Endroit
qui va en tournant. Les détours d'une rue, d'un fleuve, d'une
montagne. Faire un détour signifie prendre un chemin qui éloigne du
but auquel on doit arriver. Ce mot qui s'emploie au propre et au
figuré, a, dans l'un et l'autre sens, la même signification. On dit
d'un orateur qui, en prononçant un discours, use de ménagements,
s'exprime indirectement, qu'il emprunte des détours pour arriver à
sa conclusion. Parfois les intentions de celui qui use de ces
procédés, sont bonnes ; mais en général le détour, en matière
politique et sociale, cache la ruse et n'est qu'un subterfuge employé
pour masquer des desseins inavouables et arriver à bout de quelque
chose. « La ligne droite est toujours la plus courte d'un point à
un autre » ; c'est donc celle-là qu'en toute logique il convient
d'adopter si l'on veut avec rapidité atteindre le but que l'on
poursuit. La politique semble combattre cet élémentaire principe de
géométrie, et les politiciens en sont adversaires ; il n'y a donc
pas lieu de s'étonner de ce qu'ils usent de détours afin de
détourner l'attention de leurs victimes de l'objectif réel pour
lequel ils se dépensent. Nous avons dit par ailleurs, et nous
répétons sans cesse, car cela nous apparaît comme une vérité
lumineuse, que la politique n'a d'autres raisons d'être, que de
détourner le peuple de ses obligations, de le tromper sur la route
qu'il doit suivre, de le conduire sur des voies sinueuses, difficiles
à suivre, et de le perdre dans les détours d'un labyrinthe duquel
il ne peut plus s'échapper. S'il est vrai, et nous le croyons, que
le bonheur de l'humanité, que l'égalité et la fraternité ne
peuvent exister que lorsqu'aura disparu sur toute la surface du globe
l'exploitation de l'homme par l'homme, et par extension tout ce qui
concourt
au
maintien de l'arbitraire, de l'inégalité, et de l'autorité, il
n'est pas besoin de faire des détours pour réaliser cet idéal,
L'on nous objecte qu'une période transitoire est nécessaire, que
l'homme, corrompu par des siècles et des siècles d'hérédité, est
incapable de vivre une existence saine, physiquement et moralement,
on prétend que maintenu depuis toujours dans l'obscurité,
l'Individu ne saurait s'acclimater brutalement à la lumière trop
vive de la vérité et du bonheur et qu'il se livrerait à des excès
déplorables, néfastes à l'avenir de l'humanité. Qui dit cela?
Sinon ceux qui ont intérêt à emprunter des détours ou des
aveugles et des inconscients qui ont eux-mêmes peur de la lumière?
Le temps perdu ne se rattrape jamais, hélas! Et trop de temps a déjà
été perdu par le peuple. Lorsque l'on a compris les causes d'un
mal, il n'est pas bon d'hésiter à le combattre. Loyalement,
courageusement, sans détour il faut aller droit au but. S'il est des
obstacles, on les franchit ; s'il est des difficultés on les
surmonte. L'union fait la force, et la force de tous les opprimés
serait colossale, s'ils le voulaient. Qu'ils le veuillent : au terme
de la route droite, est la liberté.
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