Une
encyclopédie est un ouvrage dans lequel est traité tout l'ensemble
des connaissances humaines. En vérité un ouvrage semblable n'existe
pas et ne peut pas exister de nos jours. Chez les anciens, tout homme
qui avait le souci de son intelligence et tenait à conserver sa
réputation d'homme libre, apprenait ou plutôt suivait «
l'encyclopédie », c'est-à-dire qu'il s'instruisait à toutes les
branches des arts et des sciences. Mais à mesure que se développa
le progrès et que les découvertes scientifiques, philosophiques,
artistiques élargirent le cercle des connaissances générales, il
devint impossible à l'individu d'emmagasiner dans son cerveau
l'ensemble de ces connaissances et l'on renonça alors à l'étude de
« l'encyclopédie ». Il devint nécessaire à l'homme de
spécialiser ses études, en choisissant celles qui se rattachaient
plus particulièrement à l'état que l'on désirait embrasser. Ce
fut François Bacon, le célèbre philosophe du XVIIème siècle qui,
le premier, « systématisa nos connaissances » en divisant les
sciences et les arts en trois branches distinctes : la première
comprenant les histoires sacrées, civiles, l'histoire naturelle, la
géologie, la technologie, etc... , etc... ; la seconde, la
théologie, la philosophie, la nature, la grammaire, la rhétorique,
les mathématiques, la chimie, etc., et la troisième l'art
dramatique, la musique, la peinture et la sculpture
Le
premier ouvrage qui porte le nom d'encyclopédie fut réalisé par
d'Alembert et Diderot au XVIIIème siècle. C'est un puissant ouvrage
auquel collaborèrent tous les hommes nouveaux de l'époque, les
libres penseurs, les révolutionnaires, enfin tous ceux désirant
modifier la société au point de vue politique et religieux et
détruire les préjugés et les croyances du passé. Le « Discours
préliminaire » de cette encyclopédie, rédigé par d'Alembert est
un tableau remarquable des connaissances humaines à la veille de la
grande Révolution française et constitue une des plus puissantes
oeuvres philosophiques du XVIIIème siècle.
De
nos jours les encyclopédies les plus renommées sont :
1°
La grande encyclopédie publiée de 1885 à 1902 et qui forme un
vaste recueil de 31 volumes. C'est en France l'encyclopédie la plus
complète que l'on puisse trouver ; mais elle présente cette lacune,
que n'étant pas tenue à jour, elle n'instruit pas sur toutes les
transformations et progrès scientifiques et sociaux de ces vingt
dernières années. C’est regrettable car depuis 1900 les
découvertes furent nombreuses et le progrès rapide. Il faut donc
chercher hors de cette encyclopédie les renseignements que l'on
pourrait désirer. 2° L'Encyclopédie britannique en 24 volumes de
Charles Black et Adam. 3° L'Encyclopédie allemande de Brokhaus en
17 volumes et celle de Meyer
également en 17 volumes. Comme ouvrage tenu à jour, il n'y a
réellement en France que le Nouveau Larousse illustré en sept
volumes publié de 1897 à 1904 sous la direction de Claude Augé ;
un supplément fut publié en 1906 et depuis mars 1907, toujours sous
la même direction parait une revue mensuelle encyclopédique qui
enregistre toutes les manifestations de la vie contemporaine. Les
articles qui paraissent dans cette revue, d'ordre littéraire,
artistique ou scientifique, sont classés avec soin et sont
accompagnés d'une illustration documentaire. Mais il faut reprocher
à ce qu'il est convenu d'appeler l'encyclopédie Larousse son
caractère particulier et réactionnaire. A côté des encyclopédies
proprement dites qui embrassent, ou qui devraient embrasser le cercle
des connaissances humaines, il y a les encyclopédies spéciales qui
ne traitent que les notions utiles à un art ou à une science.
L'encyclopédie médicale, comme son nom l'indique, est destinée aux
hommes qui entendent étudier ou professer la médecine ;
l'encyclopédie agricole, à ceux qui
s'intéressent
aux questions agricoles.
L'encyclopédie
anarchiste est une encyclopédie spéciale. « Dans la masse des
encyclopédies que l'on a publiées jusqu'à ce jour, déclarait
Lachâtre, lorsqu'en 1856
il publia son Dictionnaire Universel, la plus importante, la plus
nécessaire manquait
: l'Encyclopédie du Peuple ; c'est cette lacune que nous avons
l'espoir de remplir
par la publication du dictionnaire universel et de ses compléments
».
C'est
le même esprit qui anima notre camarade Sébastien Faure, lorsqu'il décida
de publier l'Encyclopédie Anarchiste. Le Dictionnaire Universel de
Lachâtre est
un dictionnaire républicain, un dictionnaire social plein
d'enseignements révolutionnaires,
et qui soutenait la République à l'époque où celle-ci, écrasée
par l'empire,
semblait belle à ceux qui en attendaient la justice et la liberté.
La République
est sortie triomphante de la guerre de 1870 et aujourd'hui que de nouveaux
désastres se sont abattus sur le peuple, après bientôt soixante
ans de régime
républicain, nous pouvons faire le bilan des années qui se sont
écoulées et il était
nécessaire que le peuple puisse puiser, dans un ouvrage qui lui est
destiné, l'exemple
et l'expérience indispensables à sa lutte. L'Encyclopédie
Anarchiste n'est pas
un traité lexicologique, ce n'est pas un ouvrage où l'on trouvera
développés tous
les
sujets scientifiques, littéraires ou artistiques comme ils le sont -
imparfaitement
du
reste - dans les autres dictionnaires, mais le lecteur y pourra
chercher ce qu'il ne
rencontrera
dans aucune autre encyclopédie ; le développement des divers mouvements
sociaux, étudiés et transcrits avec logique, clarté, limpidité et
surtout avec
impartialité.
L'Encyclopédie
Anarchiste n'est pas rédigée par des grammairiens, mais Sébastien
Faure s'est attaché des collaborateurs soucieux du travail qui leur
est confié
et qui dans un but de propagande par l'instruction et l'éducation,
développent un
sujet qu'ils connaissent profondément, avec précision et en termes
susceptibles d'être
compris par le plus humble des travailleurs.
OEuvre
révolutionnaire au premier plan, l'Encyclopédie Anarchiste instruira
le militant ouvrier sur tout ce qu'il ne doit pas ignorer dans la
bataille quotidienne
qu'il mène pour la libération de l'humanité. A sa lecture, il sera documenté
non seulement sur l'évolution du mouvement anarchiste, mais aussi
sur tous
les mouvements sociaux qui visent au même but et empruntent pour
l'atteindre des
chemins différents et opposés. Le développement des diverses
doctrines sociales
y sont traitées par des hommes compétents appartenant à tous les
partis et en conséquence l'Encyclopedie Anarchiste ne peut être taxée de
partialité ; il est évident
que l'exposé des espérances anarchistes y tient une grande place et
que les
conclusions
sont parfois brutales pour les défenseurs du principe d'autorité.
Mais est-ce
la faute des Anarchistes si la critique de la société moderne
s'impose par les vices
exemplaires de cette société et si toutes les doctrines
philosophiques ou sociales
qui prétendent rénover l'humanité ont fait faillite? L'Encyclopédie
Anarchiste est une oeuvre d'utilité sociale. Bien que ne formant
pas un ensemble complet de connaissances, on y trouve résumé tout
ce qui peut
intéresser l'individu qui cherche à connaître, à s'instruire, à
s'élever et, à ce point
de vue, elle constitue pour le peuple l'unique ouvrage écrit pour
lui, l'ouvrage qui
manquait : l'« Encyclopédie du Peuple ».
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