Sur la franc-maçonnerie
« BIEN
QU’ÉTANT plutôt indifférent à ce qu’on peut dire de moi, je
me vois aujourd’hui obligé de répondre aux bruits que l’on fait
courir et qui pourraient me nuire.
La
dernière invention des milieux socialistes est que je serais
franc-maçon. Je crois savoir qui en est l’auteur, mais je n’en
ai pas encore la preuve, je vais donc répondre sans me soucier de
cet aspect.
Voilà
les faits.
Je
fus franc-maçon quand j’étais un brin plus jeune que maintenant,
du 19 octobre 1875 à mars-avril 1876. […] Je portais les
lauriers d’une certaine popularité [acquittement lors d’un
procès en 1875, voir la biographie, p. 13] et les francs-maçons
voulaient que je sois membre de leur mouvement, et ils m’en firent
la proposition. J’ai présenté l’objection de mes idées
socialistes et anarchistes, et on me répondit que la
franc-maçonnerie était en faveur du progrès illimité et
qu’elle pouvait fort bien inclure l’anarchisme dans son
programme.
J’ai
dit que je ne pouvais accepter la formule du serment traditionnel, et
la réponse a été que dans mon cas,
il serait suffisant de promettre de lutter pour le bien de
l’humanité.
Je
n’ai pas voulu me soumettre aux rites ridicules de l’initiation
et j’ai su que j’en serai dispensé. En un mot, ils voulaient
m’avoir à tout prix et à la fin j’acceptai… en partie parce
que j’avais en tête l’idée de reprendre la tentative sans suite
de Bakounine de faire revenir la franc-maçonnerie à ses débuts
idéalistes et d’en faire une véritable société révolutionnaire
(1864-1865).
Je
remarquai bientôt que je ne servais que les intérêts de certains
frères, qui étaient les plus grands mystificateurs.
Mais
j’y ai rencontré des jeunes enthousiastes accessibles aux idées
socialistes et je suis resté pour y faire de la propagande, d’où
un grand scandale et un accès de rage des principales personnalités.
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