samedi 20 avril 2019

FETICHISME n. m. (de fétiche) Encyclopedie Anarchiste de Sébastien Faure




Les fétiches sont des idoles grossières, des animaux, des pierres, des arbres, auxquels la superstition et la crainte prêtent une certaine puissance, et qui sont adorés comme des dieux par les « sauvages ». Le fétichisme est le culte des fétiches. Le fétichisme est très répandu en Orient, et surtout dans le centre de l'Afrique, parmi les populations nègres. S'il est vrai que « le fétichisme est la première religion des hommes encore dans l'enfance de l'intelligence » (Virey), il faut en conclure que l'intelligence de l'humanité prise en son ensemble n'a que peu sensiblement évolué, car les peuples modernes sont tout autant que les peuples des premiers âges imbus de fétichisme. Les fétiches ont changé, mais l'esprit d'adoration est resté le même. Quelle différence y a-t-il entre ce chrétien civilisé qui adore l'image de la vierge, ou qui égrène son chapelet, et ce nègre du Dahomey qui réclame l'assistance d'un petit monstre en pierre pour chasser les génies invisibles et malfaisants? Y a-t-il plus d'intelligence chez ce juif moderne qui se couvre, pour faire ses prières, d'une écharpe appelée taleth, et dont il embrasse les franges avec adoration, que chez cet habitant de l'Asie centrale qui n'a pas encore été touché par les progrès de la science? Chez les uns comme chez les autres, ce fétichisme est une marque indélébile d'ignorance. Cette adoration aveugle des fétiches déborde même des cadres de la religion. Le peuple est imbu de fétichisme et ses superstitions se manifestent également sur le terrain politique et social. Il n'adore plus les fleuves, les rivières et les morceaux de bois, mais il se découvre avec piété devant un morceau de chiffon. Le drapeau est un fétiche devant lequel il courbe le genou, et pour lequel il s'est fait, se fait et se fera encore tuer. « Ce qui distingue le fétichisme de l’idolâtrie, nous dit le Larousse, c'est que les idoles ne sont, au moins pour la partie éclairée de leurs adorateurs, qu'une représentation de la divinité, un symbole au-dessus duquel plane l'esprit divin ». Question de nuances sans aucune importance en regard du résultat. Que le fétiche soit considéré comme une divinité ou comme le représentant ou le symbole de cette divinité, le fétichisme n'en est pas moins absurde, ridicule, et la vénération d'un être ou d'un objet dont le pouvoir est purement imaginaire est un facteur de régression sociale. Le culte des fétiches subsiste encore dans les nations qui se parent d'un vernis de civilisation, et c'est ce qui permet toutes les spéculations honteuses de la religion et de la politique qui visent au même but : l'asservissement du peuple. Il faut combattre tous les fétichismes, ce sont des sources d'abrutissement et d'esclavage.

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