Le grisou
est un gaz hydrogène carboné, mélangé plus ou moins d'azote et
d'acide carbonique. Il est moins combustible que tous les autres gaz,
mais il devient explosif lorsque, dans un certain espace, il forme
plus que la treizième partie de l'air atmosphérique auquel il est
mélangé. Formé dans les pores de la houille par la décomposition
de matières végétales, le grisou s'accumule et séjourne dans des
poches naturelles existant au sommet des couches de charbon.
Lorsqu'une de ces poches crève, le grisou s'en échappe et le
moindre contact avec la flamme produit l'explosion. Comme il est
impossible au mineur de travailler sans lumière, on comprend tout le
danger que comporte ce métier. Des milliers et des milliers de
malheureux esclaves du sous-sol ont déjà laissé leur vie au fond
de la mine et chaque jour la liste macabre s'allonge. Le grisou fait
à chaque moment de nouvelles victimes malgré la lampe inventée en
1815 par Davy et qui, dans une certaine mesure, met le mineur à
l'abri des coups du grisou. Il faut dire que, bien souvent, les
catastrophes minières sont dues à la négligence coupable et
intéressée des compagnies exploitantes. Les bénéfices scandaleux
réa aux travailleurs le maximum de garanties ; mais les compagnies
minières ne sont touchées que par les sommes de profit réalisé et
n'hésitent pas à pousser la production au point de mettre en danger
l'existence du personnel. Chaque fois qu'un coup de grisou se produit
au fond d'une mine, jetant sur le pavé veuves et orphelins, des
promesses sont faites assurant les travailleurs que, dans l'avenir,
toutes précautions seront prises pour que de semblables catastrophes
ne se reproduisent plus. Mais le temps passe, l'oubli aussi, et les
morts s'ajoutent aux morts. Le grisou poursuit ses ravages. Quand
donc les progrès de la science seront-ils mis au service de la
collectivité ? La houille blanche pourrait de nos jours, si des
intérêts particuliers n'entraient pas en jeu, répondre aux besoins
des populations et ainsi se terminerait l'effrayant cauchemar du
grisou. Notre société bourgeoise et capitaliste, conservatrice à
l'excès, semble ignorer toutes les richesses naturelles qui,
sagement exploitées, n'obligeraient plus le mineur à travailler
dans la profondeur de la nuit, pour arracher à la terre, la lumière
et la chaleur. C'est justement parce que la société moderne, mue
par des intérêts particuliers, ne veut pas mettre au service de la
collectivité tout ce qui pourrait être utile aux humains, que nous
sommes des révolutionnaires. Il serait, certes, fou de prétendre
que, dans les conditions présentes, au lendemain d'une révolution
victorieuse, la nouvelle société serait immédiatement à l'abri de
toutes catastrophes minières et que le grisou ne ferait plus de
victimes. Mais nous pensons que, dans une société organisée
sagement, les catastrophes seraient de moins en moins fréquentes,
tous les progrès de la science étant mis au service du travailleur
et toutes les précautions étant prises pour garantir la vie de ceux
qui œuvrent péniblement pour assurer le bien-être de l'humanité.
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