L'empirisme
est un système philosophique qui attribue uniquement à l'expérience
l'origine de toutes les connaissances humaines. Niant toute valeur à
la méthode déductive, l'empirisme philosophique, scientifique ou
social rejette, par conséquent, toute théorie, et ouvre un vaste
champ d'action au charlatanisme. « Les empiristes, dit Jouffroy, ne
connaissent d'autre autorité, en matière de connaissances, que
celle des yeux et des mains ». Il ne faut pas confondre l'empirisme
avec la méthode expérimentale, qui considère que l'esprit,
l'intelligence, apportent également des éléments précieux à la
réalisation des progrès scientifiques ou sociaux, et tout en
attribuant une large part à l'expérience, ne condamne pas cependant
le raisonnement et tous les bénéfices qui en résultent. Le
raisonnement et l'expérience se confondent et se complètent. Pour
tous les domaines de l'activité humaine, l'un est aussi nécessaire
que l'autre, car il existe des phénomènes qui ne frappent pas nos
sens imparfaits, et nous sommes donc obligés d'avoir recours à la
déduction pour les expliquer. D'autre part, sur le terrain pratique,
l'empirisme présente un véritable danger. Médicalement, par
exemple, une expérience, qui ne repose pas sur une théorie, permet
toutes les erreurs, et tous les faux savants peuvent spéculer et se
livrer au plus large charlatanisme en se réclamant d'un principe
aussi absolu. Sur le terrain social, l'empirisme n'est pas moins
néfaste. A nos yeux, l'expérience doit être consécutive à
l'observation ; ce n'est qu'après avoir étudié, raisonné les
chances de succès d'une action quelconque, que l'on doit se livrer à
cette action. L'expérience en soi est généralement couronnée par
le plus désastreux des fiascos, lorsqu'elle n'a pas été précédée
de l'étude des conditions dans lesquelles elle doit s'opérer. Le
dictionnaire Lachâtre emprunte à Et. Brochin la définition
suivante de l'empirisme : « L'empirisme pris dans son acception
étymologique rigoureuse et dans son sens sérieux, signifie cette
méthode qui consiste à étudier, sans idée préconçue, tous les
phénomènes qui se présentent à notre observation, et dans leur
manifestation actuelle et dans les circonstances de leur production
et de leur formation, ainsi que dans toutes les choses qui peuvent en
changer ou modifier le cours ; à déduire des faits observés et de
leur rapprochement les conclusions les plus rigoureuses, et à
comparer ces conclusions entre elles, afin d'en faire découler des
propositions qui ne soient que des déductions plus générales, mais
tout aussi rigoureuses des faits eux-mêmes. C'est ce que l'on peut
appeler, de nos jours, l'empirisme raisonné, ou, si l'on veut, une
partie de la méthode expérimentale de Bacon ». Nous pouvons dire
avec Brochin que si l'empirisme tout court nous paraît stupide et
néfaste, l'empirisme raisonné, appliqué tout aussi bien à la
science qu'à la sociologie, est un facteur de progrès et
d'évolution.
On
appelle empiristes ceux qui se réclament de l'empirisme, ou plutôt
qui défendent ou soutiennent ce système ; quant au mot empirique,
il est ordinairement employé au sens péjoratif et signifie
routinier, rétrograde. Un procédé empirique ; un médecin
empirique, pour un charlatan qui exerce la médecine.
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