samedi 15 septembre 2018

Edito A Contre-Courant mars 2009


Jetons de l'huile sur le feu des luttes 

Au fil des semaines, au fur et à mesure où s’accumulent les informations concernant les pertes colossales enregistrées, au cours de l’année dernière ou de ces seuls derniers mois, par les banques et les entreprises, que les plans de licenciements collectifs se succèdent, que les chiffres du chômage explosent, que les perspectives économiques s’assombrissent de plus en plus, on prend la mesure de l’ampleur proprement extraordinaire et de la brutalité inouïe de la récession qui est en train de s’installer un peu partout dans le monde, après l’éclatement de la crise financière de l’automne dernier, qui n’a d’ailleurs pas dit son dernier mot. Il faut remonter aux années 1930 pour trouver des ordres de grandeur identiques.
En fait, la crise est à la mesure de la fantastique suraccumulation du capital que trois décennies de politiques néolibérales ont provoqué tant par la paupérisation relative du monde salarial (impliquant la paupérisation absolue de certaines de ses couches) que par le gonflement des profits et leur fuite vers la sphère financière, créant des facilités tout à fait artificielles de crédit, tant à la production qu’à la consommation. C’est à l’écroulement de tout ce château de cartes de dimension planétaire que l’on est en train d’assister.
Dans ces conditions, des signes de panique se manifestent dans les rangs mêmes de la bourgeoisie et de son personnel politique, responsables en premier de la catastrophe et qui ne savent pas comment la conjurer. On s’y inquiète d’un regain probable de conflictualité sociale, qui pourrait aller jusqu’à l’éclatement de guerres civiles dans certains Etats, attisée par l’incapacité des dirigeants à trouver une solution à la crise, conduisant au repli des Etats sur eux-mêmes, à la montée du protectionnisme et à l’aggravation des tensions internationales1.
Cette panique semble d’ailleurs avoir déjà gagné les leaders de la soi-disant opposition de gauche. Ainsi a-t-on récemment entendu Martine Aubry s’inquiéter de ce que « le sentiment de ras-le-bol des Guadeloupéens et Martiniquais se diffuse ici [en métropole]… Il faut tout faire pour que ça n’arrive pas.»2 Alors qu’il faudra au contraire tout faire pour que la magnifique lutte des Antillais et Antillaises soit reprise et amplifiée en métropole. Et c’est la même panique qui dicte aux directions des confédérations syndicales leur attentisme qui les conduit à différer au 19 mars la reprise de la mobilisation prometteuse réussie lors de la journée de grève interprofessionnelle du 29 janvier. Pour notre part, nous sommes bien décidés, au contraire, à jeter de l’huile sur le feu des luttes. C’est le meilleur moyen, sinon le seul, de sortir de la mouise où nous enfoncent la bourgeoisie, ses experts et ses agents serviles. Avec l’aggravation de la crise, les conditions d’un nouveau cycle de luttes de grande ampleur sont en train d’être réunies. Il nous appartient d’en exploiter les potentialités en termes de mobilisation et d’organisation, en avançant pour commencer un mot d’ordre très simple : «Nous ne paierons pas la facture de la crise ! Que les casseurs soient les payeurs», en exigeant une hausse généralisée et substantielle des salaires, une revalorisation des prestations sociales, l’arrêt du démantèlement des services publics, le tout assorti d’un alourdissement de la fiscalité sur le capital, le patrimoine et les hauts revenus.

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