« Ailleurs, les facteurs les moins ignorants de la
fonction théorique de ce bordereau ne sont pas pour autant ceux qui les renseignent
le mieux. Lorsqu’ils ne sont pas indifférents, ils sont confrontés à un
dilemme. Le remplir, ou de la compléter, consciencieusement, en s’usant les yeux
sur des lignes minuscules, en l’annotant à la main le plus clairement possible,
c’est fournir un effort sans pouvoir contrôler ni que les informations seront
répercutées dans l’outil ni que les durées associés seront satisfaisantes ;
c’est paraitre cautionner un modèle d’évaluation de la charge de travail que
ces facteurs récusent par ailleurs. Mais ne pas remplir le bordereau, c’est d’emblée
se tirer une balle dans le pied, puisque tout ce qui n’est pas noté n’est pas
compté, tout ce qui n’est pas compté n’a pas de durée, si bien que le facteur n’a
même plus le soupçon, mais la certitude, que la durée de sa tournée sera
sous-estimée et que, s’il s’en plaint, sa hiérarchie lui fera porter le
drapeau. »
« La Poste s’autorise à décompter jusqu’à des centième
de centiminute, mais qui est capable de jauger ses propres gestes à cette aune,
c’est-à-dire 6 millièmes de seconde ? Quel chronométreur, quel « vérif »,
lorsque le métier existait encore, aurait pu prétendre que la connexion entre
ce qu’il voit, ce qu’il décide et ce que fait son doigt sur le chronomètre est si
rapide qu’elle autorise une précision aux 6 millièmes de seconde ? »
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