Liberticides voluptuosités
M. A
C’était aujourd’hui ou jamais.
Lorsqu’elle descendit
l’escalier, ses pas ont résonné dans ma tête. J’allais faire ce que je ne
pensais pas être capable de faire. Elle est apparue dans l’entrebâillement de
la porte, elle arriva sur les dernières marches et elle s’arrêta. Dès qu’elle
m’aperçut, elle me fixa, la bouche entrouverte. Lentement, je me suis levé et, sans
me presser, je suis arrivé devant elle. A aucun moment, nous ne nous étions
quittés du regard. Des secondes. Une éternité passa dans ces secondes. Puis,
lentement, comme un geste non forcé, j’ai posé le plat de ma main sur son sexe.
On en sentait la chaleur au travers de son pantalon. Sans geste, pas de
violence, nos yeux rivés les uns dans les autres, elle esquissa un sourire,
tout en laissant échapper un léger souffle. Le mouvement imperceptible qu’elle
eut, soit de la hanche, soit de la cuisse, fit que ma main épousa la forme de
son sexe.
Délivrance ?
Soulagement ? C’était fait. Enfin. Déjà. On ne savait pas. Mon avenir
avait été en sursis, suspendu, jusqu’à ce soupir.
Il n’y eut rien de plus.
C’était fait. Enfin. Déjà. On ne
savait pas. Mon avenir avait été en sursis jusqu’à ce soupir.
Il n’y eut rien de plus.
Cela eut-il lieu ?
Fantasmer ? Espérer ? Par qui ?
Cela n’eut plus jamais lieu.
Cela n’eut jamais lieu.
Pourquoi cela ne devait jamais
avoir eu lieu ? Consentante, convaincante.
Un fantasme.
Une invasion érotique doit-elle
se concrétiser par quelques gestes que ce soit ?
Peut-elle rester indéfiniment suspendue ?
Entre les protagonistes ? Ou juste dans un espace déterminé qui ne pourra
jamais déborder vers un autre espace. Tout cela était cloisonné. Un plaisir
parce que non concrétisé. Une suspension hallucinatoire. Un scalpel sur des
nerfs tuméfiés, sur des plaies à vif.
Ou alors, une source d’eau
fraiche sur une brûlure. Cela pouvait-il rester en
suspension éternellement ou devait-il forcément y avoir une issue à cet
état ? Etait-ce humainement tenable ?
Mais était-ce à sens unique ? Etais-je deux ? Etais-je le seul
à ressentir cette confusion ? Les signaux reçus étaient faussés par ma
condition d’abstinent exacerbé. Je ne la regardais plus comme une jeune fille.
Je la regardais comme une potentialité
exubérante, comme un paysage en mouvement que je pouvais admirer, ou toucher,
sentir.
Cela ne s’est pas passé. Ne se
passera jamais ?
Lorsqu’elle descendit les
marches, ses pas étaient lourds. Elle stoppa dans l’encadrement de la porte.
Elle me fixait. En suspens.
Elle me sourit. En suspens.
Et moi, je ne la quittais pas
des yeux, des images y dansaient. Elle imprima un sourire.
Elle
passa un petit bout de langue sur sa lèvre inférieure, exhala un soupir.
Sans doute de déception,
peut-être de frustration.
Ce
petit bout de langue que j’aurais aimé manger, dévorer, prendre, lécher. En boire
la salive. Finir tremper car nous nous serions léché le corps entier. Poils et
pubis compris. Fesses, sexe et trou du cul. Lécher, jusqu’à plus soif, jusqu’à
plus de suc, de jus. Bestialement, nous sommes des bêtes, des animaux.
Elle passa à côté de moi. Je
passai une langue sur ma lèvre inférieure et j’exhalais un soupir, libérateur.
Etais-je donc libérer de quelque chose d’improbable, d’irréalisable ?
L’exécution d’un geste qui ne
résistait pas à l’envie était-il une libération ou le destin achevé ? Ou
la conséquence inévitable de la pensée qui se finit ? Qui se finit pour
peut-être un nouveau commencement ? Parcourir ainsi les fins pour ne plus
voir que des débuts. Je surveille ces parcours, je le veux, je les souhaite.
Mais n’en suis-je pas prisonnier dorénavant ? Vais-je pouvoir m’en
délivrer ? La liberté n’est pas ce que l’on ne peut pas éviter. Celle-ci
est complète lorsque l’on a encore le choix. Je ne l’avais plus.
Je n’en ai eu conscience que lorsqu’elle descendit les marches, ses pas
étaient lourds. Elle stoppa dans l’encadrement de la porte. Elle me fixait. En
suspens. Elle me sourit. En suspens. Et moi, je ne la quittais pas des yeux,
des images y dansaient. Elle imprima un sourire, elle passa un petit bout de
langue sur sa lèvre inférieure, exhala un soupir.
J’étais devenu l’homme qui attendait un soupir, qui
cherchait un petit bout de langue. Je traquais des signes. J’étais
l’observateur de mes espoirs secrets.
Ce geste, cette pensée, tout
ça a été suspendu à un temps bien précis. Une demi-seconde plus tôt, cette
pensée n’aurait jamais existée. Une demi-seconde plus tard, le geste aurait été
fait. D’une demie seconde à une autre, je pouvais passer de l’horrible pervers
avide de viande fraiche, à celui d’homme respectueux et respectable.
Elle n’est même pas belle mais
l’animalité qu’elle dégage nous assaille, m’assaille ? Et nous transperce
de part en part.
Lorsqu’elle
descendit les marches, ses pas étaient lourds.
Elle était nue devant moi.
Etait-il normal qu’elle soit nue devant moi ? Oui. Sans doute que oui. Et
alors, je n’allais pas forcément en chercher une raison. Personnellement, ça
n’avait aucun intérêt à ce que j’en cherche une raison. C’était comme une
conséquence évidente de ce qui s’était passé la dernière fois.
Oui, mais cela s’était-il
passé ? Et si non, cet instant devenait un évènement particulier séparé de
tout. Cela ne faisait partie d’aucune histoire. Cela devenait une histoire.
Celle qui allait commencer. C’était aussi une fin.
Mais cela existait-il
aussi ? N’était-ce pas aussi un autre fantasme ? Une autre invention
de mon esprit ? Je devenais le captif de quelque chose. L’individu prisonnier
de son fantasme. D’où vient un fantasme ? De ce que l’on aimerait qu’il se
passe ? De ce que l’on aurait peur qu’il se passe ? De ce que l’on ne
voulait pas qu’il se passe, de peur de perdre le fantasme ? Je la voyais
devant moi mais était-elle là ? Réellement. En tendant les mains,
allais-je la toucher ?
Elle tournait sur elle-même et
je posais mes mains partout sur son corps.
Son
cul, ses seins, son sexe.
Elle tournait et c’est moi qui
avais la tête qui tournait. Elle transpirait énormément. Sa danse devenait de
plus en plus provoquante et je n’allais pas rester à ne rien faire.
Je
l’ai couché sur le canapé et je me suis mis à la lécher partout. Entre ses
seins, entre ses fesses. Son sexe ruisselait et, quand je l’ai pénétrée, il n’y
avait aucun obstacle.
Et encore ce soupir dont
j’étais de nouveau à la recherche.
Elle
but mon sperme avec envie, volupté. Je ne pouvais m’arrêter de la toucher, de
la lécher. Je mettais mes doigts dans tous les orifices. Je buvais ses sucs,
ses souffles, ses soupirs. Je lui mangeais sa langue. Je suçais ses doigts.
Je ne voulais pas qu’elle
disparaisse. Que cet instant s’échappe une fois encore dans ma déraison, dans
ma peur de ne rien faire. Je voulais un temps suspendu, infini. Il était
indispensable qu’elle s’échappe de tout ce que l’on connaissait. Je ne voulais
plus avoir peur pour me donner. Oser me donner pour ne pas, plus, avoir peur de
rien.
« J’aimerais…
-Silence ! Nous ne devons
pas parler, sinon le charme va se rompre et tout cela n’aura jamais existé. »
Il était trop tard, elle avait
disparu. Elle disparut mais je gardais à la bouche ses goûts, ses odeurs.
Allait-elle réapparaitre ? Allait-elle de nouveau réapparaitre ?
Voilà pourquoi, il ne fallait
pas bousculer tous ces instants là car ils sont à la merci de tout ce qui
pourrait les arrêter.
Lorsqu’elle
descendit les marches, ses pas étaient lourds.
Elle ne me regardait pas
particulièrement. Par jeu ? Par provocation ? Pour aucune raison.
Moi, je la regardais particulièrement. Je la scrutais évidemment. Je la
scrutais parce que j’espérais qu’un jour elle descendrait les marches, nue. Que
ses pas allaient résonner forts dans ma tête. Pour qu’un instant, un espace,
une image s’interpose entre la réalité et mon envie. Mes envies. Combien y
avait-il de chance qu’elle descende nue et qu’elle me regarde, qu’elle me dise
« Bonjour toi ».
Ces mots, comme un baiser
brulant qui coule dans la colonne vertébrale, la décharge électrique qui
parcourt des nerfs. Je la regarde. Qu’y a-t-il dans ses yeux ? Qui puis-je
y lire ? Qu’ai-je envie d’y lire ? J’aimerais qu’elle me fasse des
promesses. Elle me regarde mais me fait-elle des promesses ? En a-t-elle
envie ?
Elle passa près de moi. Tout
devenait, tout était…sans commune mesure avec ce que j’allais pouvoir supporter
sans rien faire.
« Bonjour
toi »
Elle n’avait aucune envie de
jeter une bouée au pauvre hère que j’étais dorénavant. Avait-elle conscience de
son pouvoir ? J’avais le droit de le lui laisser croire. Je voulais
qu’elle sache qu’elle m’avait à sa merci.
J’avais
tellement envie de la pénétrer de mes doigts, de ma langue, de mon sexe,
tellement envie qu’elle sente, qu’elle ne puisse plus lutter, qu’elle m’invite
à faire le pas.
J’avais envie de lui
hurler : « Mais putain ! Qu’est-ce que tu attends ? Putain,
mais baisons à l’envie, baisons à s’en faire mal au sexe ! Baisons !
Baisons ! »
Que je n’attendais que ça. Que
je voulais la prison pour ça. Que je voulais risquer la prison pour ça.
De quel droit allait-on
m’emprisonner ? Parce que je l’avais pris dans mes bras, que j’avais serré
son corps contre le mien, son sexe enveloppant le mien, et ce baiser dans le
cou, rien ne pouvait l’arrêter, et cette langue que je lui glisse dans le cou.
Ses pointes de seins sont tendues, je les mords dans la chemise. Elle geint,
elle se rend.
Et je la regarde passer sans
bouger, car je ne suis pas en état de me lever.
Bientôt, elle allait partir.
Bientôt, je ne la verrais
plus.
Bientôt, elle ne sera jamais
nue devant moi.
Bientôt, je resterais avec mes
envies et mes pulsions.
Bientôt, je penserais que
jamais je n’aurais dû penser à tout cela, que j’étais un malade, un pervers
dangereux.
Pourquoi dangereux puisque je
n’ai pas bougé ? Je n’ai pas bougé et je reste là alors qu’elle va donner
son corps à un autre, un jeune homme de son âge.
Et pensera-t-elle à moi
lorsque le sexe la pénétrera ? Se dira-t-elle que l’on aurait peut-être dû
le faire au moins une fois. Sans rien attendre. Désamorcer tout cela pour que
la vie reprenne. Une jeune femme, un homme. Elle pourrait être ma fille. Mais je
ne l’ai pas touché. J’ai rêvé, oh oui, j’ai rêvé. Mais je n’ai pas bougé. Je
n’ai pas bougé.
Voluptuosité Réseauides
Elle est si loin par la
distance, qu’elle m’oppresse.
Je pense encore aux
ondulations, je pense encore à la lumière, qui, un jour, est venu se ficher sur
son sein blanc. Sa peau a luit. Une goutte de sueur à perler dessus. J’aurais
pu y mettre la langue et goûter cette peau chaude, moite.
J’ai de nouveau flanché,
quelques mois plus tard, si loin, si proche, ce temps élastique qui lui
appartient, qui nous appartient.
Je les ai aperçu ses petits
seins blancs lorsqu’elle se penchait. Je les regardais, sans me rendre compte
vraiment, réellement, que j’avais les yeux dessus. Je n’avais aucune maitrise
qui ne fut une maitrise totale, elle était partielle, volontairement partielle.
Elle est si loin que je l’ai
presque prise contre moi, je l’aurais prise contre moi, dan sa volonté de ne
pas être prise par quiconque, que son odeur m’envahit parfois, sans cesse. J’ai
bien du mal à m’apaiser, je ne veux pas réellement m’apaiser. Je veux cet état
électrique instable de façon permanente, je veux être prêt pour l’éventualité qu’elle
revienne, qu’elle ne me dise rien, et que son pas lourd dans cet escalier
résonne à nouveau.
Mais ce temps, ces effluves,
ces gestes, ces corps, ces sucs et ces odeurs, ne sont que l’emprise que mon
cerveau a sur mes nerfs. Je ne lutte que juste pour ne pas sombrer dans la
folie totale. Juste l’extrême limite de la crête, ne tomber ni d’un côté ni de
l’autre. Geste juste rêvé non concrétisé, juste, juste.
Lorsque j’ai effleuré sa joue
de la mien, en un baiser chaste, en un baiser gêné, pudique, douloureusement
froid, insensible, il aurait fallu qu’en même temps, je pose ma main lourde et
chaude sur son épaule ; comme pour lui dire : « il n’est
pas là mon baiser, il est sur cette main qui te touche l’épaule, qui pourrait
prendre ton corps, te pétrir encore sauvagement comme nous l’avons fait de par
le passé. L’avons-nous fait ? L’ai-je rêvé ? »
Je souffre de ne pas l’avoir
rêver le faire, le faire en rêvant, en souffrant que de ne le rêver, que de
l’avoir rêvé, que de ne pas l’avoir fait, que de ne pas être suffisamment fort
pour résister.
Je suis celui qui est une
blessure d’attendre des messages de gens qui se moquent de lui. Complètement ou
partiellement. Je suis la quête absolue de messages qui ne viennent pas, qui ne
viendront pas, qui n’ont aucune raison de me parvenir.
Je cherche à atteindre celui
qui est parti sans me dire au revoir, sans un mot, sans un message. Un petit,
un dernier. Un dernier que je pourrais lire sans fin, comme si il venait me
chercher à la sortie de l’école. Que je mettrais ma main dans la sienne. Que je
regarderais d’en bas alors que lui me sourirais, penché vers moi.
Je n’ai pas vu ce visage
au-dessus de moi, ou si peu, ou pas du tout. La mémoire défaillante sans que je
puisse en vouloir à qui que ce soit.
M. en parle si bien de cette
absence que l’on m’a imposée par l’absurdité de la vie telle qu’elle est
conçue. La vie du travail, de la vitesse, de la folie du travail et de la
vitesse.
Soudain, alors que je ne
l’attendais plus, je vois apparaitre un message.
« Bonsoir toi ».
-J’attendais…
-Fallait venir…moi aussi je
t’attendais… »
Ce fut tout.
Ce soir-là.
Presque rien mais tout était
déjà là. Je n’avais véritablement besoin de rien d’autre. Je regardais ces
quelques mots, ils comprenaient la promesse, ils faisaient resurgir ces moments
passés qui n’avaient pas existé ou si peu, ou dans mon esprit, dans mon corps.
Mais ces mots-là, les avais-je
écrits moi-même si tant espérés ? Je regardais de nouveau l’espace
discussion. Je scrutais.
Je voulais plus. Je voulais
tout. J’aurais aimé encore la penser physiquement proche d’une main, ou de ma
langue, de mon sexe, de mes doigts.
Je voulais qu’elle soit, là,
devant moi, que je puisse l’espérer nue et offerte, sexe luisant, mais je
n’étais que devant un écran, sans rien d’écrit.
L’espace irréel reprenait sa
place.
« Bonsoir toi »
Et elle envoya toute une série
de photos où elle posait plus ou moins nue, plus ou moins sensuelle, et je la
regardais sans oser, oser, oser…
« Bonsoir
toi »…
« Qu’en
dis-tu ? »
Je ne peux plus écrire, je ne
peux plus penser. Je ne crois plus que penser existe, je ne crois pas que mes
pensées m’existent, me survivent, s’inscrivent sur des pages, qui se suivent,
des chocs, des pulsions, des sucs et des odeurs.
Je balaie les photos d’un
regard, regard,..Il n’est pas malveillant, mon regard, il est enveloppant,
pénétrant, observateur.
« En veux-tu
plus ? »
Encore plus, comment y
survivrais-je ? Elle est de plus en plus loin à force d’en montrer autant.
Elle s’éloigne de plus en plus, elle exhibe son corps de façon vulgaire,
provocant. Bientôt, je ne la verrais plus, elle s’éloigne de ce que j’imagine
pour elle, par elle, elle devient ce que je craignais qu’elle devienne, que je
pensais que j’allais la faire devenir. Je lui demande d’arrêter, de revenir.
« Stop », je lui
écris.
« Bonsoir Marc. Pourquoi
me dis-tu stop ? »
Pourtant elle n’existe pas
plus maintenant que lorsqu’elle était proche de moi, pas si loin, plus près, à
portée de tout ce que mon corps a à sa disposition pour la sentir et la
toucher.
Pourtant, pourtant, elle
m’enivrait, m’envoutait.
Je viens de m’apercevoir que
je ne l’ai pas encore nommée.
En fait, elle n’est pas seule,
elle aurait pu être multiple avant d’être celle-là. Elle sera celle-là le temps
de parcourir ce qu’il y a à parcourir.
Nous nous sommes croisés à un
moment précis où chacun avait à prouver quelque chose dans la sensualité à qui
était en capacité de le sentir, de le vouloir, de l’intercepter.
Ce fût-elle. Sans conteste,
elle. Ça restera elle.
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