Altération
de l’intelligence ; cessation complète ou partielle des fonctions
du cerveau. Une des principales manifestations de la démence est la
perte de la mémoire et l’affaiblissement progressif des facultés
intellectuelles et physiques. La démence est souvent due à la
vieillesse, mais elle a aussi d’autres causes, et les êtres jeunes
et chargée d’une hérédité alcoolique ou syphilitique en sont
également victimes. La démence est une terrible maladie, car la
pensée et l’intelligence sont les deux fonctions qui distinguent
et séparent l’homme de la bête, et celui qui en est dépourvu
n’est plus qu’un déchet d’humanité. Le travailleur qui peine
et fatigue pour arriver modestement à boucler le budget familial et
se laisse entraîner au cabaret ferait bien de réfléchir aux
conséquences désastreuses de son acte. Combien d’êtres jeunes
sont innocemment victimes d’une hérédité morbide et traînent
toute une vie de misère, parce que leurs ascendants n’ont pas su
maîtriser leur passions et résister à un verre de poison ? Divers
auteurs nous ont, par des ouvrages d’une haute portée
philosophique ou sociale, éclairé sur les effets de la boisson.
Zola, dans l’Assommoir, nous montre « Coupeau » finissant ses
jours dans le cabanon des fous, et Ibsen, dans ses « Revenants »
nous présente un homme jeune et talentueux qui sombre dans la
démence, victime de la funeste passion de ses ancêtres. Certains
savants et philosophes, au spectacle qu’offre l’humanité,
versent dans le pessimisme le plus profond et déclarent que le monde
est en son entier atteint de démence. Dans ses « Paradoxes
Psychologiques », Max Nordeau, le célèbre docteur et écrivain
autrichien, accuse l’individu de « dégénérescence névropathique
», et il semble parfois que l’ensemble des humains donne raison à
cette thèse. N’est-ce pas un vent de démence qui souffle sur le
monde lorsque l’humanité sacrifie des millions d’hommes jeunes
et vigoureux dans une guerre immonde et terrible ? Ne faut-il pas
que l’homme soit atteint de folie pour se laisser conduire comme un
mouton et se livrer sans protester au couteau du boucher ? La
lassitude s’empare souvent de celui qui rêve de régénérer
l’humanité lorsqu’il constate l’énorme besogne à accomplir ;
et pourtant nous ne croyons pas que l’homme soit atteint de démence
; nous pensons simplement qu’il est encore un enfant qui a besoin
de s’instruire et de s’éduquer, que, malgré les milliers de
siècles qui nous précèdent, nous ne sommes encore qu’à l’aube
de la civilisation, et qu’un long chemin reste à parcourir. S’il
arrive à l’individu de commettre des erreurs, de se livrer à des
actes extravagants, de déraisonner, s’il lui arrive de se laisser
entraîner dans des aventures criminelles, dans des entreprises
stupides, c’est qu’il ne sait pas, qu’il ignore, et qu’il
faut lui apprendre à se conduire ; c’est à cette tâche que
l’Anarchiste doit s’attacher ; et ce qui apparaît comme de la
démence disparaîtra lorsque l’oeuvre poursuivie sera accomplie et
que l’homme devenu majeur restera maître de ses destinées.
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