"Ces articles occasionnels sont des causeries qui empruntent délibérément leur forme aux « chroniques » des pages culturelles des journaux. Ils représentent à mes yeux une partie annexe de mon travail, mais sont liés par une signification commune : tous ces propos rédigés au gré des circonstances dans un style un peu léger, souvent teinté d’ironie, combattent l’optimisme mensonger qui règne dans notre opinion publique, ils combattent cette religion à la mode, qui, en Europe comme en Amérique, glorifie l’homme moderne souverain, auteur de tant de réussites […] Ils combattent l’attitude certes ingénue, mais aussi profondément dangereuse de l’homme de masse qui a définitivement perdu toute faculté de croire et de penser et se complaît dans son insouciance, sa présomption, son absence de modestie, de scrupules, de sens moral. Des paroles de ce genre […] ne s’adressent pas à l’humanité, mais à notre époque, aux lecteurs de journaux, à une foule dont le caractère menaçant ne vient pas, selon moi, de ce qu’elle doute d’elle-même et de sa propre grandeur. J’ajouterai qu’en rappelant à quel point la démesure humaine est illégitime, j’ai aussi bien souvent exprimé une mise en garde claire relative aux événements de notre histoire la plus récente, concernant notre inconscience, la légèreté fanfaronne avec laquelle nous sommes partis à la guerre et les réticences qu’éprouvent les peuples comme les individus à chercher en eux-mêmes une part de responsabilité.
Hermann Hesse, 1932"
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