pourparlers qui eurent comme conclusion les accords de
Washington du 29 avril 1926, nous pensons qu’il est possible de
dégrever le peuple de bien des charges, mais les mesures à employer
ne sont pas d’ordre gouvernemental ou parlementaire, mais d’ordre
révolutionnaire. Il est facile de se rendre compte de la situation
qui est faite aux classes laborieuses en étudiant simplement les
charges inutiles qui pèsent sur la population. Prenons en exemple le
budget français de 1925 et soulignons les dépenses militaires du
gouvernement.
MINISTERE
DE LA GUERRE
Dépenses
ordinaires :
Troupes
métropolitaines : 2.352.000.000 francs
Troupes
coloniales : 264.000.000 francs
Construction
nouvelles et matériel : 183.000.000 francs
Maroc
: 340.000.000 francs
Alsace-Lorraine
: 1.000.000 francs
Dépenses
extraordinaires :
Dépenses
provisoires de la Grande Guerre. : 105.000.000 francs
Troupes
du bassin de la Sarre : 21.000.000 francs
Troupes
d’Asie Mineure :173.000.000 francs
Alsace-Lorraine
: 1.000.000 francs
Dépenses
provisoires pour les dépenses de guerre : 27.000.000 francs
MINISTERE
DE LA MARINE
Dépenses
ordinaires : 1.264.000.000 francs
Dépenses
extraordinaires : 6.000.000 francs
MINISTERE
DES COLONIES
Dépenses
militaires : 208.000.000 francs
Dépenses
extraordinaires : 3.000.000 francs
Total
-------------------- 4.930.000.000 francs
Compte
spécial pour les troupes d’occupation : 591.000.000 francs
Total
---------------------- 5.521.000.000 francs
Nous
voyons par le tableau ci-dessus que le peuple français pourrait déjà
être dégrevé d’une somme importante de ses charges puisque rien
que pour l’année 1925 le militarisme a englouti la somme fabuleuse
de cinq milliards cinq cent vingt millions. Et il en est de même
dans tous les pays civilisés. En six ans, c’est-à-dire de 1920 à
1926 les divers gouvernements français qui se sont succédés ont
dépensé la somme énorme de 276 milliards de francs et l’on peut
se rendre compte par le tableau ci-dessous que les 9/10 de cette
somme servirent à des dépenses inutiles.
Service de la dette
(inutile) 70.953.000.000 francs
Pensions
20.865.000.000 francs
Dépenses
militaires (inutile) 48.332.000.000 francs
Dépenses
civiles 34.656.000.000 francs
Divers
9.958.000.000 francs
Avances
à des gouvernements étrangers (inutile) 7.022.000.000 francs
Reconstruction
(inutile) 84.036.000.000 francs
Total
----------------------------- 276.036.000.000 francs
Si
nous comptons comme dépenses inutiles les sommes employées à la
reconstruction des régions dévastées c’est qu’en réalité ces
dépenses sont la conséquence du carnage et que, d’autre part, si
l’on tient compte de certaines exceptions, ce sont les gros
financiers et les gros industriels qui ont bénéficié de cette
somme versée par les contribuables français. Comment, alors,
espérer un dégrèvement des charges, si l’on considère que les
charges futures seront encore plus élevées que celles du passé,
car à toutes ces dépenses viennent encore s’ajouter celles
déterminées par le remboursement des dettes extérieures : à
l’Amérique, qui s’élèvent à quatre milliards de francs or et
dont le remboursement est échelonné entre les années 1926 et 1987
et celles à l’Angleterre qui sont à peu près équivalentes à
celles de l’Amérique. Il n’est donc aucune puissance
politico-sociale qui puisse, en vertu des lois qui régissent les
sociétés bourgeoises, résoudre le problème du dégrèvement et il
faut donc conclure que les peuples payeront au capitalisme les
erreurs et les crimes de la guerre s’ils ne veulent pas se résoudre
à briser les cadres de la légalité pour équilibrer une situation
qui ne peut qu’empirer. Le peuple est aveugle et, confiant. Il
prête encore un certain crédit aux formes démocratiques et
pourtant il devrait être éclairé à 1a lumière des réalités. Il
n’y a qu’une solution, pour améliorer le sort des travailleurs :
c’est la Révolution. La Révolution, c’est la destruction de
tout un organisme périmé qui sacrifie la grande majorité d’une
population au bénéfice d’une minorité ; la Révolution, c’est
l’élaboration d’une société où chacun participera
équitablement à la production et dans laquelle chacun trouvera le
maximum de bien-être et de liberté ; la Révolution, c’est
l’action qui déchargera le peuple de tout le poids que fait peser
sur lui une classe de profiteurs et de ploutocrates, c’est le
dégrèvement de l’humanité d’une erreur qui a duré des siècles
et qui sera remplacée par une vérité assurant à tous la
nourriture du corps et celle de l’esprit.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire