samedi 6 avril 2019

Journal de la Commune


Aux membres de la Ligue d’union républicaine des droits de Paris

Citoyens,
Les soussignés, chargés par vous d’aller présenter au gouvernement de Versailles votre programme et d’offrir les bons offices de la Ligue pour arriver à la conclusion d’un armistice, ont l’honneur de vous rendre le compte suivant de leur mission :
Les délégués ayant donné connaissance à M. Thiers du programme de la ligue, celui-ci a répondu que, comme chef du seul gouvernement légal existant en France, il n’avait pas à discuter les bases d’un traité, mais que cependant il était tout disposé à s’entretenir avec des personnes qu’il considérait comme représentant le principe républicain, et à leur faire connaître les intentions du chef du pouvoir exécutif.
C’est sous le bénéfice de ces observations, qui constataient d’ailleurs le véritable caractère de notre mission, que M. Thiers nous a fait sur les divers points du programme les déclarations suivantes :
En ce qui touche la reconnaissance de la République, M. Thiers en garantit l’existence, tant qu’il demeura à la tête du pouvoir. Il a reçu un Etat républicain, il met son honneur à conserver cet Etat.
En ce qui touche les franchises municipales de Paris, M. Thiers expose que Paris jouira de se franchises dans les conditions où en jouiront toutes les villes, d’après la loi commune, telle qu’elle sera élaborée par l’Assemblée des représentants de la France. Paris aura le droit commun, rien de moins, rien de plus.
En ce qui touche les franchises municipales de Paris, M. Thiers expose que Paris jouira de ses franchises dans les conditions où en jouiront toutes les villes, d’après la loi commune, telle qu’elle sera élaborée par l’Assemblée des représentants de la France. Paris aura le droit commun, rien de moins, rien de plus.

En ce qui touche la garde de Paris, exclusivement confiée à la garde nationale, M. Thiers déclare qu’il sera procédé à une organisation de la garde nationale, mais qu’il ne saurait admettre le principe de l’exclusion absolue de l’armée.
En ce qui concerne la situation actuelle et les moyens de mettre fin à l’effusion du sang, M. Thiers déclare que, ne reconnaissant point la qualité de belligérants aux personnes engagées dans la lutte contre l’Assemblée nationale, il ne peut ni ne veut traiter d’un armistice, mais il dit que, si les gardes nationaux de Paris ne tirent ni un coup de fusil, ni un coup de canon, les troupes de Versailles ne tireront ni un coup de fusil, ni un coup de canon, jusqu’au moment indéterminé où le pouvoir exécutif se résoudra à une action et commencera la guerre.
M. Thiers ajoute : quiconque renoncera à la lutte armée, c’est-à-dire quiconque rentrera dans ses foyers en quittant toute attitude hostile, sera à l’abri de toute recherche.
M. Thiers excepte seulement les assassins des généraux Lecomte et Clément Thomas, qui seront jugés, si on les trouve.
M. Thiers, reconnaissant l’impossibilité pour une partie de la population actuellement privée de travail de vivre sans la solde allouée, continuera le service de cette solde pendant quelques semaines.
Tel est, citoyens, le résumé succinct mais fidèle de la conversation de vos délégués avec M. Thiers. Il n’appartient pas à vos délégués d’apprécier, d’une façon quelconque, jusqu’à quel point les intentions manifestées par M. Thiers répondent ou ne répondent pas aux vœux de la population parisienne. Le devoir de vos délégués consiste seulement à vous rapporter les faits sans commentaire, et le présent exposé n’a et ne peut avoir d’autre objet que l’accompagnement strict de ce devoir.

A. DESONNAZ, BONVALLET, ARMAND, ADAM.

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