samedi 6 mai 2023

La maladie du sens de Bernard Noël

 "Il est mort volontairement d'une mort naturelle".


"Il grandit désormais dans le vide qu'est son propre nom".


"Il a été vivant, me dis-je parfois, très vivant, et je suis le tombeau de cette vivacité dans la mesure où moi seule j'en connais le goût, les élans. Il aurait dû m'expliquer comment allait m'échoir la charge de sa présence tandis que les autres s'occuperaient de son absence".


"Il désirait, cela je le savais, atteindre par le son une région qui attendait son éveil de la sensibilité et non pas de l'intelligence, mais qui enrichirait cette dernière tout comme le goût enrichit les aliments".


"Il m'avait confié la gestion de sa réalité ou plutôt - mais je tremble en le disant- il avait fait de moi le miroir grâce auquel il se voyait exister".


"Il disait: "Appelle moi par le nom que tu tracerais sur une enveloppe si j'étais absent"".


"Il a dû former là devant (le miroir placé devant son bureau NDLR) ce concept de la littéralité que ses disciples ont transposé dans le but d'éradiquer le lyrisme, et ce faisant trahi. Il était pour le chant, pour la sonorité chantante, énergique et sensée, non pour le littéral qui, d'ailleurs ne veut rien dire dès qu'on entre dans le langage, donc dans le domaine des équivalences et de la représentation déviante".


"Il savait que la capacité de concevoir ne lui procurait pas celle de réaliser, et même que l'originalité de son destin se tenait dans la brêche de cette différence".


"L'explication orphique de la terre est le seul devoir du poète et le jeu littéraire par excellence: car le rythme même du livre alors impersonnel et vivant, jusque dans sa pagination, se juxtapose aux équations de ce rêve, ou Ode".


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