Jerôme
Lèbre : Suite
et de la cinquième république »
« Quant aux
militants d' En Marche, qui s’étaient tant consacrés à
l'élection de leur candidat sans penser qu'elle supposait quelques
volontaires pour tenir les urnes, ils donnaient déjà l'image de ce
que seraient les députés de leur mouvement : un certain nombre
d'opportunistes dont il ne faut rien attendre, allié à un grand
nombre d'individus initiés au pouvoir par la soumissions à un chef,
dont il ne faut pas attendre qu'elle donne l'idée des exigences de
l'engagement politique comme du fonctionnement de la République. »
« En ce sens
le « dégagisme » à la française est plutôt
l'affirmation d'une grande continuité, et ne sera arrivé qu'à
faire dégager la vie politique elle-même. A moins qu'il ne concerne
directement le chef de l'état, ce qui impliquerait une vraie
révolution assez peu probable, il s'avère que le « dégagisme »
est dans la V° république du ressort unique du chef de l'état :
lui seul nomme et destitue, donne sa souveraineté par délégation
ou la retire. Ce pouvoir n'appartient au Parlement qu'en théorie,
une théorie si verrouillée qu'il devient difficile de présenter la
V° république comme un régime parlementaire. Il en découle que
les ministres, bien loin d'être de simples exécutants, non élus,
sont de petits souverains régnant sur leur ministère et qui, même
destitués, gardent un statut de présidentiables. D'où l'écrasante
majorité des ministres ou ex-ministres aux primaires du PS comme du
PR. Si Mélenchon, lui-même ex-ministre, a pu parler de dégagisme
au moment où Valls perdait les primaires au bénéfice de Hamon, ce
vote n'a jamais fait qu'avantager un ministre sur un autre. Dans ce
contexte il devient difficilement compréhensible que l'on crie au
miracle ou au génie devant l' « ascension » de
Macron : le passage du poste de ministre de l’économie au
poste de président de la République est à peine une ascension dans
un pays où la plus importante élection consiste aujourd'hui à
convoquer le peuple pour choisir l'un de ceux qu'avait nommés, à un
moment ou un autre, le président de la République. Les électeurs
n'ont-ils pas tout de même « dégagé » les élus trop
installés au Parlement au bénéfice de « nouvelles têtes » ?
Mais pour cela, il aurait déjà fallu qu'ils se déplacent ;
ensuite la minorité qui s'est déplacée n'a jamais fait que dégager
ce qu'il restait de vie politique à l'Assemblée, donnant la
majorité à un groupe amorphe entièrement voué a u ministre élu.
A aucun moment ne s'est produit ce que recherche le dégagisme, une
vacance du pouvoir, une souveraineté vide qui permettrait à tous de
se demander si la souveraineté n'est pas fondamentalement cela, une
place vide, si elle n'est pas tout simplement et fondamentalement
rien. La cinquième République est saturée de figures souveraines
placées devant ce rien.
Toutes les formes de
régime autoritaire conviennent au « libéralisme »
économique, parce qu'elles assurent l'ordre et la surveillance
policière indispensables à la libre circulation des flux financiers
et répriment les résistances dues aux inégalités sociales. La V°
République a été conçue pour lui convenir, elle a donc le soutien
sans failles de puissances économiques qui la dépassent largement.
A chaque élection, celles-ci répartissent ce soutien ( n'insistons
pas sur le fait qu'il est alors aussi en grande partie celui de la
presse )entre les candidats qui assureront le maintien de
l'institution et la continuation à l'identique du « destin de
la France ». C'est pourquoi la campagne désastreuse de Fillon
ne lui a fait perdre que peu de voix, comparée à celle de Hamon,
moins désastreuse mais aussi compliquée. L'idée qui n'est pourtant
pas neuve ni révolutionnaire de l'instauration progressive d'un
revenu universel et d'une taxe sur l'automatisation, puisque les
machines autonomes se substituent au travail, le projet de changer de
République, voilà des points parmi d'autres du programme de Hamon
qui le rendaient inacceptable par les structures habituelles du
pouvoir économique ou politique ( PS compris ) et ne pouvaient être
relayés correctement par la presse. »
« Un immense
effort pour réélaborer un programme de gauche visant à
restructurer la société non plus en fonction de la répartition du
travail, devenue impossible, mais de la répartition des revenus,
tout en repensant le temps libre et le transition écologique ;
un effort tout aussi grand pour appuyer un programme de gauche sur
toutes les générations et toutes les catégories sociales
françaises. Ce sont les faits importants qui accompagnent les
élections de 2017. Ces efforts ont été partagés entre l'équipe
de Hamon et les Insoumis, sans parvenir à se conjuguer, par manque
de temps. Maintenant ce temps existe et il prend forme. »
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