"Un peu plus loin encore, un petit groupe de déportés. Le plus grand, en guenilles, serre dans ses bras un bébé. Peut-être dix-huit mois, peut-être deux ans. L’enfant est presque nu. Ce 3 janvier, il neige. L’enfant pleure. L’homme l’enveloppe de sa poitrine, de ses épaules, de ses bras, de sa tête. L’enfant se calme, puis pleure à nouveau. L’homme couvre le visage du bébé de son haleine; un voile de vapeur cerne les joues, le nez, les yeux, les cheveux clairs. Alors le S.S. qui surveille l’alignement hurle: —Silence! L’homme berce l’enfant. Sa bouche, collée à l’oreille doit chantonner… L’enfant pleure. La cravache, la longue cravache noire du S.S. cingle le dos de l’homme. Le S.S. tourne, l’homme tourne. Entre la cravache et le bébé, il n’y a qu’un dos tendu, immense; un dos qui semble aspirer les coups. Et l’enfant pleure toujours. Les différents groupes se dirigent vers la gare du camp. Un wagon militaire est réservé aux prêtres. Les enfants, les autres, s’installent en queue de train. Ils roulent. Dans le wagon militaire, les prêtres entonnent le Magnificat. Les gardiens mangent du fromage. Le deuxième soir, des S.S. détachent les wagons de queue. Le troisième soir, le wagon militaire arrive à Dachau."
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