Commission
des barricades
Séance du 12
avril 1871
PRÉSIDENCE
DU CITOYEN ROSSEL chef d’état-major du ministère.
La séance
est ouverte à trois heures et demie.
Sont
présents : le citoyen Rossel, au lieu et par ordre du général
délégué à la guerre ; Miot, membre de la Commune ; Blin, colonel,
chef de la 5e légion, spécialement convoqué pour la séance ;
Thirion, de la 4e compagnie du génie ; Havet de la 3e compagnie,
tous commandants desdites compagnies ; Buyat, délégué du 14e
arrondissement, Guillot, du 11e, Jean, du 9e, Gaillard père, du 1er
et du 20e arrondissements.
Le citoyen
Thirion accepte les fonctions de secrétaire.
Le citoyen
président met en discussion l’examen du système actuel des
barricades.
Les citoyens
Miot, Gaillard père et Buyat prennent successivement la parole pour
examiner et critiquer diverses portions du système existant.
La
commission, considérant que les barricades actuelles ont été
construites en vue d’un genre de guerre tout différent de ce que
nous aurons à faire sur des points qui ne son plus menacés, que
plusieurs de ces barricades entravent la circulation sans rendre
aucun service, et surtout qu’elles sont construites en pavés, et
deviennent très dangereuses pour les défenseurs si elles étaient
attaquées par l’artillerie, à cause des éclats de pierre, que
détacheraient les projectiles ;
Décide que
les barricades actuelles seront détruites par le service de la
voirie municipale au fur et à mesure de la construction de nouvelles
barricades, formant un système destiné à défendre la ville contre
les attaques de l’extérieur.
Le citoyen
président met en discussion l’emplacement du système de défense
par les barricades ; il appelle l’attention de la commission sur la
valeur de l’enceinte fortifiée, qui est la meilleure de toutes les
barricades, et ensuite sur les lignes de défense naturelles de la
ville, telles que le chemin de fer de ceinture et les boulevards
extérieurs.
La
commission examine successivement le système de défense à adopter
pour les différentes portions de la ville (Cette partie du
procès-verbal n’est pas destiné à la publicité).
La
commission constate que, par suite d’un malentendu, les
municipalités de plusieurs arrondissements n’ont pas nommé de
délégués pour prendre part aux délibérations. Elle décide que
le délégué de chaque arrondissement sera dépositaire du plan de
la défense de l’arrondissement. Le citoyen Thirion est chargé
d’étudier les emplacements des travaux prescrits pour le 8e
arrondissement.
La
commission arrête l’emplacement de deux lignes de barricades sur
toute la portion opposée aux attaques des troupes de Versailles.
Elle décide que les mêmes lignes s’étendront sur tout le tour de
la ville.
Le citoyen
Miot, appelé par ses devoirs de membre de la Commune, se retire à
cinq heures. Les citoyens chefs de légion sont également autorisés
par la commission à ne plus prendre part aux discussions, vu
l’urgence de leurs autres occupations.
Le citoyen
président met en délibération le mode de construction des
barricades.
Le citoyen
Guillot présente un système de barricades à étage, avec étage
inférieur voûté et crénelé.
La
commission décide qu’un rapport écrit sera présenté par le
citoyen Guillot sur son système.
La
commission arrête la forme et les dimensions de deux types de
barricades, l’un pour les grandes voies de communication, l’autre
pour les petites rues.
Ces
barricades sont en terre, avec un fossé de deux mètres de
profondeur du côté de l’ennemi, et un petit fossé de 50 à 80
centimètres de profondeur du côté intérieur.
Le citoyen
gaillard père propose que les égouts soient coupés dans le fossé
et miné en avant de la barricade. Il présente que les barricades
sont principalement destinées à démontrer à l’ennemi et à la
population que pour prendre Paris, il faudra le détruire maison par
maison.
Il faut donc
accumuler dans les barricades les moyens de défense les plus propres
à agir sur le moral de l’ennemi. Il n’est pas probable qu’elles
servent, car l’attaque n’aura pas l’énergie d’avancer
jusque-là, mais avec cette organisation, Paris défie la trahison et
les surprises.
Un membre
fait remarquer qu’on accélérera la construction en utilisant les
pavés pour le noyau de la barricade. Il y a dans chaque
arrondissement de grands dépôts de pavés préparés à l’avance.
La commission adopte ce système, pourvu que les pavés, soient
recouverts d’un mètre cinquante de terre franche du côté tourné
vers l’ennemi. La terre destinée à revêtir le massif en pavé
sera prise dans le grand fossé pour le parapet, et dans le petit
fossé pour le côté intérieur de la barricade.
