Inscription
sur les rôles militaires des jeunes gens devant être appelés dans
l’année à servir dans l’armée de leur pays. Selon l’âge
déterminé par la loi, à la date indiquée, ces jeunes hommes
doivent, dans les pays où la conscription est obligatoire, se
présenter devant un conseil qui délibère sur leurs capacités
physiques et décident s’ils sont propres ou impropres à remplir
leurs « devoirs militaires ». A la sortie de ce conseil, les jeunes
gens changent de nom et s’appellent des conscrits. Le mot
conscription ne date que de 1798, mais l’institution est fort
ancienne. En France, la conscription ne fut pas toujours obligatoire,
et ce n’est qu’à la suite des guerres napoléoniennes que, par
la loi du 10 mars 1818, on institua le service militaire obligatoire
sur les bases du tirage au sort. Ce mode de recrutement fut abrogé
il y a quelques années et en principe chacun est aujourd’hui
obligé, en France, de remplir ses « devoirs militaires ». Il est
encore certains pays où la conscription est volontaire L’Angleterre
et les Etats-Unis d’Amérique, par exemple, n’obligent personne à
être soldat. Ce qui ne les empêche du reste pas d’avoir des
armées permanentes et puissantes.
La
conscription est une contrainte, et il est par conséquent
compréhensible que dans les pays où elle est obligatoire, il se
crée des groupes qui militent en faveur de la conscription
volontaire. Ces groupes, animés de nobles sentiments, il faut le
reconnaître, s’imaginent ainsi lutter contre le militarisme. Nous
pensons que c’est une erreur, et que la conscription volontaire
n’est pas un avantage social sur la conscription obligatoire. Il
suffirait, pour s’en rendre compte, de jeter un regard dans le
passé et de considérer que, durant des siècles, la guerre a ravagé
le monde et que la conscription cependant était volontaire. L’erreur
des personnes qui militent en faveur de la conscription volontaire
consiste en ce fait qu’elles confondent les effets et les causes.
La conscription volontaire ou obligatoire est un effet dont la cause
est le militarisme. C’est ce dernier qu’il faut détruire.
D’autre
part, même dans les pays à conscription volontaire, lorsque les
événements l’exigent, le capital s’arrange toujours pour
trouver le nombre d’hommes qui lui est indispensable, et nous en
avons eu un exemple frappant lors de la dernière guerre de 1914.
L’armée anglaise n’était composée que de volontaires et, la
guerre se poursuivant, il fallait continuer à donner au Moloch, sa
ration quotidienne de jeunes hommes sains et vigoureux. Or, il ne
s’en présentait plus aux bureaux de recrutement du Gouvernement
anglais. Il fallait aviser et l’on avisa. Il fut interdit, par
ordre des autorités militaires, d’embaucher dans les usines, des
hommes ayant moins de 25 ans et, si cet ordre ne fut jamais donné
officiellement, il fut néanmoins appliqué avec rigueur par les
patrons qui avaient tout intérêt à ce que la boucherie se
prolongeât. Lorsque les hommes sans travail, dans l’impossibilité
de nourrir leur famille, étaient acculés à la misère la plus
noire, ils avaient cette dernière ressource : se rendre au bureau de
recrutement le plus proche, et signer le bulletin d’engagement qui
assurait à leur femme et à leurs enfants la bouchée de pain. Par
la suite, lorsque bon nombre d’engagements furent ainsi récoltés,
l’Angleterre se divisa en deux camps : les engagés « volontaires
» (les soldats) et ceux qui persistaient à ne pas vouloir servir. A
la faveur de la division, et appuyé par les premiers, le
Gouvernement anglais institua pendant la guerre la conscription
obligatoire. Nous, voyons donc que la conscription volontaire est un
leurre, et qu’il ne faut pas se laisser aveugler par ce mirage.
Certes, tout ce qui peut ébranler les bases du régime capitaliste a
son utilité et aucune lutte n’est stérile. Gardons-nous,
cependant, de nous laisser illusionner. Par la force même des
événements, tous les pays arriveront à abolir le service
obligatoire et à instaurer le volontariat. Le capital trouvera
encore assez d’hommes qui, sans y être obligés, se présenteront
pour remplir les fonctions de soldat ; il n’y a, pour s’en
assurer, qu’à regarder autour de soi : personne n’est obligé
d’être policier, et cependant les rues sont noires d’agents. Le
volontariat n’est plus un danger pour la bourgeoisie, et c’est
pourquoi il nous faut regarder plus avant et mener une bataille
acharnée contre le militarisme, qui renferme en lui la conscription
volontaire et la conscription obligatoire qui, en vérité, sont
aussi néfastes l’une que l’autre.
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