vendredi 8 juin 2018

No Pasaran Numéro Spécial : Anti-Patriarcat



« Dans le domaine du droit, qui régit de nombreuses sphères du monde moderne, Francine Demichel précise que ce qui n'est pas nommé n'existe pas, et qu'alors, l'assimilation revient à une annihilation. « Les hommes naissent libres et égaux en droit », précise la déclaration universelle, ce qui fait de la femme un « homme » juridique. Et si en droit, nommer équivaut à faire exister ( « en droit, dire c'est faire », précise Demichel), l'homme est un être juridique à part entière. A l'inverse, la femme ne peut pénétrer le droit qu'en entrant par la porte du masculin.
Le langage de tous les jours renvoie constamment les femmes à leur infériorité. Même si l'on dit « madame le docteur », on entérine le fait que ce statut est par excellence exceptionnel et temporaire. Le langage conditionne à chaque instant notre manière de percevoir le monde et nous conditionne à voir les choses telles qu'on les décrit. Il est incroyable de constater qu'on ait parlé de suffrage universel alors que les femmes n'avaient pas le droit de vote ( obtenu en 1944). On comprend alors l'anthropologue Maurice Godelier qui considère le pouvoir politique comme la capacité à dominer les autres en parlant en leur nom.
C'est au moment même où l'égalité entre deux groupes présentés comme différents est affirmée, que l'inégalité s'actualise. Lorsque l'on affirme la différence, on ne fait rien d'autre qu'inciter à des différences de traitement. Ce mécanisme typique du racisme différentialiste, qui consiste à présenter deux groupes comme fondamentalement différents, permet de justifier l'impossibilité d'accorder des droits identiques. De plus, l'un des deux groupes est toujours plus « différent » que l'autre ( la différence étant la distance qui sépare chaque groupe du modèle dominant, blanc, masculin, occidental, riche...) . Si le modèle de la personne humaine est indexé sur le modèle masculin, la femme est vouée à n'être qu'un cas spécifique méritant des traitements spécifiques. La construction des catégories de sexe se fait donc aussi au travers de l'affirmation de l'égalité dans la différence. »

« On peut alors définir le genre comme un produit sociocognitif, lié aux idéologies relatives à la féminité et à la masculinité, participant elles-mêmes au maintien d'un ordre social donné. Autrement dit, on peut très bien s'affirmer contre le sexisme, sans que cela n'influe sur nos comportements, ceux-ci étant régis par l'activation de stéréotypes qui façonnent notre rapport au monde.Aucun antisexisme n'est imaginable sans une remise en question de ses propres représentations. »



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