dimanche 10 février 2019

Lignes N° 58 Migrance contre frontières




Personnes exilées mortes en méditerranée et fermeture des frontières : Un crime contre l'humanité

« Ainsi donc, depuis le début des années 2000, les disparitions en Méditerranée des personnes exilées s'élèvent à près de 40 000, hommes, femmes et enfants. Des exilés fuyant des situations de détresse extrême ( des actes de guerre à des basculements climatiques en passant par la répression de régimes autoritaires et le dénuement économique), des exilées et des exilés contraints à une migration destinée à assurer leur survie, des exilées et des exilés que, depuis l'installation des centres de tri que sont les « hotspots » en Grèce en automne 2015, on répartit de force deux catégories discriminantes : d'une part les réfugiés, c'est-à-dire des demandeurs d'asile susceptibles d'accéder très éventuellement à un statut de réfugié ; d'autre part les migrants, considérés comme des « réfugiés économiques » et, à ce titre, passibles d'une expulsion immédiate. »

« Cette politique de fermeture des frontières aux personnes désormais accusées d' »immigration illégale » s'est traduite de différentes manières : par l'érection de barrières et de murs physiques de Ceuta et Millila, enclaves espagnoles à l'extrême ouest de la Méditerranée, jusqu'au mur sur le fleuve Evros entre le nord de la Grèce et la Turquie ou à la barrières de barbelés déroulée à la frontière turco-bulgare au nord-est du bassin méditerranéen ; par des contrôles policiers coordonnés et renforcées par l'agence Frontex, devenue « agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes » qui apporte un soutien logistique et pratique aux polices des frontières nationales ; par de vastes opérations de filtrage des entrées irrégulières, telle l'opération répressive « Triton » qui a remplacé dès novembre la campagne italienne d'accueil des migrants « Mare nostrum », ou telle l'opération (EUNAVFORMED) de destruction des embarcations utilisées par les migrants sous prétexte de lutte contre les passeurs et les trafiquants de migrants ; enfin par de vastes mesures d'externalisation des frontières de l'UE. On citera pour sinistres exemples l'accord passé avec l'UE ( par l'intermédiaire du Conseil européen) et la Turquie de mars aux termes duquel ce pays retient sur son territoire, contre six milliards d'euros et le silence sur le non-respect des droits de l'homme dans le pays, pas moins de 3 millions de réfugiés ; ou les accords récemment pris avec une Libye en proie aux dissensions politiques que l'on sait : opération « Sophia » de collaboration militaire avec les garde-côtes libyens, renforcement des camps de rétention, négociations avec les milices locales, renvois des migrantes et migrants dans leur pays d'origine,etc... »

« Les quarante milliers de disparitions et de morts entraînés par la politique discriminatoire de la fermeture des frontières de l'UE aux exilées et exilés inscrivent sans doute ce chiffre sinistredans la définition officielle d'un crime contre l'humanité : « « la violation délibérée et ignominieuse des droits fondamentaux d'un individu ou d'un groupe d'individus inspirée par des motifs politiques, philosophiques, raciaux ou religieux »et ceci par une action politique délibérée.
Rappelons qu'au delà de la persécution d'un groupe ou du recours systématique à la disparition forcée, l'article 7 du « Statut de Rome » de la cour pénale internationale ( 17.7.1998) désigne également comme crime contre l'humanité «  les autres actes inhumains de caractère analogue [i.e. : meurtre, déportation, emprisonnement, réduction en esclavage, torture, persécution etc] causant intentionnellement de grandes souffrances ou des atteintes graves à l'intégrité physique ou à la santé physique ou mentale » et cela « lorsqu'il est commis dans le cadre d'une attaque généralisée ou systématique lancée contre toute la population civile et en connaissance de cette attaque. »


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