Un membre
insiste sur l’urgence d’une action immédiate, révolutionnaire,
au lieu d’une action méthodique ; il a confiance dans la
spontanéité des efforts individuels, qui donneront des résultats
bien plus rapides qu’un procédé régulier. La commission entre
dans ces vues et décide que les barricades doivent être étudiées
méthodiquement et exécutées révolutionnairement.
La
commission arrête ainsi qu’il suit le tracé des barricades, sauf
modifications dans les cas particuliers :
La
commission décide que la conservation des tuyaux du gaz et de l’eau
sera assurée jusqu’au moment de l’attaque, aussi bien que celle
des égouts, qu’il n’est pas nécessaire d’ouvrir pour les
miner.
La
commission arrête ainsi qu’il suit l’emploi des égouts pour les
mines.
Elle répudie
absolument, comme trop lente, toute construction et fouille de
galerie de mine, mais elle admet que des fourneaux de mine seront
faits au fond et sur le côté des égouts, et arrête ainsi qu’il
suit leur position et leur charge.
Premier
fourneau à 20 mètres en avant du fossé, charge, 40 kilog. de
poudre.
Second
fourneau à 12 mètres plus loin que le second, charge, 100 kilog.
Et ainsi de
suite sir les circonstances le permettent, toujours avec la charge de
100 kilog. Chaque fourneau devra être amorcé séparément.
La
commission décide que le procès-verbal de la séance sera publié
et affiché à l’exception des mesures qui règlent l’emplacement
et la stratégie des barricades.
La
commission charge le citoyen Gaillard père de faire lithographier et
livrer au public et au commerce les profils recommandés par la
commission. Les citoyens Morel, 4e arrondissement ; Thirion, 8e; 9e;
Guillot, 11e ; Buyat, 14e; Leduc, 15e; Darnal, 16e; Gaillard père,
1er et 20e, reçoivent pleins pouvoirs pour l’organisation des
barricades dans leurs arrondissements.
La
commission décide que la rue du Rempart sera barricadée de chaque
côté de chaque porte, ainsi que toutes les voies aboutissant aux
portes, et que les maisons d’encoignures seront organisées
militairement.
La
commission décide que la prochaine séance aura lieu demain 13
avril, à trois heures après midi, au ministère de la guerre ; on y
examinera les mesures prises et les études faites dans chaque
arrondissement. En attendant, chaque délégué doit opérer
d’urgence, et faire commencer le travail avec le concours de la
délégation communale, en se conformant au plan d’ensemble adopté.
Chaque
barricade sera composée de deux portions appuyées l’une au côté
droit, l’autre au côté gauche de la rue, et laissant entre elles
entre elles et les maisons un passage de trois mètres. Cependant,
dans les voies qui ne seront pas nécessaires à la circulation des
voitures, on ne fera qu’une barricade, avec un passage de 1 mètre
de largeur à l’un des extrémités.
La
commission arrête ainsi qu’il suit le profil d’une barricade
pour les grandes voies de communication
Profondeur
du fossé, 2 mètres.
Largeur, ce
qu’il faudra pour le massif.
Hauteur de
la barricade, 4 mètres.
Epaisseur en
haut, 6 mètres.
Largeur de
la banquette de tir, 2m50.
Talus du
côté de l’ennemi, 4 mètres de base. Talus montant à a
banquette, 5m50 de base.
Epaisseur
totale, 19 mètres. Hauteur du massif de pavés, 2m50.
Epaisseur au
pied, 15 mètres. Epaisseur en haut, 7m50.
Fossé
intérieur, ad libitum.
Le dessus de
la barricade et le dessus du massif de pavés doivent être en pente
du côté de l’ennemi.
La
commission arrête ainsi qu’il suit le profil des barricades pour
les rues détournées
Profondeur
du fossé, 2 mètres.
Largeur, ce
qu’il faudra.
Hauteur de
la barricade, 3 mètres.
Epaisseur en
haut, 2 mètres. Largeur de la banquette, 2m50.
Talus du
côté de l’ennemi, 3 mètres. Talus montant à la banquette, 3m50.
Epaisseur au
pied, 11 mètres. Hauteur du massif de pavés, 1m60.
Epaisseur au
pied, 8 mètres Epaisseur en haut, 3m50.
Fossé
intérieur, pas plus de 80 centimètres de profondeur.
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