Je reviens sur cet ouvrage puisque maintenant j'ai lu quelques pièces de Bernard Noel que je ne connaissais pas, il y a peu et que je connais peu depuis que j'ai commencé à le lire.
A l'ouverture de l'ouvrage: "Toujours la même vieille malédiction des genres. Laquelle divise entre la littérature et la pensée - division familière, mais violente.
"Qui ne divise pas moins ( division à la puissance deux) entre la littérature elle-même; je veux dire: entre la poésie et le roman. Etrange division, ou absurde, qui ne marque pas seulement la possibilité d'une prédilection ( admissible, compréhensible), mais celle d'une antinomie, sinon d'une hostilité. Division qu'il faut du lire ainsi: poésie ou roman. L'histoire de la littérature strictement "poétique" le permet peut-être: Rimbaud, Breton, etc. Elle n'y oblige pas, pourtant: Nerval encourage même au contraire ( pas le moindre des noms à pouvoir la représenter, et que Bernard Noël aime tout particulièrement). Reverdy aussi..."
Que dit-il que nous ne nous cachions depuis des années? Les uns et les autres doivent entrer dans des cases hermétiques qui ne doivent pas être poreuses entre elles sous peine de troubler l'eau claire de la rivière, de battre les cartes et, pourquoi pas, de permettre des connivences.
Lit-on Bernard Noël pour connaitre l'auteur ou pour lire des ouvrages de qualité? D'ailleurs, nous permettent-ils de mieux connaitre cet écrivain, nom bien réducteur lorsque l'on balaie rapidement l'oeuvre gigantesque qu'il laisse derrière lui. En une vie, allons-nous pouvoir tout lire alors que lui, n'a fait que vivre chaque mot, chaque ligne?
On s'y attache, on s'y acharne, on s'y perd pour ne plus se retrouver que quelques phrases plus loin, nu et désemparé de ne lire que lire pour lire.
Lorsque nous lisons cette poésie, pour la prendre de face, il nous faut être nu, libre de toute entrave. les règles et les lois n'ont guère de place dans cette poésie. Peu d'auteurs ont réussi cela: Rimbaud qui se voulait absolument moderne comme il l'a dit ou que Kundera lui fait dire, Verlaine, forcément (l'un sans l'autre, c'est la vie des deux qui s'efface) et puis il y a "Divagations" de Stéphane Mallarmé.
Mais que nous dit également Michel Surya sur l'œuvre de Bernard Noël? Cette œuvre qui fait de notre vie une course perdue à la lecture. Qui nous pousse à la psychose. Ai-je bien tout lu?
"Bernard Noël a-t-il beaucoup écrit? trop pour pouvoir avoir tout lu de lui (ampleur de la tâche de lire toute son œuvre, qui tient à la fin, quelque peu, de celle, sans répit, qu'il y aura eu à l'écrire toute) ? On s'en étonne, parfois, autant qu'on l'admire, souvent.
L'admiration devrait l'emporter, et l'étonnement étonner.
Bernard Noël n'a bien sûr pas trop écrit, il a écrit en trop. En trop? Ailleurs, ailleurs, autrement, autre chose. Soyons clairs: dire qu'il n'a pas trop écrit mais écrit en trop, c'est dire qu'il n'a pas écrit que de la poésie, pour laquelle il est le plus connu, quand il n'est pas connu que pour elle. Regrets (en passant): combien de ses lecteurs qui n'ont lu qu'elle (quand bien même l'auraient-ils bien lue), qui ont peu lu de ses récits, de ses romans (etc)? Qui n'ont du coup pas su ni pu lire quels récits, quels romans (etc) il y a aussi dans sa poésie; ni quelle "poésie" il y a dans ses récits, romans (etc). Une telle défaillance du jugement n'est jamais la défaillance ds'un jugement mais du principe de tout jugement".
Encore ce jugement glaçant de la part de Michel Surya: serait-il le seul à lire "bien"? A comprendre tout, ce qui est dit, et ce qui est tu? Qui lit le mieux? Celui qui aime et ne peut juger ou celui qui n'aime pas et n'est qu'un juge?
Ou se place la bonne lecture?
Lit-on mieux lorsque nous ne cessons de prouver que l'on a une bonne mémoire en citant ou celui qui peut, dans une explication, démontrant son amour de l'ouvrage, inciter ses interlocuteurs à lire cet auteur?
J'ai; de ma modeste position de "lecteur" (médiocre ou sublime) cette sensation que Bernard Noël est essentiel pour moi, pour l'idée que j'ai de la littérature et donc je vous invite à le lire.
Un ensemble de ses textes sont compilés dans l'ouvrage qui a pour titre: "La comédie intime"'.
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