dimanche 6 janvier 2019

ÉLECTION n. f. du latin electio Encyclopedie Anarchiste de Sébastien Faure




Signifie choix fait par la voie de suffrages et, plus précisément, acte de la libre volonté appelée à se prononcer entre deux ou plusieurs candidats ou partis. Dans les pays à démocratie directe, en plus des élections proprement dites, nous avons un nombre considérable de votations sur l’abrogation, le changement ou l’introduction d’articles constitutionnels, sur les budgets, lois et règlements, et à la suite de l’exercice du droit d’initiative ou de référendum. Nous aurons l’occasion l’en reparler. N’envisageons ici que les élections de sénateurs et députés, de conseillers communaux et d’arrondissement, auxquels viennent s’ajouter, en Suisse, dans plusieurs cantons, l’élection également de toute la magistrature judiciaire, du gouvernement cantonal, parfois aussi de certains emplois, sans compter l’élection des administrateurs de biens de communiers ou de bourgeoisie. L’élection devrait nous donner l’administration des plus dignes, capables et compétents ; or, c’est précisément le contraire qui arrive le plus souvent. A remarquer avant tout que les élus ne le sont pas uniquement pour s’occuper de telle ou telle branche qu’ils peuvent connaître, plus ou moins bien, mais pour décider d’une foule d’affaires dont ils n’ont qu’une vague connaissance. Cela suffirait à condamner le système électoral, même en dehors des marchandages et tripotages dont s’accompagne toute élection. Afin d’échapper au danger du règne de l’incompétence, une élection ne devrait se faire que pour la gérance bien déterminée d’une seule chose, et par ceux-là seuls qui sont. occupés et en connaissent le fonctionnement et les améliorations désirables. Personne n’oserait se présenter pour travailler comme maçon, cordonnier, typographe, etc., sans avoir fait un apprentissage correspondant, tandis que tout le monde n’hésite pas à s’improviser législateur et administrateur en toute matière, sans aucune préparation. Nous comprenons fort bien qu’il puisse y avoir nécessité de confier un mandat bien déterminé pour un but qui le soit aussi par une assemblée de compétents. Mais il est absurde de remettre à quelques individus des pouvoirs pour tout l’ensemble de la chose publique. Le mal est quelque peu atténué par l’existence d’une bureaucratie, qui, à défaut de véritable science, a tout de même l’expérience de la routine et par le fait que dès qu’il s’agit de réalisation, les compétents sont interrogés, mais ces derniers ne s’en trouvent pas moins placés en sous-ordres vis-à-vis des incompétents. La solution anarchique qui, évidemment, présuppose avant tout la fin de l’opposition des intérêts privés à l’intérêt public par un ordre de choses où chacun recherchant son bien-être particulier, contribue au bien-être général, consistera à appliquer dans le domaine social ce qui se fait dans le domaine scientifique. Tous ceux qui s’adonnent à une science donnée poursuivent par la libre recherche et la libre expérimentation, leurs découvertes et applications, visant toujours à de nouveaux perfectionnements. Ceux-ci réalisés, il n’y a nullement besoin d’une force policière pour les imposer. Chacun se hâte de les appliquer à son tour et en même temps d’y faire des améliorations éventuelles. Par cette méthode l’humanité a déjà accompli des progrès merveilleux, sans nul besoin de procéder à des élections. Chacun s’est élu lui-même par son intelligence, son dévouement, son travail, par une lutte opiniâtre parfois contre d’anciens préjugés ou des intérêts inavouables. L’administration de la chose publique, dans toutes ses multiples branches, est aussi question de science. Les intérêts de classe et de parti font que souvent celle-ci n’y joue pas le premier rôle, et c’est pour cela qu’au milieu de la civilisation moderne, le retour aux pires tyrannies du passé est toujours possible. Les élections n’ont vraiment rien de scientifique, voilà ce que devraient se dire tous les votards d’un socialisme qui se prétend tel.
L. BERTONI.

Aucun commentaire: