dimanche 5 août 2018

CONGRÈS n. m. Encyclopedie Anarchiste de Sébastien Faure




Assemblée de délégués dont les mandataires ont eux-mêmes examiné les questions à traiter par le Congrès et, indiqué les solutions qui leur paraissent les meilleures. Le délégué au Congrès a charge de défendre le point de vue adopté par ceux qui l’ont mandaté, de faire tous ses efforts pour le faire triompher ou de se rallier a un point de vue à peu près analogue à celui qu’il a exposé. Le Congrès est le pouvoir législatif des Syndicats, Coopératives ou Associations diverses d’intérêts matériels ou moraux. Les décisions des Congrès, que ceux-ci soient syndicaux, politiques, coopératifs ou scientifiques, sont appliquées, exécutées, par une Commission exécutive ou administrative. C’est le pouvoir exécutif des organismes. L’application des décisions des Congrès, les actes ou actions qui en découlent sont contrôlés par des Comités nationaux ou internationaux. C’est le pouvoir de Contrôle. Si chacun de ces rouages fonctionne bien, s’il remplit le rôle qui lui est dévolu, le groupement ou les groupements réunis atteignent presque toujours à la prospérité et font d’excellente besogne. C’est d’ailleurs assez rare. On voit le plus souvent l’exécutif ne pas tenir un compte suffisant des décisions législatives, et plus encore, on enregistre la défaillance du Contrôle, qui donne trop facilement un blanc-seing à ce même exécutif, ou accepte ses explications et ses thèses sans les contrôler ni les vérifier. C’est bien la pire des choses et souvent les Congrès ne légifèrent, ne décident que d’après les explications de l’exécutif, qui se targue d’un Contrôle inexistant ou défaillant. Il ne faut pas chercher ailleurs la cause des erreurs doctrinales, des rectifications de tir, des changements de tactiques qu’un exécutif habile arrive toujours à expliquer ou à masquer, lorsqu’il, a quitté la ligne droite et prépare quelque conversation qui va le plus souvent à rencontre de l’intérêt général des travailleurs, coopérateurs ou associés de tous ordres.
Dans le mouvement ouvrier, il y a différentes sortes de Congrès, ce sont : les Congrès régionaux ou départementaux, les Congrès de Fédérations d’industrie ou fédéraux, les Congrès nationaux de toutes les Fédérations ou Congrès confédéraux, les Congrès qui réunissent par industrie les représentants de divers pays, ou Congrès fédéraux internationaux, et enfin les Congrès qui réunissent les représentants nationaux de toutes les Corporations, ou Congrès internationaux des Centrales syndicales. Il en est de même sur le plan coopératif ou politique. C’est dans les Congrès de toute nature que se confrontent les thèses doctrinales, que se vérifient les expériences faites et que sont tracées les directives de l’action à mener. Les Congrès se tiennent soit tous les ans soit tous les deux ans, suivant les statuts des organismes.
Les Congrès voient généralement des tendances se former pour défendre des thèses en présence. Ces thèses sont défendues avec vigueur et parfois avec parti-pris. De l’exposé des thèses surgit presque toujours une résolution, une motion, un ordre du jour les condensant et sur lesquels les délégués ont à se prononcer par un vote qui donnera à la thèse ainsi consacrée le caractère d’une décision qui constitue pour un ou deux ans, la ligne de conduite, de propagande et d’action des groupements affiliés à l’organisation qui a tenu ce Congrès. Ce sont là des principes généraux que suivent tous les groupements, qu’ils soient ouvriers ou patronaux ; ces principes constituent une sorte de jurisprudence consacrée par l’usage et passée dans les moeurs. On retrouvera ce terme dans l’exposé général du syndicalisme. Il y a aussi d’autres sortes de Congrès. Dans l’ordre religieux, il y a les Conciles qui ont charge d’examiner les thèses de l’Église, de surveiller l’intégrité du Dogme et de condamner réformateurs et iconoclastes. Jean Huss, précurseur de la Réforme, fut condamné à être brûlé vif par le Concile de Constance, et exécuté en 1415. On retrouve d’ailleurs, le mot Concile, à son ordre, dans cette encyclopédie. Les Conclaves sont des Congrès de prélats portant le titre de cardinaux, qui ont charge d’élire le pape lorsque le successeur de St-Pierre vient à décéder. On retrouve également ce mot à son ordre. Il y a enfin les Congrès de Parlements. En France, les deux Chambres : députés et sénateurs se réunissent en Congrès, à Versailles, pour élire le président de la République, ou pour modifier la Constitution. Il en est de même aux États-Unis, en Suisse.
Il y a encore des Congrès de la Paix, qui, généralement, préparent la guerre. Celui de la Haye fut le plus fameux. La Société des Nations, avec ses séances trimestrielles et mensuelles, tient elle aussi, des Congrès où sont pris des engagements aussi solennels que vite oubliés. Ce qu’il faudrait souhaiter, c’est que toutes ces parlotes inutiles et vaines de gens qui ne sont là que pour mentir et tromper les peuples soient remplacés par un Congrès des Peuples, où ceux-ci fixeraient leurs rapports et enterreraient définitivement la guerre, le capitalisme et son exécrable régime. Mais ce jour n’est pas encore venu. Ce jour-là, les Congrès ouvriers auront, eux aussi, plus d’intérêt qu’en ce moment. Ils auront aussi de plus graves responsabilités à prendre.
Pierre BESNARD.

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