Voici un de
ces beaux traits qu’on aime à livrer à la publicité :
Depuis le
commencement de la guerre, une jeune mère de famille de vingtquatre
ans, madame Marie Richard, cantinière au 3e bataillon du 24e de
marche de la Haute-Garonne, a donné les preuves du plus grand
courage et du plus entier dévouement. Elle a consacré tous ses
soins à nos blessés et sauvé la vie à plusieurs d’entre eux.
A
Baume-la-Rolande, elle traversa à plusieurs reprises un espace de
500 mètres labouré par les projectiles prussiens, emportant à
chaque voyage un blessé, depuis le bord du bois où ils gelaient
jusqu’à la maison qui devait servir d’ambulance. Pendant la
campagne de l’Est, elle exposa plusieurs fois sa vie notamment à
Champey-Héricourt.
Plus de
soixante soldats nous ont déclaré lui devoir la vie. Elle a employé
tous ses linges au soulagement des mobiles qui avaient les pieds
gelés.
Son mari est
engagé volontaire.
Mardi
dernier, le sieur Autier, âgé de 40 ans, employé des contributions
indirectes dans le département de l’Aisne, arrivait à Nevers par
le chemin de fer avec sa femme et ses deux enfants, âgés, l’un de
trois ans et demi, l’autre de treize mois. Il venait de Clairvaux
(Jura), où il s’était retiré chez son père, propriétaire aisé,
au moment de l’invasion de Braisbe, où il avait sa résidence. Il
retournait à son poste et était descendu à l’hôtel Lavy, près
de la gare, pour y passer la nuit et reprendre le matin le chemin de
fer.
L’hôtel
Lavy n’est fermé qu’à une heure avancée de la nuit et s’ouvre
tard dans la matinée. Autier voulant sortir le matin, s’était
fait monter une bouteille de vin. Vers six heures, le matin, il but
un verre et alla se promener. A son retour, il trouva la porte fermée
et, ayant attendu quelque temps pour se faire ouvrir, il entra dans
une violente colère.
Que se
passa-t-il entre sa femme et lui ? On ne sait pas. Mais on entendit
bientôt plusieurs détonations d’une arme à feu. Quand on pénétra
dans la chambre, un spectacle affreux frappa les regards.
Journal
officiel de la Commune de Paris du 20 mars au 24 mai 1871. (1871) 659
Autier avait
tiré deux coups de revolver sur sa femme, qui respirait encore ; il
avait tué de cinq coups de la même arme ses deux enfants, et enfin
il s’était brûlé la cervelle en s’appliquant son armes sur
l’oreille droite.
On assure
que les blessures de madame Autier ne sont pas mortelles ; mais
quelle horrible douleur pour la malheureuse épouse, pour la pauvre
mère !
On dit
qu’Autier était d’un caractère violent. Dans le wagon, il
aurait eu de fréquentes altercations avec sa femme. Des voyageurs
qui se trouvaient dans le même compartiment supposaient qu’il
répugnait à Autier de retourner à son poste, tandis que sa femme
s’efforçait de l’encourager à se remettre au travail.
P.-S. –
Nous recevons de nouveaux détails sur cet horrible assassinat.
Autier avait
bu beaucoup hier soir. Après dîner, il était sorti, et, en
rentrant à l’hôtel, il s’était assis dans l’une des salles
et n’avait pas tardé à s’assoupir sur sa chaise. En remontant
dans sa chambre, il avait emporté une bouteille de vin.
Pendant la
nuit, à de fréquentes reprises, on l’aurait entendu se disputer
avec sa femme.
C’est sur
elle qu’il a tout d’abord tiré un coup de pistolet, puis un
autre coup d’un second pistolet. Malgré ses graves blessures, elle
a pu s’échapper de la chambre pendant que, tirant de sa poche un
revolver à douze coups, il tuait d’abord son enfant de treize
mois, puis déchargeait cinq coups de son arme sur son petit garçon
de trois ans et demi, qui, à la première décharge, avait fait un
soubresaut qui l’avait précipité au pied du lit.
Mme Autier a
été transportée à l’hospice.
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